Une unité spécialisée dans la prise en charge de personnes pédophiles

Gratuit et confidentiel, le 0806 23 10 63 est un numéro d’appel destiné aux personnes qui ont des pensées pédophiles. À Montpellier, des médecins proposent une prise en charge spécialisée pour éviter les passages à l'acte.

Alexandra James
Rédigé le , mis à jour le
Une unité spécialisée dans la prise en charge de personnes pédophiles  —  Magazine de la Santé

Ce numéro a été lancé il y a deux ans et sur l’année 2021, il a été recensé déjà près de 2 800 appels. À l’hôpital de Montpellier, cette psychologue reçoit des appels à l’aide de la part de personnes pédophiles. La plupart des appelants disent n’être jamais passés à l’acte. 

Pouvoir parler sans être jugé

Ils se sentent rongés par des pensées interdites et espèrent obtenir de l’aide, en appelant ce numéro de manière anonyme.

"On est quand même considéré comme monstrueux lorsqu’on souffre de fantasmes pédophiles ou lorsqu'on a mis en acte ce genre de choses. C’est tellement difficile d’en parler avec le jugement de la société. Se dire qu'on peut être anonyme, permet d’ouvrir une première porte. Rencontrer un professionnel qui est spécialisé là dedans et qui ne va pas juger mais qui va juste être là pour écouter, fait la différence", explique Magali Teillard-Dirat, psychologue, CRIAVS, CHU Montpellier.

La plateforme a été lancée en France il y a deux ans. En 2021, elle recensait près de 2 800 appels. La plupart sont des hommes, de 33 ans en moyenne. Dans 65 % des cas, ils sont orientés vers des soins spécialisés.  

Le Dr Lacambre voit aujourd’hui en consultation Maxime. Il y a dix ans, il a reçu une injonction de soins, suite à des attouchements sur une petite fille. Depuis, il a tenu à garder un suivi médical. 

Consulter le plus tôt possible

"Sur le contenu des fantasmes, si on essaie de préciser le volume, sur 100 % dédié vers des enfants, versus vers des adultes, uniquement fantasmes, vous estimez le ratio à combien ? ", demande le Dr Mathieu Lacambre, psychiatre au CRIAVS du CHU Montpellier.

"C’est une bonne question. Euh…70 % pour les enfants et 30 % pour les adultes", confie Maxime

"Lorsqu’on souffre d’un trouble pédophilique, on essaie de faire évoluer la préférence sexuelle et les fantasmes, les désirs et la sexualité réelle, vers une relation avec une personne en capacité de consentir. Une des difficultés, surtout lorsque les choses sont très fixées et anciennes, c’est de pouvoir faire évoluer le curseur. C’est la raison pour laquelle on essaie d’avoir des consultations le plus tôt possible", explique le médecin.

5 % de la population serait concernée

Il y a dix ans, Maxime n’avait personne vers qui se tourner pour canaliser ses obsessions. Il n’existait aucun numéro d’appel pour les personnes pédophiles. 

"C’est compliqué de gérer seul. Pouvoir parler à quelqu’un sans être jugé. Parce que ce n’est pas tout le monde qui peut parler de ça sans avoir l’aspect négatif qu’on peut avoir par rapport à ces actes. C'est bien et ça fait du bien, explique Maxime. 

"Aujourd'hui il y a des espaces pour accueillir la parole des victimes et c’est tant mieux, il a fallu du temps. En miroir, il faut proposer des espaces pour les personnes qui sont en difficulté, avec des pensées, des conduites pédophiles. Il faut que le professionnel, de manière neutre et bienveillante, puisse accueillir une parole, une souffrance et proposer un soin. L’objectif est de réduire la souffrance, et en la réduisant, de réduire le risque de violence et de passage à l’acte", précise le Dr Mathieu Lacambre.

C'est une prévention primordiale puisqu’en France, 5 % de la population aurait des pensées pédophiles.