Première médicale : un foetus opéré du cerveau grâce à une chirurgie in utero

Le bébé, atteint d’une rare malformation congénitale des vaisseaux sanguins, a été opérée du cerveau deux jours avant sa naissance.

Mathis Thomas
Mathis Thomas
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Pour éviter les risques de malformation, les chirurgiens ont proposé aux parents de participer à un essai clinique
Pour éviter les risques de malformation, les chirurgiens ont proposé aux parents de participer à un essai clinique  —  Boston Children's Hospital

Une première dans l'histoire médicale. Si les opérations in utero sont assez peu fréquentes en règle générale, opérer le cerveau d’un fœtus dans l’utérus de sa mère relève de la prouesse médicale. C’est donc un cas unique qui s’est présenté à une équipe de chirurgiens du Massachusetts General Hospital et de l’hôpital pour enfants de Boston.

Ces médecins ont opéré un vaisseau sanguin malformé dans le cerveau d’un bébé se trouvant encore dans l’utérus de sa mère. Kenyatta et Derek Coleman attendent leur quatrième enfant, lorsque le couple originaire de l’État de Louisiane aux États-Unis apprend que leur bébé est atteint d’une malformation foetale rare : la malformation anévrismale de la veine de Galien (MAVG).

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"Son coeur était hypertrophié"

Les deux premiers trimestres de grossesse de Kenyatta Coleman se déroule comme les trois précédentes. “Le bébé allait bien”, confie-t-elle à CNN. “Son scanner est revenu sans anomalie. Tous ses profils biophysiques étaient normaux.

Mais à la 30e semaine de grossesse, lors d’un contrôle de routine, le couple commence à s’alarmer. “Ma gynécologue m’a dit qu’elle était inquiète, que quelque chose n’allait pas au niveau du cerveau du bébé, et que son cœur était hypertrophié”, poursuit Kenyatta Coleman. Leur nouveau-né souffre d’une malformation anévrismale de la veine de Galien. 

C'est quoi la MAVG ?

Selon Orpha.net, la malformation anévrismale de la veine de Galien se caractérise “par la dilatation d'une veine embryonnaire précurseur de la veine de Galien”. Cette maladie rare, “avec moins de 800 cas décrits”, provoque des problèmes de circulation sanguine chez le nouveau-né, qui risque d’importantes lésions cérébrales à la naissance ainsi qu’une insuffisance cardiaque. 

En règle générale, les nourrissons touchés par la MAVG sont opérés et traités après la naissance. Selon le Dr Darren Orbach, radiologue à l’hôpital pour enfants de Boston, “50 à 60 % des bébés atteints de cette anomalie deviennent très malades immédiatement après la naissance” et “il y a environ 40 % de mortalité pour ces enfants”. 

L’équipe de scientifiques a donc proposé aux parents de participer à un essai clinique pour éviter les risques de malformation à la naissance. Le déroulé de l’opération, réalisée en mars, a été dévoilé dans la revue Stroke

Deux patients : la mère et son bébé

Dans ce genre de chirurgie, il y a en réalité deux patients : la mère et son bébé. Les médecins devaient s’assurer que le fœtus était dans la bonne position, avec sa tête contre l’abdomen de sa mère, pour faciliter l’opération.

Ils ont ensuite utilisé un cathéter dans la veine de Galien pour ralentir le flux sanguin et réduire la pression, grâce à des minuscules bobines métalliques injectées dans la varice. “Une fois que le fœtus est en position optimale, il reçoit une petite injection de médicament pour qu'il ne bouge pas et une seconde pour soulager la douleur", explique le Dr Louise Wilkins-Haug, directrice de division de médecine foeto-martenelle et de génétique reproductive de l’hôpital de Boston, qui a participé à l’opération.

Le bébé se porte bien

Les signes vitaux de l'enfant se sont améliorés immédiatement après l’opération. Denver Coleman est né deux jours plus tard, à 34 semaines de grossesse (contre 40 environ pour une grossesse menée à son terme), suite à la rupture prématurée des membranes de la mère. 

Deux mois après sa naissance, le bébé se porte bien et n’a besoin d’aucun traitement spécifique pour traiter l’insuffisance cardiaque, contrairement aux nouveau-nés souffrants de MAVG. “Nous sommes heureux d’annoncer qu’après six semaines, l’enfant progresse remarquablement bien, qu’il ne prend aucun médicament, prend du poids et est de retour chez lui”, se félicite le Dr Orbach dans un communiqué. “Il n’y a aucun signe d’effets négatifs sur le cerveau.

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