VIH : la maladie dont on ne guérit pas

Environ 180.000 personnes vivent avec le VIH en France et plus de 38 millions dans le monde. Plus de la moitié sont des femmes et 1,7 millions sont des enfants âgés de moins de 15 ans. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

Le Virus de l'Immunodéficience Humaine (VIH)

VIH : 40 ans d'épidémie et ce n'est pas fini...
VIH : 40 ans d'épidémie et ce n'est pas fini...  —  Le Magazine de la Santé - France 5

4.000 personnes sont infectées par le VIH chaque jour dans le monde, d'après Unaids.

Depuis l'identification du virus en 1981, la recherche a fait des progrès considérables. Connaissance du virus, développement de nouveaux médicaments et amélioration des stratégies de prévention... Tout est mis en oeuvre pour endiguer la progression du VIH

Et pour cause, parmi les 180.000 Français concernés par la maladie, on compte 5.013 nouvelles contaminations. 29% de ces nouveaux patients ont reçu ce diagnostic à un stade avancé de la maladie. 5,7 millions de test VIH ont été réalisés.

Le VIH, le virus responsable du sida, fait partie des rétrovirus, ce qui veut dire qu'à l'intérieur, le matériel génétique n'est pas de l'ADN mais de l'ARN (une forme simplifiée comportant un seul brin et non une double hélice comme l'ADN). Ce type de virus renferme aussi des enzymes. Ce sont elles qui vont permettre au virus d'infecter les cellules du corps humain.

Les pratiques où la contamination peut avoir lieu lors de rapport non protégés, ont un niveau de risque différent. Du plus faible au plus élevé, il s'agit du sexe oral avec le risque le plus faible, du fait de pénétrer le vagin, pénétrer l'anus, d'être pénétrée au niveau du vagin puis avec un risque maximal d'être pénétré.e au niveau du rectum, selon Santé publique France.

VIH : quels sont les stades de l'infection ?

Comment se passe concrètement cette infection ? Lors de la primo-infection, le virus entre dans notre corps lors d'un rapport à risque ou de l'utilisation de matériel contaminé. Il cible alors nos cellules de défense. Sa principale cible, ce sont certains lymphocytes T, qui jouent un rôle essentiel dans la réponse immunitaire. Ces cellules présentent à leur surface des récepteurs CD4 que reconnaît le VIH et sur lesquels il va se fixer. Son matériel génétique pénètre alors à l'intérieur de la cellule et s'intègre à l'ADN de la cellule infectée. Le virus va alors se multiplier dans la cellule qui l'abrite. Il détourne les enzymes de la cellule infectée pour produire de nouveaux virus. Une fois libérés dans l'organisme, ces virus vont infecter d'autres lymphocytes et ainsi de suite… Cette phase dite asymptomatique, où il n'y a pas de symptôme hormis des ganglions enflammés éventuellement, peut durer entre 5 à 10 ans sans traitement.

Le nombre des cellules immunitaires CD4 chute , le corps réagit en produisant en nombre élevé d'autres cellules immunitaires, les CD8 et le système de défense s'affaiblit. Le corps devient immuno-déficient : incapable de se défendre contre les infections. L'infection est dite précoce quand les CD4 sont inférieurs à 500/mm3 ; à un stade tardif quand il est inférieur à 350/mm3 et à un stade avancé lorsqu'il est inférieur à 200 (le risque de développer des maladies dites opportunistes et de certains cancers est alors élevé).  Ce stade le plus avancé est celui du sida, le syndrome d'immunodéficience acquise.

Pour lutter contre le VIH, il est recommandé de débuter un traitement dès le diagnostic. On associe plusieurs médicaments dits antirétroviraux. Un premier type de médicament empêche le virus d'entrer dans la cellule en bloquant le récepteur du lymphocyte. Un deuxième médicament empêche que le matériel génétique du virus puisse s'intégrer à celui de la cellule. Un troisième médicament agit sur l'étape d'assemblage des nouveaux virus pour les empêcher d'infecter d'autres cellules. 

Ces trithérapies permettent donc d'attaquer le virus sur plusieurs fronts en même temps. Sa progression dans l'organisme est bloquée. Le virus n'est pas éradiqué pour autant. Le patient reste séropositif mais ne développe pas le sida.

VIH : des tests à faire chez soi

1,7 millions de personnes, dont 4.900 Français, ont appris qu'elles étaient infectées en 2020, un chiffre en baisse. Environ 8,1 millions ne savent pas qu'elles le sont (source : Unaids/Sidaction). La moitié des contaminations ont eu lieu lors de rapports hétérosexuels, 41% lors de rapports entre hommes (source : Santé publique France) ; les personnes transgenres et les consommateurs de drogues injectables sont également des populations souvent touchées. 

Les tests classiques par prise de sang en laboratoire, qui recherchent les anticorps contre le VIH et une protéine, l'antigène P24 produite par le virus, donnent un résultat fiable au bout de 6 semaines. 

Des tests d'orientation rapide, ou TROD, à partir d'une goutte de sang où l'on recherche les anticorps, donne une indication au bout de 5 à 30 minutes. Le résultat positif ou douteux doit toujours être confirmé par une prise de sang. Ils sont réalisés gratuitement dans certaines associations ou les centres de dépistage.

