Troubles de l'érection : et si le problème se situait dans les veines ?

Les troubles de l'érection, ou dysfonction érectile, touchent un homme sur 20 à 18 ans et 1 sur 4 après 40 ans. Une anomalie des veines du pénis peut être en cause : les fuites veineuses. Explications.

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
Troubles de l'érection : et si le problème se situait dans les veines ?

"Le pénis est comme une baignoire à remplir pour que l'érection se produise, illustre le Pr Eric Allaire, chirurgien vasculaire. Pour remplir la baignoire, il faut que l’eau (le sang) arrive par le robinet (les artères), et qu’elle ne s’écoule pas de la baignoire (les veines bloquées). Si l’eau qui arrive par le robinet s’échappe par le fond (par les veines), la baignoire ne se remplit pas."

Une maladie des vaisseaux

C'est exactement ce qui se passe chez les hommes qui souffrent d'un trouble de l'érection par fuites veineuses, aussi appelées fuites caverno-veineuses. D'après les études, une maladie des vaisseaux sanguins est diagnostiquée chez la moitié des hommes qui n'ont jamais eu d'érection satisfaisante[1] et chez la moitié des hommes pour qui les médicaments de l'érection sont peu ou pas efficaces[2].

" Si la prévalence augmente avec l’âge, les très jeunes hommes ne sont pas épargnés, précise le Pr Allaire. 1 à 4 % des moins de 25 ans souffrent d’un trouble de l'érection invalidant, dont 50 % ont une fuite caverno-veineuse."[3]

Des signes évocateurs

Dans ce cas, les hommes ont alors une érection rigide au départ puis qui s'amollit progressivement. "D'autres signes sont particulièrement évocateurs d'une maladie vasculaire, illustre le Pr Allaire. Les érections sont brèves, parfois moins de quelques minutes."

"Les érections nocturnes et matinales sont faibles, rares ou inexistantes. Les médicaments sont peu efficaces et la pression autour de la base du pénis, avec les doigts ou un anneau, maintient l'érection."

Autres manifestations en faveur d'une fuite veineuse : les changements de position font perdre l'érection, l'érection est incomplète lors de la masturbation et l'éjaculation se produit sur verge molle. Le problème dure depuis plus de 6 mois, parfois depuis l'adolescence et le problème s'aggrave progressivement.

D'après l'International Society of Sexual Medicine, certains facteurs favorisent les fuites veineuses, comme une maladie vasculaire, la radiothérapie pelvienne, le diabète, la maladie de Lapeyronie, un trouble neurologique, l'anxiété.

Diagnostic et traitement

Lors de la consultation, si le chirurgien ou le sexologue suspecte une cause vasculaire, il prescrit une échographie-doppler, évaluant si le sang arrive bien dans le pénis et surtout s'il y a des fuites par les veines.

Au cours de l’examen, le médecin injecte un médicament dans le pénis pour tester l’érection : si elle reste faible ou retombe malgré cette injection, le diagnostic de fuite est confirmé.

Un scanner du pénis, le cavernoscanner, détermine ensuite la localisation précise des fuites. Si les traitements habituels ne fonctionnent pas, le sexologue adresse alors les patients au chirurgien.

Microchirurgie et embolisation

Celui-ci répare les anomalies veineuses à l'aide de différentes techniques : "on neutralise les fuites actives et mais également les veines qui peuvent devenir la source de nouvelles fuites, détaille le Pr Allaire. On utilise deux techniques, l'embolisation des veines pour les obstruer, et la microchirurgie pour ligaturer les veines.

A la fin de l'intervention, un contrôle est effectué et si des fuites résiduelles sont observées, elles sont corrigées d'emblée.

Des résultats encourageants

"Selon la complexité des fuites, l'efficacité est de 50 à 80%, conclut le chirurgien. La reprise de confiance en ses érections nécessite souvent que le patient soit aidé, par des médicaments pour l’érection ou un suivi sexologique ou psychologique.

Ce que confirme une étude récente publiée dans l'European Journal of vascular Endovascular : 74% des hommes chez qui les médicaments étaient inefficaces retrouvaient une sexualité avec pénétration, dont un tiers sans aucun médicament. De quoi donner de l'espoir aux homme concernés.

Sources :


[1] Chew K.K., EARLE C.M., STUCKEY B.G.A., JAMROZIK K., KEOGH E.J. Erectile dysfunction in general medicine practice : prevalence and clinical correlates. Int. J. Impot. Res., 2000. https://www.nature.com/articles/3900457

[2] Tsertsvadze A. et col. Oral phosphodiesterase-5 inhibitors and hormonal

treatments for erectile dysfunction: a systematic review and meta-analysisis.

Ann Int Med 2009;3;151(9:650-61.

[3] Tal R. et col. Vasculogenic erectile dysfunction in teenagers: a 5-year multi-institutional experience. BJU Internationzl. 2008;10:646-50.