Grève des médecins généralistes : "On est complètement sous l'eau"

Depuis plusieurs semaines, les médecins généralistes se mobilisent pour dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail. Reportage dans l'un des pires déserts médicaux, l'Eure-et-Loir, où de nombreux professionnels sont en souffrance.

Lucile Degoud
Rédigé le
Les médecins généralistes sont à bout
Les médecins généralistes sont à bout  —  Le Mag de la Santé - France 5

Deux fois par semaine, la Dre Sylvie Boutfol, médecin généraliste à Épernon, parcourt les routes d’Eure-et-Loir pour les visites à domicile."Nous faisons des visites uniquement des personnes âgées à domicile pour qui c’est compliqué de se déplacer. Je pense que c’est encore notre rôle", explique-t-elle.

Enchaîner les consultations

Aujourd'hui, dans ce département, les médecins généralistes manquent. Rares sont ceux qui se déplacent encore chez les patients, comme Sylvie et son interne.

"Ça me demande plus de temps. Si elle vient au cabinet, ça me demandera un quart d’heure. À domicile, il faut compter une heure et effectivement, on ne peut pas en voir 10 dans la matinée", commente la Dre Sylvie Boutfol.

Depuis 33 ans, Sylvie Boutfol exerce à Epernon, petite ville de 5 000 habitants, à 65 km de Paris. De retour au cabinet, elle enchaîne les consultations. 

Lever le pied pour ne pas tomber

Dans ce désert médical, pour avoir rendez-vous avec la Dre Boutfol, si ce n’est pas une urgence, il faut s’armer de patience. "Je planifie, je prends deux mois à l’avance. C'est parfois très compliqué, surtout quand il faut un arrêt de travail, ou quand on a un enfant très malade. On aimerait que ce soit plus facile", témoigne Nathalie Clément, une patiente.

Malgré la demande, Sylvie Boutfol, épuisée, a décidé de lever le pied. Elle voit 25 patients par jour en moyenne, quand d’autres en reçoivent plus de 40. 

"On donne beaucoup au patient, mais il faut quand même qu’on pense à nous parce qu'on n’est pas superwoman et on peut tomber dans un burn-out facilement", confie la Dre Boutfol.

"C'est impossible de prendre soin des gens"

Une fois les consultations terminées, cette médecin passe encore 1h30 à gérer des tâches administratives. C'est une charge de travail conséquente au détriment du soin des patients. Une évolution du métier dont Sylvie et ses confrères généralistes.

"On arrivait à répondre à toutes les demandes et maintenant, on ne peut plus, parce qu’on est complètement sous l’eau" confie-t-elle. "Quand vous avez deux mois de délai pour un rendez-vous, c’est impossible de prendre soin des gens", témoigne une de ses consoeurs. "Ce n'est pas possible de travailler comme ça", s'effondre-t-elle.

S’il le faut, ces médecins généralistes sont prêts à mener une grève dure pour défendre ce métier qu’ils aiment tant.