Une leucémie infantile guérie par des cellules génétiquement modifiées

Un traitement d'immunothérapie, à base de cellules modifiées génétiquement, a permis la guérison d'un nourrisson atteint d'une leucémie, selon les communiqués d'un institut pédiatrique londonien.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Layla Richards mordillant un stéthoscope.
Layla Richards mordillant un stéthoscope.

Agée de 14 semaines, la Britannique Layla Richards était diagnostiquée porteuse d’une leucémie aiguë lymphoblastique. Dans cette forme de leucémie, les blastes - des globules blancs dont le développement est arrêté, et qui n'ont donc pas de fonction spécifique - se multiplient en très grand nombre. En dépit d’un traitement par chimiothérapie et une greffe de moelle osseuse, le cancer du nourrisson était malheureusement réapparu.

Mais l’arsenal thérapeutique contre les cancers compte, depuis quelques années, de nouvelles armes : les stratégies d’immunothérapie (voir encadré). L’idée est de forcer le système immunitaire à attaquer les tumeurs cancéreuses - qui sont, non pas des corps étrangers, mais des cellules issues de l’organisme.

Les cellules cancéreuses interagissent notamment avec des récepteurs portés à la surface des lymphocytes T (type de globules blancs jouant un rôle central dans l’immunité). Des expériences réalisées il y a plus de 25 ans ont montré que la neutralisation de ces récepteurs permettait aux lymphocytes T de redevenir agressifs à l’égard des tumeurs.

Un protocole thérapeutique récemment développé consiste à prélever chez les malades leurs propres lymphocytes T, et à intervenir sur ces récepteurs, avant de réinjecter les cellules dans l’organisme. Le procédé - très coûteux [1] - requiert toutefois que les patients disposent de lymphocytes en assez grand quantité, et en suffisamment "bon état"… ce qui est rarement le cas chez ceux atteints de leucémie aiguë lymphoblastique, ou chez les patients récemment traités par chimiothérapie.

Nom de code : UCART19

Les médecins de Layla Richards se sont donc tournés vers une stratégie alternative, qui venait de recevoir l’aval des autorités pour un essai clinique : l’injection de lymphocytes T provenant d’un donneur. Celles-ci seraient modifiées génétiquement pour les rendre non seulement indétectables par le système immunitaire, mais aussi exclusivement agressives pour les cellules tumorales, et enfin insensibles aux substances de chimiothérapie présentes dans l’organisme. Nom de code de ces lymphocytes modifiés (produites par l’entreprise française Cellectis) : UCART19.

Un millilitre de cellules UCART19 a été administré au nourrisson par voie intraveineuse, en une dizaine de minutes. Après quoi, la jeune patiente a été isolée plusieurs mois pour la protéger des infections. Après plusieurs semaines, les cellules cancéreuses semblaient avoir été éradiquées.

L’enfant a alors reçu une greffe de moelle osseuse, en vue de renouveler son sang et son système immunitaire. Selon les pédiatres du Great Osmond Street Hospital, la fillette "se remet bien" du traitement, et est retournée chez elle.

L’un de ses médecins, le professeur Waseem Qasim, insiste sur le fait que ce traitement "n’a pour le moment été utilisé que sur une petite fille très vaillante". Ce spécialiste en immunologie ignore aujourd’hui "si cette option thérapeutique sera appropriée pour tous les enfants."

Source : communiqué du Great Osmond Street Hospital

 


[1] En recourant aux lymphocytes du patient, on réduit les risques de rejet. En revanche, aucune production industrielle du traitement n’est possible, ce qui porterait son coût entre 250.000 et 1 million de dollars.

Les cellules cancéreuses ne sont pas des corps étrangers à l'organisme. Quand bien même le système immunitaire détecterait leur comportement anormal, ces cellules expriment des signaux très forts qui interdisent aux différents agents de l'immunité de faire leur office.

L'une des stratégies d'immunothérapie les plus étudiées par les laboratoires consiste à introduire dans l'organisme des molécules qui empêchent, à un niveau ou un autre, la communication entre les cellules malades et ces agents.