Reprendre le travail après un cancer

La moitié des personnes atteintes d'un cancer est âgée de moins de 65 ans. Un très grand nombre de malades doivent donc interrompre leur activité salariée le temps de leur traitement. Si la loi française prévoit des aménagements pour favoriser la réinsertion des malades dans leur parcours professionnel, il est important que salariés et employeurs brisent le tabou de la maladie en entreprise.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Reprendre le travail après un cancer

Préparer son retour en entreprise

A l'occasion d'un colloque organisé en 2010 par l'ARC et de l'INCa sur le thème "Cancer et travail", la sociologue Anne-Marie Waser observait un paradoxe : la reprise d'une activité professionnelle est à la fois "potentiellement pathogène" (dans la mesure où le travail puise dans les ressources du malade), et "opérateur de santé" (dans la mesure où il le stimule intellectuellement et physiquement).

"Le retour au travail s'inscrit dans un cheminement, où la santé devient aussi importante que le travail", soulignait-elle. Il faut savoir se préserver, gérer sa fatigue, et accepter - et faire accepter - l'éventuelle nécessité d'aménager son temps de travail.

Pour Anne-Sophie Tuszynski, cofondatrice de cancer@work - association d'aide au maintien à l'emploi des malades et prestataire de services pour les entreprises - "il y a un gros travail à faire, dans l'entreprise, libérer la parole sur le sujet de la maladie. Mais il faut aussi et surtout permettre à la personne de retour en entreprise d'exprimer clairement son ressenti et ses difficultés."

Selon cette spécialiste des ressources humaines, il est très important que se noue un dialogue au cas par cas entre l'employeur et le salarié. Ce dernier doit formaliser au plus tôt ses souhaits professionnels, en composant avec les éventuelles évolutions qu'à pu subir l'entreprise durant son absence.

"Il faut anticiper, le plus en amont possible, le retour au travail", poursuit Mme Tuszynski. "Mais il faut également que l'entreprise soit à l'écoute, et favorise le dialogue avec le salarié, sur ses besoins et ses souhaits."

Selon elle, il faut que les deux parties "prennent conscience que la personne de retour dans l'entreprise peut, certes, avoir perdu certaines compétences, mais également en avoir gagné d'autres." Au sortir de la maladie, "on peut avoir gagné en hauteur de vue ; on sait parfois mieux gérer les priorités, et avoir gagné en confiance, en engagement, en sensibilité... autant de qualités et compétences que le salarié doit valoriser, et dont l'entreprise peut apprendre à tirer profit."

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(1) Toutefois, comme l'observe l'Inserm, ce taux varie en pratique selon les caractéristiques démographiques (sexe, âge) et sociales (statut devant l'activité, niveau d'études) considérées. Près d'un tiers des personnes exerçant une activité d'exécution (salariés sous la direction d'un cadre…) perdent leur emploi dans les deux ans, "alors que les cadres le conservent à plus de 80%".

En moyenne, à poste identique, les personnes touchées par un cancer ont 2,3 fois plus de risque que les personnes non-malades de ne plus occuper leur emploi "à deux ans"(1).

Les aménagements prévus par la loi

A l'issue des périodes d'interruption du contrat de travail consécutives à la maladie, le médecin du travail peut déclarer le salarié inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment. Dans ce cas, comme le rappelle sur son site Internet le ministère du Travail, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, dès lors qu'une tâche existante dans l'entreprise correspond a ses aptitudes.

Le nouveau poste doit être "aussi comparable que possible" à l'emploi précédemment occupé, "au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail".

Après un arrêt total de travail, le salarié peut temporairement bénéficier d'un "mi-temps thérapeutique", c'est à dire d'une reprise de travail à temps partiel pour motif thérapeutique. Ce dispositif, précise le ministère du Travail, a pour vocation de "permettre au salarié de se réadapter progressivement au travail, avant reprise complète". L'employeur rémunère l'employé en fonction des heures travaillées.

Ce temps partiel thérapeutique doit être prescrit par le médecin traitant du salarié (ou le médecin qui a prescrit le premier arrêt de travail) et faire l'objet d'un accord par la caisse d'assurance maladie dont il dépend (pour le versement d'éventuelles indemnités journalières en complément de sa rémunération).

Comme le rappelle sur son site Internet le ministère du Travail, "tout salarié atteint d'une maladie grave bénéficie d'autorisations d'absence pour suivre les traitements médicaux rendus nécessaires par son état de santé. Le résultat d'examens complémentaires demeure couvert par le secret médical."

Cancer et travail : pour en savoir plus