Hypertension artérielle : des vaisseaux sous pression

L'hypertension touche un adulte sur 3. Une meilleure hygiène de vie et la prise de médicaments peuvent suffire à la traiter. Mais ce n'est pas le cas pour les hypertendus résistants qui risquent un accident cardiovasculaire.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

La tension, mode d'emploi

Le docteur Jimmy Mohamed explique le mécanisme de l'hypertension artérielle.
Le docteur Jimmy Mohamed explique le mécanisme de l'hypertension artérielle.  —  Le Magazine de la Santé - France 5


L'hypertension artérielle, ou HTA, est une maladie silencieuse qui touche un Français sur trois d'après Santé publique France, alors que la moitié seulement le sait. Elle est l'un des principaux facteurs de risque des maladies cardiaques, de l'insuffisance rénale et des accidents vasculaires cérébraux (AVC).

L'hypertension artérielle est une maladie qui progresse avec l'âge : une personne sur deux après 65 ans est touchée, alors que moins d'un adulte de 18 à 25 ans, sur 10 est concerné (source : INSERM). Le vieillissement diminue en effet l'élasticité des artères. Mais c'est aussi une maladie qui touche de plus en plus d'adolescents en surpoids.

A quoi correspondent les 2 chiffres de la tension ?

Le coeur est un muscle et une pompe. Quand il se contracte, il expulse le sang dans les artères pour aller irriguer les organes. La tension correspond à la pression exercée par le sang sur les parois des "tubes" que sont les vaisseaux sanguins. Quand le coeur se contracte, la pression sanguine dans les vaisseaux est maximale : c'est ce qu'on appelle la pression systolique. Les vaisseaux se dilatent. Quand le coeur se relâche, la pression est minimale : c'est ce qu'on appelle la pression diastolique. Les vaisseaux se rétractent.

Pour mesurer la tension artérielle, le médecin utilise un tensiomètre autour du bras, qui indique deux chiffres (par exemple 12/8). Le premier (12) correspond à la pression systolique, c'est la pression maximale, mesurée au moment où le coeur se contracte. Le deuxième (8) correspond à la pression diastolique, mesurée quand le coeur se relâche. 

On parle d'hypertension artérielle à partir d'une tension à 14/9. Pour poser le diagnostic, on recommande 3 consultations, entre 3 à 6 mois, avec deux mesures de la tension artérielle durant la consultation.  Elle doit aussi être mesurée en dehors du cabinet médical, grâce à l'auto-mesure.

Qu'est-ce qui peut provoquer l'hypertension ?

Dans la très grande majorité des cas, les causes de l'hypertension ne sont pas clairement identifiées, même si on sait que l'hérédité joue un rôle important. Mais les facteurs qui la favorisent et l'aggravent, eux, sont bien connus : une trop grande consommation de sel, le stress, le tabagisme, le surpoids, ou un manque d'activité physique, un excès de cholestérol, un diabète...

 Beaucoup plus rarement, la hausse de la tension artérielle est la conséquence d'une maladie comme une maladie rénale chroniquet des reins, des glandes surrénales ou de la thyroïde

D'autres facteurs, non modifiables, entrent également en jeu : le sexe masculin, des antécédents familiaux, un petit poids de naissance ou une naissance prématurée, une catégorie socio-économique défavorisée, l'apnée du sommeil, etc.

Un dérèglement artériel

Si la mesure de la tension est supérieure à 14 pour le premier nombre ou à 9 pour le deuxième, on parle d'hypertension artérielle (HTA), une situation anormale pour l'organisme car les conséquences sur les vaisseaux et sur certains organes sont parfois mortelles. 

Le sang étant propulsé trop vite dans les vaisseaux, ceux-ci vont en effet mal réagir à cette pression excessive. Leur paroi se fragilise et, à la longue, peut menacer de se rompre pour provoquer une hémorragie. Cela augmente aussi le risque de caillots qui peuvent boucher une artère. Arrive alors l'infarctus ou l'attaque vasculaire cérébrale, le fameux AVC, qui tue 40.000 personnes par an en France (un AVC a lieu toutes les 4 minutes). D'où l'importance du dépistage de l'hypertension artérielle et d'une prise en charge adaptée.

