Face à la pénurie de médicaments, le Sénat cherche des solutions

Les ruptures de stocks de médicaments prennent de l’ampleur. Elles concernent des traitements essentiels. Le Sénat s’est saisi du problème, qu’il juge inacceptable.

La rédaction d'Allo Docteurs
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La consommation de soins et de biens médicaux a augmenté de 2,3% en 2016.
La consommation de soins et de biens médicaux a augmenté de 2,3% en 2016.

L'an dernier, en France, 530 signalements de médicaments en rupture de stock ont été faits, soit 30 % de plus qu'en 2016, d'après les données de l'Agence nationale du médicament (ANSM). Facteur aggravant à cette situation déjà problématique : les médicaments concernés sont considérés comme "d’intérêt thérapeutique majeur".

Les patients vivent difficilement ces situations. Toutes les classes thérapeutiques sont concernées mais trois d'entre elles sont plus particulièrement exposées : les anti-infectieux, les médicaments du système nerveux, et les anticancéreux. "Parmi les anti-infectieux, la classe particulière des vaccins a également fait l'objet de ruptures de stock et/ou de tensions d'approvisionnement depuis 2015", précise l’ANSM.

Une "situation inacceptable" pour le Sénat

Ce bond de 30% des signalements a fait réagir le Sénat, qui entend prendre le problème à bras le corps. Une mission d'information a été créée pour "établir un état des lieux des ruptures de stocks et risques de ruptures de stocks constatés au cours des dernières années pour les médicaments et les vaccins, et retracer les différentes causes de ce phénomène en inquiétante progression." Le Sénat a aussi annoncé qu’il allait "proposer des mesures permettant de remédier à cette situation inacceptable."

L'Ansm avance déjà quelques explications aux ruptures de stock à répétition. Selon elle, la "capacité de production insuffisante", les "difficultés survenues lors de la fabrication des matières premières ou des produits finis", les "défauts de qualité sur les médicaments", les "décisions prises par l’ANSM de suspendre l’activité d’un établissement, fabricant ou exploitant, à la suite d’inspections qui remettent en cause la qualité des médicaments", sont en cause.

La France peu attractive pour les laboratoires

L’Académie de pharmacie a aussi émis des recommandations sur l’indisponibilité des médicaments indispensables dans un rapport daté du 20 juin. Elle y juge que le problème "nécessite que de nombreux acteurs se coordonnent pour résoudre cette situation, au risque, si rien n’est fait de façon volontariste, de voir se dégrader encore davantage cette situation dans les prochaines années." En France, souligne-t-elle encore, les acteurs concernés sont aussi bien les industriels que les pouvoirs publics et les organismes de régulation dans le domaine de la santé. Le rapport de l’académie pointe du doigt un aspect majeur de cette "crise des stocks" : le marché du médicament français n’est pas des plus intéressants pour les industriels. Le prix de certains anticancéreux ou antibiotiques anciens n'étant pas actualisé dans notre pays, dans un marché compétitif, cela conduit à des marges trop faibles pour que les industriels investissent dans les structures de production, ce qui peut amener parfois à l’arrêt de la commercialisation.

De plus, "le différentiel de prix entre les différents États européens est souvent un handicap pour la France, surtout lorsque les stocks sont faibles à tous les niveaux de la chaîne de production et de distribution et ne permettent pas de couvrir les ruptures majeures pour les pays les moins attractifs", peut-on lire. En clair, si les laboratoires sont peu "justes" en nombre de boîtes , ils préfèrent les vendre au plus offrant. Et ce n’est pas notre pays.

Les auteurs du rapport plaident donc pour "des investissements appropriés, et sur une période significative, pour relocaliser la production et le développement en Europe."

Les tiroirs de nos officines seront-ils plus pleins l’année prochaine ? Un rapport du Sénat est attendu fin septembre.