Est-il dangereux de prendre de l'aspirine tous les jours ?
Utilisée pour calmer la douleur ou faire baisser la fièvre, l’aspirine occupe une place singulière dans nos armoires à pharmacie. Mais existe-t-il un risque à l'utiliser quotidiennement ? La réponse d'un pharmacologue.


L'aspirine est-elle un médicament "miracle" ? Ces dernières années, différentes études ont vanté les mérites de l'aspirine, ou acide acétylsalicylique, pour la santé. Elle est notamment portée aux nues pour ses effets sur la santé cardiovasculaire, voire sur la prévention de certains types de cancers. Poussées par cette bonne réputation, de nombreuses personnes ont commencé à prendre de l'aspirine quotidiennement, dans l'espoir de voir leur santé globale s'améliorer. Mais est-ce une bonne idée ?
Un médicament qui nécessite un suivi spécifique
"La prise régulière d'aspirine peut être prescrite dans des situations médicales extrêmement spécifiques, souvent liées à des troubles cardiovasculaires", nous explique le Professeur Nicolas Authier, pharmacologue au CHU de Clermont-Ferrand. "En cas de péricardite par exemple, on recommande aux patients de prendre de l'aspirine régulièrement pour une durée de quelques semaines maximum, le temps de réduire l'inflammation." Dans ce cas, un suivi médical strict de la fonction artérielle et rénale est indispensable.
L'aspirine peut aussi être employée à plus faible dose pour fluidifier le sang dans le traitement de certains troubles cardiovasculaires. Elle possède en effet une action d'antiagrégant plaquettaire, ce qui signifie qu'elle empêche les plaquettes contenues dans le sang de s'agréger et de former des caillots. "Ces usages reposent sur une prescription très précise et un encadrement médical adapté, car il s’agit toujours de traitements ponctuels ou adaptés à des profils de risque particuliers", ajoute le pharmacologue.
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L'aspirine, c'est pas automatique...
En dehors de ces cas précis et médicalement accompagnés, l'aspirine doit cependant "rester un traitement ponctuel", rappelle le Pr Authier. Les risques, pour les consommateurs réguliers d'aspirine, sont multiples. "L’auto-médication en aspirine expose à une toxicité gastrique importante, avec un risque d’ulcères et d’hémorragies digestives", ajoute le pharmacologue. "L'aspirine peut également affecter la fonction rénale et augmenter le risque de développer de l'insuffisance rénale." Cet anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) est pourtant souvent pris quotidiennement pour améliorer la santé cardiaque.
Le Pr Nicolas Authier indique toutefois que cette pratique, en plus d'être dangereuse, est parfaitement inutile "en première intention". Il explique que la prise d'aspirine "peut être recommandée pour les personnes ayant déjà souffert d'un accident vasculaire cérébral ou d'un infarctus pour prévenir leur récidive, mais aucun bienfait n'a été démontré sans ces antécédents médicaux". Comme pour tous les AINS, le Pr Authier rappelle qu’il ne faut jamais dépasser quatre à cinq jours d’utilisation d'aspirine en auto-médication, et seulement pour soulager une douleur passagère ou une fièvre.
... surtout lors de la grossesse ou pour les personnes asthmatiques !
Chez certaines personnes fragiles, prendre de l'aspirine doit même être évité. "Il est déconseillé de prendre de l'aspirine après le sixième mois de grossesse, quelle que soit la dose", signale le Pr Nicolas Authier. "Ce médicament peut favoriser les malformations chez l'enfant à naître, en provoquant une fermeture prématurée du canal artériel, qui peut entraîner une hypertension pulmonaire."
Les patients asthmatiques doivent également utiliser l'aspirine avec prudence, car elle peut déclencher ou aggraver des crises. Dans tous les cas, l’automédication quotidienne, en aspirine ou avec tout autre médicament, expose à des effets secondaires parfois importants. N'hésitez pas à consulter un professionnel de santé avant de suivre un traitement médicamenteux, pour vous assurer qu'il n'existe aucune contre-indication.