Symptômes et dépistage de l'hypertension

Le plus souvent, l'hypertension ne s'accompagne d'aucun symptôme, ce qui la rend difficile à détecter. Mais des maux de tête répétés, des bourdonnements d'oreille, des sensations de mouches volantes devant les yeux ou des saignements de nez, un essoufflement ou des vertiges sont quelques unes des manifestations qui doivent alerter.

Les reins et les yeux sont aussi des cibles pour l'hypertension artérielle car ils sont irrigués par de nombreux petits vaisseaux. Insuffisance rénale et troubles de la vision sont ainsi des signes fréquents d'une hypertension.

Mais le seul moyen de dépister formellement une hypertension est d'en faire la mesure au cours d'une visite médicale : 11% d'entre elles concernent d'ailleurs des problèmes liés à l'hypertension. Enfin, pour détecter et contrôler sa tension, on peut pratiquer l'automesure, à l'aide d'un appareil automatique.

Pour améliorer la prise en charge des malades hypertendus dont les traitements ne sont pas suffisamment efficaces, il existe aujourd'hui des consultations spécialisées de l'hypertension. Les patients viennent sur recommandation de leur généraliste. L'objectif est de faire le tour de la situation de santé du malade, pour essayer de trouver la cause de cette hypertension résistante.

Savoir mesurer sa tension et traiter si besoin...

Savoir bien prendre sa tension quand on est un hypertendu, ça n'est pas si simple. Il existe des appareils d'automessure pour évaluer sa tension et pour que les hypertendus les plus résistants soient le mieux dépistés et orientés, l'automesure peut être très utile.

Les hommes et les personnes âgées ont plus de risque d'être hypertendus. 70% d'entre eux souffrent d'une hypertension. La mesure de la tension est même recommandée une fois par an à partir de 40 ans.

Les mesures non médicamenteuses

Sel, je réduis ma consommation
Sel, je réduis ma consommation  —  Le Magazine de la Santé

Certains comportements sont aussi mauvais : si vous êtes en surpoids, par exemple, que vous mangez salé et gras, vous encrassez vos artères en favorisant le dépôt de plaques de graisse sur leur paroi. Le coeur doit fournir alors un travail plus important. 

Il est nécessaire de mettre en place des règles d'hygiène, faisant appel à une perte de poids pour obtenir un indice de masse corporelle (poids divisée par la taille au carré) inférieur à 25, une diminution de la consommation de sel (moins de 5 grammes de sel par jour, soit 2 grammes de sodium, d'après la Haute Autorité de la santé) et d'alcool. l'alimentation est censée être riche en fruits, légumes et céréales, mais pauves en graisses notamment saturées et animales.

Les fumeurs sont également plus susceptibles d'avoir une hypertension. En effet, la fumée abîme les artères et le cœur tandis que la nicotine augmente la tension artérielle. Enfin, le manque d'activité sportive est un facteur aggravant l'état d'hypertension.

Les traitemements de l'hypertension artérielle

Il existe de nombreux médicaments qui permettent de réguler la pression artérielle, en agissant sur coeur, les vaisseaux ou le taux de sel dans le sang. Ils sont répartis en 8 familles de médicaments. D'après Santé publique France, un adulte souffrant d'hypertension prendun traitement.

Contrairement aux idées reçues, le stress n'est la cause de l'hypertension mais il peut avoir un impact sur les chiffres. Impact qui est soit transitoire car le corps répond aux émotions, comme le stress, la colère, l'anxiété, par des réactions biologiques qui ont des répercussions sur le rythme cardiaque et l'élévation de la tension... Soit plus permanent en présence d'autres facteurs de risque génétiques ou environnementaux par exemple (étude Hypertension et stress, EM consult).

Une nouvelle chirurgie contre l'hypertension

Une nouvelle chirurgie pour traiter l'hypertension
Une nouvelle chirurgie pour traiter l'hypertension  —  Le Mag de la Santé - France 5

En cas d'hypertension sévère, une chirurgie avec la dénervation rénale peut être envisagée. 

L'intervention se passe au niveau des artères rénales, et plus précisément des nerfs qui les entourent. Chez cette patiente, ils sont particulièrement actifs et contractent les vaisseaux plus qu’à la normale. La pression sanguine augmente, et donc, la tension aussi. Il va falloir détruire des nerfs, pour que les vaisseaux se dilatent, et que la pression artérielle baisse.

