Don du sang : gays, anglais et abstinents

La Grande-Bretagne a ouvert le don du sang aux homosexuels occasionnels : ceux n'ayant eu aucune relation sexuelle dans les 12 mois précédant le don. En France, le don exclut tous les hommes ayant eu un rapport sexuel avec un homme.

Setti Dali
Rédigé le , mis à jour le
Don du sang : gays, anglais et abstinents

Un an d'abstinence... Tel est désormais le prix à payer pour donner son sang en Grande-Bretagne, du moins pour les homosexuels. Et c'est une avancée de taille. Car jusqu'alors, ils en étaient exclus. Une mesure d'interdiction qui date des années 1980, au moment de l'épidémie de sida. Elle sera enfin levée le 7 novembre 2011. Seuls les gays britanniques qui n'auront eu aucune relations sexuelles (protégées ou non) avec d'autres hommes pendant an moins 12 mois pourront donner leurs globules rouges.

Les abstinents

La proposition avait été faite par la commission consultative sur les dons du sang, et a finalement été accepté le 8 septembre 2011 par le ministère de la Santé britannique.

Les homosexuels anglais rejoignent ainsi les rangs des personnes contraintes à l'abstinence pour donner leur sang, à savoir : les femmes à partenaires multiples, les clients de prostitués, ou ceux ayant eu des relations avec un toxicomane s'injectant une drogue par intraveineuse.

Groupe à risque

Un grand pas pour les homosexuels d'outre-Manche qui considéraient cette exclusion du don du sang comme une discrimination. Et qui creuse l'écart avec nous, les Français. Car ici, comme presque partout ailleurs en Europe, les homosexuels sont exclus du don du sang, et cela pour toute leur vie. Ils font partie de ce que l'on appelle les "groupes à risques", qui comprennent également les prostitués, les personnes atteintes d'une Maladie Sexuellement Transmissible (MST), les consommateurs de drogue... Motif invoqué ? Des raisons épidémiologiques que l'Etablissement Français du sang (EFS) rappelle dans le chapitre consacré aux contre-indications "la prévalence du taux de séropositivité est proche de 17,7 % parmi les homosexuels masculins, alors que ce pourcentage est de 0,2 % chez les hétérosexuels". Conclusion : "Le risque statistique d'être porteur du VIH est 100 fois plus élevé chez les homosexuels masculins que chez les hétérosexuels".

Depuis 1983, il a toujours été établi que le risque de transmettre le virus aux receveurs, ne peut être pris, même s'il est infinitésimal. L'ex-ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, n'avait pas hésité à le rappeler en 2009 en confirmant l'interdiction faite aux homosexuels de donneur leur sang. Car le problème, c'est ce que l'on appelle la période muette. Ce temps de 10 à 15 jours qui intervient juste après l'infection, et durant lequel nos tests sanguins ne peuvent détecter la présence du virus dans le sang. Même en cas de contamination. "On peut espérer réduire encore cette période muette, ce qui a été fait ces dernières années", explique le Pr. Philippe Bierling, hématologiste à l'Etablissement Français du Sang. "Mais à court terme, on ne peut espérer la supprimer". Résultat : tant qu'il y aura cette période de doute, l'exclusion des homosexuels sera maintenue.

Et pourtant, dans une étude parue dans la revue Transfusion clinique et biologique, Josianne Pillonel de l'Institut de Veille Sanitaire (InVS) ouvre une fenêtre : "Les études les plus récentes s'accordent pour conclure qu'une alternative à l'exclusion permanente pourrait consister à autoriser le don des hommes abstinents au cours des 12 derniers mois".

C'est en se basant sur cette même raison, que les Britanniques ont ouvert le don du sang aux homosexuels abstinents. Mais pour le Pr. Philippe Bierling, de l'EFS, "cette mesure ouvre le don du sang à des donneurs autrefois à la marge, c'est-à-dire cette petite frange de la population qui a eu, occasionnellement dans sa vie, une relation homosexuelle". C'est en effet, ce qui peut arriver à la période adolescente, par exemple. Pour finir, l'hématologiste conclut : "En aucun cas, cette mesure britannique ne remet en cause l'exclusion des homosexuels au don du sang". Permettra-t-elle de rouvrir les discussions ?

 

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