Les oxymètres seraient "mal adaptés" aux peaux foncées

Les oxymètres à pouls, utilisés pour mesurer le taux d'oxygène dans le sang notamment chez les malades du Covid-19, donneraient des "lectures trompeuses" sur les patients à la peau foncée.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le
 Oxymètre (Image d'illustration)
Oxymètre (Image d'illustration)

L'alerte vient du service de santé public britannique (NHS). Elle repose sur une étude de l'Observatoire de la race et de la santé qui a constaté que les oxymètres de pouls "amplifient" parfois "les niveaux d'oxygène dans le sang pour les personnes ayant une couleur de peau plus foncée", conduisant ainsi à une "lecture trompeuse"

Un appareil pour le suivi à domicile 

“Ce sont des appareils qu’on porte le plus souvent au bout du doigt”, explique le Professeur Djillali Annane, chef du service de réanimation de l’hôpital Raymond-Poincaré, à Garches. “Un faisceau lumineux va traverser le doigt au niveau de l’ongle pour pénétrer dans les tissus, et se réfracter dans l’hémoglobine. La réfraction sera différente en fonction de la saturation en oxygène.” 

Lorsqu’ils sont utilisés à l’hôpital, le risque de défaillance lié ces appareils est “minime, car les équipes sont habituées et contrôlent aussi l’oxygénation directement dans le sang”, assure le Professeur. 

Mais les oxymètres de pouls sont aussi souvent utilisés à domicile, pour surveiller une éventuelle dégradation des patients Covid ayant fait un passage en réanimation. Un chiffre trompeur peut retarder la prise d’oxygène, voire l'hospitalisation, alors même que les patients noirs ou issus d'autres minorités ethniques sont touchés de manière disproportionnée par le coronavirus au Royaume-Uni. 

Mieux prendre en compte le facteur ethnique

"Nous devons veiller à avoir des connaissances sur les potentielles limites de certains équipements de santé, en particulier pour les populations présentant un risque accru face à la maladie", a insisté le docteur Habib Naqvi, directeur de l'Observatoire de la race et de la santé. 

Ce dysfonctionnement est particulièrement inquiétant car les personnes issues de minorités ethniques sont surreprésentées dans les professions exposant à des contaminations. Selon plusieurs études, ces populations ont plus de risques de mourir du coronavirus que la moyenne. Cette surmortalité résulte "des injustices structurelles, des inégalités et des discriminations qui ravagent notre société", avait conclu fin octobre un rapport du Parlement britannique. 

Adapter la lecture des résultats

Le NHS recommande que "les patients à la peau foncée qui ont reçu un oxymètre de pouls à continuer à l'utiliser", mais d’adapter leur lecture. Les nouvelles consignes préconisent de prêter davantage attention aux variations relevées plutôt qu'aux chiffres donnés par l'oxymètre, ce qui permet "de voir si les niveaux d'oxygène diminuent, même si l'oxymètre n'est pas totalement précis". 

"Ce sont déjà les recommandations qu’on appliquait en France", assure le Pr Djillali Annane. "C’est un appareil qui mesure en continu, s’arrêter sur un seul chiffre n’a pas de sens ! Il faut se fier à la courbe et surveiller les varitions"

Des dispositifs médicaux

Le Professeur Annane rappelle aussi l’importance de s’écouter : "En aucun cas un patient qui ne se sent pas bien doit être rassuré par le chiffre de l’oxymètre, c’est ce qu’on ressent qui doit primer ! Et il ne doit pas non plus s’affoler inutilement si l’appareil affiche un taux très bas et que lui se sent bien, ça ne sert à rien de saturer le 15 !”. 

Les oxymètres sont avant tout des dispositifs médicaux rappelle-t-il. Pour lui, il n’est pas utile de s’équiper d’un oxymètre sans prescription médicale, et surtout il est important de se référer à son médecin en cas de doute.