"Au niveau de cette sonde, vous avez quatre petits dipôles métalliques qui vont conduire le courant de radiofréquence, ce sont les quatre points où va se faire la petite brûlure pour brûler les racines nerveuses autour de l’artère du rein", explique le Dr Raphaël Lasserre, cardiologue au centre hospitalier de Pau. 

L’intervention dure en tout une demi-heure, ses effets sur les nerfs sont définitifs. Céline devrait ressentir les premiers effets d’ici deux mois. Elle peut espérer baisser sa pression systolique de 5 à 10 mm de mercure. 

Des stages pour apprendre à contrôler son hypertension

Un programme sur-mesure pour traiter les hypertendus  —  Le Magazine de la Santé - France 5

Depuis 2002, l'hôpital de Dinard en Bretagne propose une prise en charge spécifique pour les patients dont l'hypertension a entraîné des complications cardiovasculaires. Au programme : quatre semaines de stage intensif pendant lesquelles les patients bénéficient d'ateliers d'éducation thérapeutique, diététique et physique.

Au cours de ces divers ateliers, les participants apprennent notamment à mesurer correctement leur tension, à bien manger et à identifier les aliments dont il faut limiter la consommation... Ils participent également à des séances d'activité physique adaptée pour lutter contre l'inactivité physique, un autre facteur de risque de l'hypertension.

Grossesse et hypertension : relâcher la pression

L'hypertension durant la grossesse est une menace importante pour le bébé comme pour la maman. Pour les hypertendues chroniques, la grossesse augmente encore la tension. Mais d'autres femmes peuvent déclencher une hypertension uniquement durant cette période. Dans les deux cas, la prise en charge est indispensable pour contrôler les variations de tension.

On exerce la même surveillance de l'hypertension quand elle est chronique ou si elle est survenue durant la grossesse.

Il existe de nombreux médicaments qui permettent de réguler la pression artérielle, en agissant sur coeur, les vaisseaux ou le taux de sel dans le sang. Ils sont si fréquemment utilisés qu'ils représentent 12% des prescriptions pharmaceutiques. Ils sont répartis en 8 familles de médicaments.

Faire du sport pour lutter contre l'hypertension

Pour lutter contre l'hypertension, le sport est une solution efficace en complément des médicaments. À condition que cette pratique soit encadrée.

Le sport n'est pas du tout incompatible avec l'hypertension, au contraire il est même conseillé par les médecins. Les malades doivent préalablement passer un bilan médical complet pour définir un programme sportif sur mesure.

Les entraînements sont intensifs, inspirés de ceux des grands sportifs comme l'explique le Dr Roland Krzentowsky, médecin du sport : "Nous entraînons les patients comme les champions. Ce qui est valable pour améliorer le coeur et les muscles des champions est aussi valable pour améliorer le coeur et les muscles des patients hypertendus. Et c'est l'amélioration de ces indicateurs de la condition physique qui feront l'efficacité thérapeutique".

Hypertension : prévenir les risques de troubles cognitifs

Pour prévenir les risques de troubles cognitifs chez les patients hypertendus, une étude* a été menée à l'hôpital Broca, à Paris.

"On sait depuis quelques années que l'hypertension artérielle augmente le risque de troubles de la mémoire et de maladie d'Alzheimer. On dit que l'hypertension artérielle multiplie ce risque par deux, voire par trois. Et il a été démontré dans certaines études que le traitement antihypertenseur peut réduire le risque de démence, de maladie d'Alzheimer", explique le Pr Olivier Hanon, chef du service gériatrie à l'hôpital Broca.

L'objectif de cette étude était de confirmer ces résultats. Pour cela, les participants sont soumis à des prises régulières de tension mais aussi à des questionnaires sur la mémoire. Les patients de l'étude présentent des troubles cognitifs modérés, détectés grâce à un examen IRM systématique : "Grâce à l'IRM cérébrale, on peut maintenant détecter des petites lésions vasculaires qui vont être responsables des troubles de la mémoire, souligne le Pr Hanon, ces petites lésions s'appellent des hypersignaux de la substance blanche (…) elles vont multiplier par quatre le risque de développer une maladie d'Alzheimer. On voit donc tout l'intérêt de pouvoir débuter un traitement antihypertenseur avec un objectif tensionnel très strict pour éviter qu'au cours du temps, il y ait une aggravation de ces lésions afin de prévenir les troubles de la mémoire". Les résultats de cette étude portant sur 800 patients ontété connus en 2018.

