Cancer : comment retrouver l'appétit malgré les traitements ?

L'altération du goût est un effet secondaire fréquent de la chimiothérapie. Pour redonner aux patients le plaisir de manger, l’institut de recherche Paul Bocuse a lancé le projet Canut "Cancer Nutrition et Goût". Reportage.

Farah Kesri
Rédigé le
Cancer et appétit : adapter les menus
Cancer et appétit : adapter les menus  —  Le Mag de la Santé - France 5

Odeur, aspect, saveur... David Fillat analyse tous les paramètres du plat. Pourtant, il n’est pas critique culinaire : il participe à une expérimentation sur l’altération du goût par les traitements de chimiothérapie dans un restaurant qui est aussi un laboratoire au sein de l’institut de recherche Paul Bocuse.   

Perturbations sensorielles

"Le principe du projet CANUT (Cancer Nutrition et Goût) est de suivre des patients avant leur chimiothérapie, au cours et après celle-ci. Notre hypothèse, c'est que la chimiothérapie affecte les récepteurs du goût et de l'olfaction", explique Agnès Giboreau, directrice de recherche projet Canut.

C’est le cas de David. Il est actuellement en rémission de son lymphome. Mais durant la phase de traitement, sa perception gustative était altérée.

"J'ai eu au total 12 chimiothérapies et ensuite de la radiothérapie. J'avais beaucoup moins envie de consommer, c'est surtout ça qui a été pesant. La fatigue baisse un peu l’appétit. Pendant les traitements de chimiothérapie, j'avais besoin d'assaisonner un peu plus qu'auparavant", précise-t-il.

Lutter contre la dénutrition

Mais ce n'est pas tout :"selon le gel douche que j'avais utilisé, ça interférait dans ma sensation du goût. Si je sentais cette odeur de gel douche, je n’appréciais pas vraiment ce que je mangeais", poursuit David. Ce type d’altération est décrit par la plupart des patients sous chimiothérapie. Et chez 39 % d’entre eux, une dénutrition apparaît. Le projet Canut vise à réduire ce risque.

"Le principe est de passer par le plaisir de manger pour continuer à garder une alimentation adaptée. On a besoin d'être dans un bon état nutritionnel pour pouvoir aider le corps à se défendre contre la maladie", commente Agnès Giboreau.

C'est pour aider les patients à retrouver le plaisir de manger malgré la maladie, que dans ces laboratoires culinaires, des chercheurs et des chefs cuisiniers travaillent ensemble. Ils élaborent des recettes adaptées au profil de chaque patient.    

Adapter les recettes à chaque diagnostic

Pour répondre aux différents diagnostics, plusieurs versions des recettes sont proposées. Pour les personnes hypersensibles aux odeurs et aux goûts, une recette adoucie qui ne va donc pas trop stimuler les sens est proposée.

Pour les personnes qui ont perdu toute sensibilité au goût et à l'odorat, une version plus riche en sensation avec des épices est élaborée.

C'est le même principe pour le dessert, Marie a préparé deux versions de Tiramisu. L’une adoucie avec plus de crème mascarpone pour casser l’acidité. L’autre plus gourmande enrichie en nutriments pour aider le patient à reprendre des forces.    

Le dessert est prêt, il est temps de déguster. Comme David, une trentaine de patients ont participé aux différentes expériences du projet Canut. Les résultats sont attendus en 2023 avec la publication de 25 recettes spécialement adaptées aux patients.

Recette du tiramisu aux framboises élaboré par les chefs de l'Institut Paul Bocuse


- 50 g de noix de cajou caramélisées.
- 20 g de jus de framboise brute.  
- 200 g de crème fouettée entière.  
- 100 g de sucre glace.
- 50 g de crème liquide entière.  
- 80 g de sucre blanc.  
- 5 g de sucre vanillé.  
- Citron vert.  
- 200 g de framboises fraîches.
- 160 g de biscuits à la cuillère.