Les autotests de dépistage du VIH sont en vente en pharmacie depuis septembre 2015 ; il s'agit de TROD à faire chez moi. Accessibles sans ordonnance en pharmacie pour un coût de 10 à 25 ou 30 euros, ils permettent de savoir en quinze minutes si on a été infecté par le VIH. L'objectif n'est pas de remplacer les tests réalisés en laboratoire mais de permettre aux personnes qui échappent aux dépistages classiques de savoir où ils en sont avec le sida

A lire aussi : Que faire après un rapport à risque ?

L'autotest doit être fait au moins trois mois après le rapport à risque (et sans autre prise de risque entre temps). Avant ce délai, le résultat peut être un faux négatif. Après l'avoir désinfecté avec la lingette fournie, l'utilisateur pique le bout de son doigt à l'aide d'une aiguille. Il prélève ensuite une goutte de sang, grâce à l'embout du test, qu'il place sur le support, qui détecte et révèle la présence d'anticorps du VIH. Les résultats apparaissent au bout de 15 à 30 minutes : une barre si c'est négatif, deux si c'est positif. En cas de résultat positif, il est important de contacter rapidement son médecin ou la plateforme Sida Info Service au 0 800 840 800, et de faire confirmer le résultat de l'autotest par un test de dépistage en laboratoire.

Même si le prix de l'autotest VIH est un peu élevé, il est le seul à ce jour à avoir reçu un marquage CE. Alors ne cédez pas à la tentation d'acquérir un produit moins cher sur Internet, où sont vendues de nombreuses contrefaçons sans fiabilité garantie.

Séropositivité : le stade du sida

Chez les porteurs du VIH, la quantité de défenses immunitaires chute. Au-dessous d'un certain seuil, le corps devient incapable de se défendre face aux bactéries, aux champignons ou même aux tumeurs. Ces maladies, qualifiées d'opportunistes, touchent les poumons (tuberculose), la peau (Kaposi) ou encore le cerveau (toxoplasmose cérébrale), le système immunitaire avec un lymphome non hodgkinien.

Petit à petit, le malade s'affaiblit. Il ne parvient plus à lutter et les maladies opportunistes conduisent alors au décès (650 000 personnes sont décédés en 2021 dans le monde d'après Unaids). C'est à ce moment-là que l'on parle de sida. Avant, c'est la séropositivité. Le passage au stade de sida peut se faire à n'importe quel moment pour un porteur du VIH.

Quelle est la durée de vie d'un séropositif ?

Quand le sida a été découvert, les malades avaient seulement quelques années devant eux. Aujourd'hui, grâce aux progrès thérapeutiques, l'espérance de vie se rapproche de celle de la population générale.

La trithérapie, le traitement de référence

28,7 millions de personnes ont eu accès au traitement en 2021.

Actuellement, les "AntiRétroViraux" (ARV) empêchent le VIH de se multiplier mais ils ne guérissent pas l'infection. Regroupés en trois grandes familles, les ARV peuvent agir aux différentes étapes de l'infection : au niveau de la fusion du virus avec la membrane du lymphocyte ; au niveau de la transformation des gènes et à celui de l'assemblage du nouveau virus.

Depuis 1997, on associe trois médicaments pour être efficace contre le VIH. C'est ce que l'on appelle la trithérapie. Elle a été un tournant dans le traitement du sida mais il est toujours impossible de détruire le virus et d'en débarrasser l'organisme. Le but du traitement est de réduire la quantité de virus dans le sang, la charge virale en empêchant la réplication du virus et par ce biais, en renforçant les défenses immunitaires.

Donné à une mère séropositive, il permet de diminuer à 1% les risques de transmission. En l'absence de traitement, ces risques se situent entre 15 et 45% (source : INSERM).

En mai 2009, la première trithérapie anti-VIH, en un comprimé quotidien, est arrivé sur le marché français à l'initiative conjointe de deux laboratoires américains concurrents. La prise de ce médicament est possible pour les patients déjà sous traitement, ayant un taux de virus dans le sang indétectable depuis plus de trois mois et n'ayant pas d'antécédent d'échec thérapeutique avec d'autres antirétroviraux. Ce médicament fournit au patient la même quantité de molécules et pourrait répondre aux besoins de près de 30.000 des 120.000 séropositifs français. 

Désormais, plusieurs "traitements en un comprimé quotidien" sont disponibles, comme Atripla®, Eviplera® et de Stribild® qui est composé de 4 molécules.

La recherche sur le VIH-sida

Le Magazine de la Santé

 La recherche avance sur des formes galéniques améliorant le qualité de vie des patients. Au lieu de comprimés à avaler quotidiennement, une injection associant deux médicaments (la rilpivirine et le cabotégravir), est en cours d'évaluation.

