Paracétamol : quels bienfaits et quels dangers ?

La mort de Naomi Musenga serait liée à un surdosage en paracétamol. L'occasion de faire un point sur le bon usage et les risques de ce médicament omniprésent dans nos armoires à pharmacie, mais pas si anodin. 

Héloïse Rambert
Rédigé le , mis à jour le
Paracétamol : quels bienfaits et quels dangers ?

Les éléments médicaux connus sont encore peu nombreux, mais des explications sur la mort de Naomi Musenga commencent à être rendus publics.

Le procureur en charge du dossier a souligné auprès de l'AFP avoir pu évoquer avec plusieurs membres de la famille de la jeune femme "les éléments médicaux obtenus, lesquels expliquent le décès de Naomi Musenga comme étant la conséquence d'une intoxication au paracétamol absorbé par automédication sur plusieurs jours". "La destruction évolutive des cellules de son foie a emporté une défaillance de l'ensemble de ses organes conduisant rapidement à son décès", a ajouté le procureur.

Le Doliprane, composé de paracétamol, arrive en tête des médicaments les plus consommés en France. Comment le prendre en toute sécurité ? Le point avec le Pr Bruno Mégarbane, chef de service de réanimation médicale toxicologique à l’hôpital Lariboisière, à Paris.

  • Quelles sont les doses de paracétamol à ne pas dépasser ?

3 à 4 g par jour, à raison de 1 g par prise maximum. Un délai de 6 à 8 heures est à respecter entre chaque prise. A noter que plusieurs médicaments en vente libre dans les pharmacies d’officine contiennent du paracétamol (notamment associés à de la codéine ou à des vasoconstricteurs).

  • Que se passe-t-il dans l’organisme en cas de surconsommation de paracétamol  ?

Si le paracétamol est pris aux doses journalières recommandées, tout se passe bien. "La molécule est métabolisée par le foie et éliminée, explique le Pr Mégarbane. En revanche, s'il est consommé en excès, le médicament suit une autre voie de métabolisation qui aboutit à un intermédiaire toxique. Cet intermédiaire va s’accumuler dans le foie et entraîner la destruction des cellules hépatiques."

 Si rien n’est fait, le foie ne peut plus remplir ses fonctions :

- Il ne parvient plus à filtrer les toxines qui viennent de l’intestin et les laissent parvenir au cerveau, qui s’en trouve perturbé. La personne intoxiquée déclare une encéphalite hépatique.
- Puis, il ne réussit plus à synthétiser les facteurs de la coagulation et expose le patient à un risque d’hémorragie massive.

  • Quels sont les symptômes d’une intoxication au paracétamol ?

Les symptômes apparaissent à distance (quelques jours) de la ou des prises, le temps que le produit de dégradation toxique s’accumule dans le foie. "Les premiers symptômes sont éventuellement des maux de ventres et des nausées, souligne le médecin. Puis, en cas d'encéphalite hépatique, la personne présente des signes neurologiques, une somnolence, une confusion…" 

  • Quels sont les risques si aucun traitement n’est administré ?

Sans prise en charge, la conséquence majeure d’un surdosage au paracétamol est l’hépatite toxique : peu de cellules sont détruites, ce qui est sans répercussion clinique. Mais si plus de cellules du foie sont tuées, il est possible de mourir d’un surdosage en paracétamol : le paracétamol a une toxicité dose-dépendante.

  • Quelles sont les doses dangereuses ?

Elles dépendent des capacités du foie de chacun. "Plus un foie est malade, plus le paracétamol est dangereux", note le Pr Mégarbane. Il n’est pas possible de donner de valeurs-seuil, mais la littérature scientifique fait état de cas d’hépatites et décès (chez des personnes malades du foie) à partir de 8 g/ jour (soit l'équivalent d'une boîte). Mais au-delà de la dose en tant que telle, c'est le mode de prise qui est très important pour le pronostic. "A partir de 15 g de paracétamol/ jour, consommé en une seule prise, on estime le risque de décès, toujours sans prise en charge, à environ 1 %. Mais le fait de prendre à répétition des doses normales peut tout à fait aboutir au même processus, et même de façon plus risqué : si le médicament est pris en doses de 1g, mais 15 fois de suite sur 24 ou 48 h, le risque de mourir bondit à 20%. »

Le foie est plus apte à "encaisser" une forte dose unique de paracétamol, car il fait appel à des mécanismes de détoxication. Ces mécanismes sont mis en difficultés quand les prises sont répétées.

  • Que faire en cas de surdosage ?

Il est nécessaire de prendre un avis médical, même en l’absence de tout symptôme. Les problèmes apparaissent toujours au moins 24 h après le début des prises.

Il existe un antidote au paracétamol. "Les médecins vont évaluer l’atteinte hépatique ou le risque d’hépato-toxicité à venir, grâce à des mesures biologiques, indique le médecin réanimateur. Ils administrent l’antidote ni nécessaire." Si les dégâts sur le foie sont déjà très sévères au moment de la prise en charge, le patient est placé sur une liste de transplantation hyper-urgente.

 

Le paracétamol, un best-seller en pharmacie. Chronique diffusée le 12/07/2018 dans Le Magazine de la Santé.