Lutényl et Lutéran : deux études confirment les risques de tumeur

Les deux traitements progestatifs Lutényl et Lutéran sont bien associés à un risque accru de méningiome, une sorte de tumeur cérébrale, confirme l’Agence du médicament. Elle confirme donc leurs restrictions d’utilisation.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Image d'illustration.  —  Crédits Photo : © Allodocteurs.fr / Le Magazine de la Santé

Deux traitements progestatifs, un même risque de tumeur du cerveau. Le Lutényl et le Lutéran sont bien associés à un risque accru de méningiomes, confirme le 20 avril l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), qui publie le 20 avril deux rapports pharmaco-épidémiologiques.

Une association forte, qui dépend de la dose

Ces rapports s’appuient sur deux études observationnelles conduites par le groupement d'intérêt scientifique (GIS) Epi-Phare. Dans les deux cas, ces études concluent à l’existence d’une association forte, dépendante de la dose, entre l’utilisation prolongée de l’acétate de nomégestrol (Lutényl et génériques) et de l’acétate de chlormadinone (Lutéran et génériques) et le risque de méningiomes.

Si les méningiomes sont généralement des tumeurs non cancéreuses, ils compriment certaines zones du cerveau et nécessitent le plus souvent une chirurgie à risque pour la patiente.

Les études confirment aussi que la réduction du risque est notable après l’arrêt du traitement.

18,5 cas pour 100.000 personnes avec le Lutéran

Dans le détail, les résultats obtenus sur ces deux molécules sont comparables. Pour le Lutéran, les experts ont analysé les données de 1.057.392 femmes âgées de 10 à 70 ans vivant en France qui ont commencé le traitement entre 2007 et 2017. Elles ont été classées en deux groupes, "exposées" ou "très légèrement exposées", selon les doses qu'elles ont reçues.

Dans le groupe "exposées", l'incidence du méningiome était de 18,5 pour 100.000 personnes par an, contre 6,8 pour 100.000 personnes par an dans le groupe "très légèrement exposées".

19,3 avec le Lutényl

Pour le Lutényl, les experts se sont appuyés sur les données de 1.060.779 femmes âgées de 10 à 70 ans vivant en France qui ont commencé le traitement entre 2007 et 2017.

Le groupe "exposées" présentait une incidence de 19,3 cas de méningiome pour 100.000 personnes par an, contre 7,0 pour 100.000 dans le groupe "très légèrement exposées".

Le mécanisme biologique encore inconnu

Dans ces deux rapports, les experts observent que "les méningiomes localisés dans la partie antérieure et moyenne de la base du crâne étaient particulièrement associés à l’exposition prolongée" à l’une ou l’autre de ces molécules.

Pour ces scientifiques, "l’ensemble des éléments caractérisent une relation de nature causale même si le mécanisme biologique sous-jacent n’est pas encore complétement connu".

Surveillance par IRM cérébral

En attendant de comprendre ce mécanisme, l’ANSM confirme ses recommandations émises en janvier 2021 : restreindre les indications de ces traitements aux seuls cas de douleurs de seins invalidantes, d’endométriose et d’hémorragies liées à des fibromes utérins.

Pour ces trois situations, "le traitement devra être le plus court possible ET le rapport bénéfice/risque doit être réévalué au minimum une fois par an" tranchait alors l’ANSM. Et pour les femmes sous traitement, une surveillance régulière par IRM cérébral devra aussi être mise en place.

Le Lutényl et le Lutéran ne doivent désormais plus être utilisés contre les troubles de la ménopause, contre les irrégularités du cycle menstruel ou les syndromes prémenstruels, contre les douleurs de seins non sévères ou encore comme contraception.

En 2019, ces deux traitements progestatifs étaient pris par plus de 400.000 femmes en France pour soulager des troubles menstruels ou des symptômes de la ménopause.