La pénurie de médicaments s'est encore aggravée en 2023

La pénurie de médicaments se poursuit en France. En 2023, près de 5 000 signalements de ruptures de stocks et risques de ruptures ont été recensés, soit plus du double qu’en 2021.

Alexis Llanos avec AFP
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L'ANSM a enregistré l'an dernier 4 925 déclarations de ruptures de stocks
L'ANSM a enregistré l'an dernier 4 925 déclarations de ruptures de stocks  —  Shutterstock

Les difficultés d'approvisionnement de médicaments se sont encore aggravées en France en 2023 : près de 5 000 signalements de ruptures de stocks et risques de ruptures ont ainsi été recensés par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), qui compte sur la nouvelle charte adoptée à l'automne pour mieux gérer la situation. 

Une hausse des signalements de 30,9 %

Au total, l'ANSM a enregistré l'an dernier 4 925 déclarations de ruptures de stocks, contre 3 761 en 2022, soit une hausse de 30,9%. Ces signalements ont plus que doublé (+128 %) par rapport aux 2 160 signalements reçus en 2021.

Cette progression s'explique notamment "par le souhait des autorités d'avoir des déclarations le plus tôt possible", avant que ne surviennent les ruptures, indique à l'AFP la directrice générale de l'ANSM, Christelle Ratignier-Carbonneil. 

Une dizaine de laboratoires sanctionnés

Un même médicament peut faire l'objet de plusieurs signalements par les acteurs concernés par la distribution des produits au cours d'une même année, précise aussi l'Agence. Pour 40 % des déclarations, il a fallu mettre en place des mesures pour couvrir les besoins des patients : importer des médicaments similaires, contingenter certains médicaments, etc.

L'Agence a vu ses pouvoirs de police sanitaire renforcés ces deux dernières années. En 2023, elle a sanctionné "une dizaine de laboratoires à hauteur de 500 000 euros" pour des "déclarations trop tardives" sur les risques de tensions, le non respect des plans de gestion des pénuries et des stocks de sécurité, détaille Mme Ratignier-Carbonneil. Ces sanctions financières sont publiées sur le site de l'organisation pendant un mois.

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Des causes multiples

Le problème de disponibilité des médicaments est récurrent depuis plusieurs années et touche de nombreux pays. Ses causes sont multiples : "Difficultés survenues lors de la fabrication des matières premières ou des produits finis, défauts de qualité sur les médicaments, capacité de production insuffisante, morcellement des étapes de fabrication, etc.", énumère l'ANSM.

À cela s'ajoute l'augmentation des besoins en médicaments en raison du vieillissement des populations. Si "toutes les classes de médicaments sont concernées" par ces déclarations, souligne l'Agence, "les médicaments cardiovasculaires, les médicaments du système nerveux, les anti-infectieux et les anticancéreux sont plus particulièrement représentés". 

Une amélioration pour l'amoxicilline

Concernant l'antibiotique le plus courant, l'amoxicilline, l'ANSM constate "depuis quelques semaines, une amélioration progressive de l'approvisionnement" des pharmacies et des grossistes-répartiteurs "sur l'ensemble du territoire, en particulier sur les présentations pédiatriques".

La "surveillance extrêmement rapprochée" dont fait l'objet l'amoxicilline a par ailleurs été élargie à deux autres molécules - l'azithromycine et la cefpodoxime pédiatrique - pour lesquelles il a été également demandé aux industriels de libérer leurs stocks, a ajouté Mme Ratignier-Carbonneil. Leur utilisation "est beaucoup plus importante en raison de la recrudescence des infections à mycoplasmes depuis la fin de l'année dernière", explique la responsable. 

La pénurie, une affaire "de confiance"

Des échanges réguliers ont lieu sous l'égide de l'Agence avec l'ensemble des acteurs qui partagent leurs données pour avoir "une meilleure remontée des difficultés" et adapter les réponses à apporter, détaille-t-elle. "Toutes les mesures sont passées au crible", affirme la directrice. La gestion des pénuries est une affaire de "confiance", dit-elle : "il faut que les industriels ne craignent pas les surstocks au niveau des grossistes et des pharmaciens", et qu'à leur tour, les pharmaciens ne passent "pas des commandes trop importantes de peur de ne pas être réapprovisionnés", étaye-t-elle.

Dans le cadre de son plan hivernal visant à anticiper les ruptures de médicaments, l'Agence surveille aussi d'autres spécialités comme le paracétamol et les corticoïdes. Pour les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM), pour lesquels les situations de rupture sont les plus préjudiciables en matière de santé publique, les industriels sont tenus d'alerter toute rupture de stock ou risque de rupture sur une plateforme de télédéclaration (Trustmed). 

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Le Mag de la Santé - France 5