Un vaccin thérapeutique baptisé HTI a fait parler de lui en 2021 et se révèle prometteur. la poursuite de l'essai clinique permettra de le confirmer ou de l'infirmer. Il se fonde sur l'observation que chez certains patients, les réponses des lymphocytes T chez certains patients permettent un meilleur contrôle de l'infection. Un autre vaccin à ARN est également en cours de développement  et tache de stimuler la réponse immunitaire, à travers les anticorps bnAb. Deux essais de phase II.b ont montré l'efficacité chez l'homme en décembre 2021.

Autre piste intéressante déjà très avancée puisqu'il est utilisé aux Etats-Unis, au Canada et désormais en France : des médicaments injectables à libération prolongée, qui éviterait la prise quotidienne de traitement anti-rétroviral. Il s'agit d'une injection par mois de cabotégravir et de rilpivirine.

La recherche avance aussi sur la compréhension plus fine des mécanismes du virus dans les cellules, notamment avec les cellules réservoir compétentes, soit les 10% de cellules qui permettent au virus de se répliquer de proliférer (les 90% restant portent un ADN défectueux qui ne le permet).

Traitements du VIH, des effets secondaires handicapants

Les médicaments provoquent fréquemment des effets indésirables, même s'ils ne sont pas systématiques. Les médecins essaient de les maîtriser grâce au choix de plus en plus vaste de médicaments.

Les multithérapies peuvent être à l'origine de fatigue, de maux de tête et de troubles digestifs. Plus grave, des modifications du métabolisme peuvent également survenir, qu'il est possible de juguler grâce une activité physique adaptée.

Aujourd'hui, un patient prend souvent de 2 à 5 comprimés et il y a moins d'effets secondaires que lorsqu'une vingtaine de comprimés quotidiens étaient nécessaires, même s'ils peuvent survenir dans les jours suivant le traitement. Les thérapies à l'aide d'un seul comprimé par jour ont modifié la qualité de vie des patients mais aussi l'observance du traitemen ; elles sont toutefois indiquées dans certains cas seulement (personnes n'ayant jamais été traitées par trithérapie, qui subissent des effets secondaires importants ou encore qui présentent une résistance à leur traitement).

La prévention du VIH : préservatif ou PReP

6.000 à 7.000 personnes découvrent encore leur séropositivité chaque année en France. Et si personne n'est à l'abri d'une contamination, les personnes les plus touchées restent les populations migrantes, en particulier les femmes, ainsi que les jeunes hommes homosexuels.

Le préservatif, la référence

Un seul mot d'ordre : sortez couverts ! Le meilleur moyen d'échapper au sida reste la prévention. Hétérosexuel ou homosexuel, et quel que soit votre âge, n'oubliez pas d'utiliser un préservatif lors de rapports sexuels à risques.

En plus de la version masculine, il existe également un préservatif féminin. Il est doté d'un anneau souple à chaque extrémité et s'introduit dans le vagin pour en tapisser les parois.

La PrEP ou prophalyaxie pré-exposition, le Truvada®

Un traitement à prendre avant une potentielle prise de risques ou de façon quotidienne, le Truvada® a également changé la donne pour les personnes à haut risque de contamination. Destinée à ceux qui refusent le préservatif, elle serait efficace à près de 100% d'après une étude de 2019. Toutefois, il réduit le risque mais ne l'élimine pas totalement et il ne protège pas des autres infections sexuellement transmissibles. Il associe deux molécules anti-rétrovirales, le ténofovir et l'emtricitabine, et peut provoquer des effets secondaires digestifs, à type de nausées, vomissements ou diarrhées. 

Sida : la cohorte Visconti

il existe des cas de guérison qui suscitent l'intérêt des chercheurs. Ces guérisons peuvent faire suite à une greffe de moelle osseuse pour un cancer mais deux autres sont dits spontanées ou naturelles.

Guérisons naturelles et charge virale indétectable, les mystères du VIH


Cela reste encore un mystère pour les chercheurs. Certains patients séropositifs qui ont eu un traitement antirétroviral précoce, c'est-à-dire peu de temps après la contamination, ont toujours une charge virale indétectable malgré l'arrêt de ces traitements et depuis plusieurs années. Des patients, au nombre de 21, regroupés sous le nom de "Cohorte Visconti" font l'objet d'un suivi scientifique. Les chercheurs pensent que dans le monde ces patients représenteraient entre 7 à 15% des séropositifs.

Au début des années 2000, les équipes d'Orléans sont les premières à détecter ces patients. Aujourd'hui on en connaît une vingtaine en France, regroupés dans la cohorte ANRS (Agence nationale de recherche sur le sida) Visconti. Les organismes des patients de la cohorte Visconti contrôlent le virus mais ils restent pourtant porteurs. En cherchant bien dans leurs cellules, on trouve toujours des traces du VIH.

Ces patients représentent un espoir pour la recherche sur le sida. La cohorte Visconti a déjà permis de confirmer l'intérêt d'un traitement très précoce des personnes infectées par le VIH pour préserver leur système immunitaire. L'Agence Régionale de Santé continue l'essai pour déterminer s'il était possible de contrôler l'infection grâce à un traitement administré précocément et de surtout de voir s'ils parviendront à le faire après arrêt des traitements.

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Ailleurs sur le web

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· Organisation mondiale de la Santé
· Inserm
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