Une grande étude publiée en 2019 dans le JAMA a montré les bénéfices de certaines mesures sur le déclin cognitif et le risque de démence. Les personnes avec les 7 critères de santé optimale (non fumeurs, avec un poids normal, une alimetnation saine, une activité physique régulière, mais aussi un taux de cholestérol, une glycémie et une tension artérielle contrôlés), présentaient un risque de démence divisé par 2 en comparaison des patients présentant seuls 2 crières de santé optimale

*Hypertension artérielle et troubles neurocognitifs. Arch Mal coeur et vaiss. Piccoli. Doi : 10.1016/j.amcp.2020.02.007 

Hypertension : gare à l'effet blouse blanche

Il arrive que la tension ne grimpe que lorsque c'est un médecin o qui prend la tension, et qu'elle est normale autrement, c'est une hypertension liée à la blouse blanche. L'hypothèse est vérifié en mesurant la pression artérielle sur 24 heures (elle est alors normale dans les conditions de vie habituelles)

En 2019, une étude publiée dans le British medical Journal a conclu que cette hypertension était associée à un risque doublé de décès à cause d'une maladie cardiaque. Elle pourrait être un signe annonciateur de gravité ultérieure en étant un stade intermédiaire, entre une tension artérielle normale et une hypertension (source : étude White coat syndrome and its variations de 2018).

Identifier les patients victimes de la blouse blanche

Lorsque le patient a déjà une hypertension traitée par anti-hypertenseur, et que la tension est plus haute quand elle est prse par un soignant, c'est ce qu'on appelle l'effet blouse blanche. Un effet connu qui peut conduire certains patients à prendre des médicaments inutilement. 

Dans 30% des cas, l'hypertension peut être provoquée par le stress de la consultation. Pour savoir si un patient est victime de l'effet blouse blanche, ce dernier doit réaliser des mesures en présence du médecin et des mesures, seul, à domicile.

En 2022, une étude a montré que même sans atteinte cardiaque, l'effet blouse blanche pourrait doubler le risque de mourir d'une maladie cardio-vasculaire.

Hypertension : un stimulateur implantable à l'essai

Chez certains patients, la tension reste élevée malgré la prise de plusieurs médicaments. Un essai clinique teste l'efficacité d'un stimulateur implantable capable de faire baisser la tension.

Le régulateur de tension est implanté sous la peau du patient. Il s'agit d'une sorte de batterie reliée à une petite électrode placée dans le cou du patient à la surface de l'artère carotide.

Grâce à un courant électrique, l'électrode stimule les capteurs de pression défaillants et leur permettre ainsi de jouer leur rôle dans la régulation de la pression artérielle.

Toutefois, ce système n'est pas la solution miracle comme l'explique le Pr Patrick Rossignol, médecin vasculaire : "On n'arrêtera pas les médicaments car les patients en ont besoin. Mais peut-être que ce dispositif permettra d'améliorer le contrôle tensionnel et de les protéger par rapport au risque de survenue de complications cardiovasculaires, rénales… au cours des années suivantes".

L'essai randomisé ESTIM-rHTN porte sur 128 patients a pour but d'évaluer l'efficacaité de dispositif mais surtout son coût économique en comparaison aux traitements classiques. Les résultats sont attendus au début 2021. D'autres études ont montré son efficacité pour faire baisser la pression altérielle, comme la méta-analyse Efficacy and safety of baroreflex activation therapy fort treament of resistant hypertension (CLinic Exp hypertension, 2018) mais les auteurs de cette dernière ont pointé du doigt les limites de cette affirmation, devant le peu d'études randomisées, le petit nombre de patients inclus ou encore le risque de biais. D'autres travaux sont nécessaires.

EN 2020, une méta-analyse synthétisait les données disponibles sur ce type de thérapie (par amplification du baroréflexe ou modulation carotidienne) et estimait que d'autres travaux en double aveugle et contrôlés étaient nécessaires. 

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· Fondation de recherche sur l'hypertension artérielle
· Santé publique France
· Inserm
· Organisation mondiale de la Santé
· Fédération Française de Cardiologie