Grève : pourquoi votre pharmacie est fermée aujourd'hui

C'est la première grande grève des pharmaciens en France depuis 10 ans : un grand nombre d'officines ont baissé le rideau ce jeudi 30 mai pour alerter sur la mise en danger de leur profession. On vous explique.

La rédaction d'Allo Docteurs avec AFP
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Grève : les pharmaciens inquiets pour leur avenir
Grève : les pharmaciens inquiets pour leur avenir  —  Le Mag de la Santé - France 5

"Adieu croix verte, bonjour tristesse", "Pharmacies en danger = santé menacée" ou encore "Où est l'Amox?" (raccourci de l'antibiotique amoxicilline, qui connaît des pénuries récurrentes)... Autant de slogans scandés par des grévistes lors des premières manifestations de pharmaciens ce jeudi 30 mai au matin.

Localisé dans diverses villes de France (Toulouse, Nice, Angers, Limoges), ce mouvement rassemble tous les représentants de la profession : syndicats, groupements de pharmaciens, étudiants. La grève n'est pas habituelle dans ce secteur, la dernière d'ampleur remonte à 10 ans. 

2 000 officines en moins en 10 ans

Mais aujourd’hui, de nombreuses officines ont baissé le rideau pour alerter sur divers dangers concernant leur profession, tels que les pénuries de médicaments, les fermetures de pharmacies ou encore un possible assouplissement de la vente en ligne de médicaments. 

"Après les déserts médicaux, les déserts pharmaceutiques ?" s'interroge l'Union de syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo), alors que la profession estime que la France a perdu près de 2 000 officines en 10 ans. Actuellement, le territoire compte 20 000 officines.

"L'inquiétude principale, c'est la disparition des pharmacies"
, fragilisées économiquement à la campagne et parfois en ville, indique à l'AFP Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). 

Une première depuis 2014

Le point d'orgue de la mobilisation se tient à Paris, où un cortège est parti de la faculté de pharmacie pour rejoindre le ministère de l'Économie. Jérôme Koenig, directeur général de l'Uspo, souligne "une volonté de marquer le coup, comme en 2014", date de la précédente grande mobilisation des apothicaires.

Des pharmacies ont été réquisitionnées par décision préfectorale pour assurer la permanence pharmaceutique obligatoire. La plupart des officines ont prévenu leur clientèle par mail, écrans ou affiches collées dans les vitrines.

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Une revalorisation de la rémunération

Les syndicats réclament une revalorisation de la rémunération dès 2025, faisant valoir l'inflation qui pèse sur les charges. Les dernières propositions de l'Assurance maladie, dans le cadre des négociations conventionnelles entamées fin 2023, sont en effet jugées "insuffisantes". Les représentants des pharmaciens seront convoqués le 5 juin pour une "réunion conclusive" avec l'Assurance maladie, selon Philippe Besset.

Outre l'aspect financier, les pharmaciens veulent mettre l'accent sur les pénuries de médicaments, la fragilisation économique des officines rurales et la réforme du troisième cycle des études de pharmacie qui tarde à aboutir. 

Les pharmaciens inquiets de la vente en ligne

Comme en 2014, les représentants de cette profession s'inquiètent aussi d'une possible volonté de simplifier la vente en ligne de médicaments sans ordonnance. Plusieurs syndicats de pharmaciens refusent catégoriquement "les stocks déportés" à un endroit autre que l'officine. Ils craignent notamment de voir Amazon débarquer un jour sur ce terrain.

"Il faut raison garder", a déclaré de son côté à l'AFP le député Renaissance Marc Ferracci. Il y a bien "une réflexion pour savoir s'il est pertinent ou non d'assouplir" les règles de vente en ligne des médicaments sans ordonnance, confirme-t-il, mais sans "remettre en question le principe du monopole" des officines. "Il ne s'agit pas d'ouvrir quoi que ce soit à la grande distribution ni de mettre des médicaments sur Amazon. Cela n'a aucun sens", assure M. Ferracci, qui veut mettre fin aux "spéculations" qui ont animé la presse spécialisée ces dernières semaines.