La psychiatrie, grande cause du prochain quinquennat ?

Dans une tribune publiée dans Le Monde, Antoine Pelissolo et Boris Vallaud lancent un appel à réformer profondément la prise en charge de la santé mentale en France.

Alicia Mihami
Rédigé le , mis à jour le
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Image d'illustration.  —  Crédits Photo : © Chanintorn.v / Shutterstock

C’est loin d’être le premier appel de ce genre. Dans une tribune publiée lundi 6 septembre dans Le Monde, Antoine Pelissolo, psychiatre et chef de service au CHU Henri-Mondor de Créteil et Boris Vallaud, député des Landes, appellent à “repenser et refinancer” le système de soins en psychiatrie. 

Un chantier urgent dans un secteur sous très haute tension depuis des années. Et la pandémie n’a fait qu’accentuer l’urgence : “Il y a une accumulation des souffrances”, explique Antoine Pelissolo. 

La crise a amené une accentuation des besoins de consultations et d’hospitalisation, notamment pour des phénomènes de décompensation, d’état dépressifs ou suicidaires” détaille le psychiatre. 

Deux à trois fois plus de tentatives de suicide

Avant le début de la crise sanitaire  on estimait qu’une personne sur deux avait déjà souffert de troubles psychiques au cours de sa vie selon l’OCDE. Des chiffres qui ont probablement augmenté depuis. 

Une étude parue dans The Lancet Psychiatry affirme qu’une personne sur trois qui a surmonté le Covid-19 a reçu un diagnostic de troubles neurologiques ou psychiatriques dans les six mois suivant l'infection. 

Le Dr Pelissolo a pu constater l’aggravation de la situation. Dans ses services, et surtout chez ses collègues qui travaillent en pédopsychiatrie, on constate deux à trois fois plus de tentatives de suicides qu’avant le début de la pandémie. 

La santé mentale au programme de la présidentielle

Il était donc essentiel pour le Dr Pelissolo et Boris Vallaud de remettre le sujet sur la table à l’approche de des élections présidentielles. 

Les deux hommes, membres du Parti Socialiste, souhaitent que la psychiatrie et la santé mentale soient nommées “grande cause du prochain quinquennat". 

Une loi globale pour une réforme globale

Leur tribune appelle à repenser en profondeur un système “qui reste insatisfaisant pour les patients comme pour les professionnels”, déplore Antoine Pelissolo. 

“Si les vocations sont toujours là, on a du mal à garder les gens, à leur faire prendre de l'expérience. Le turn over dégrade la qualité du soin”. 

Grâce à une loi-cadre, ils veulent investir massivement, décloisonner la prise en charge, créer de nouveaux hébergements spécialisés pour compenser les fermetures de lits d’hôpitaux, impliquer le patient et ses proches, garantir un accès à tout l’éventail de soins à ceux qui en ont besoin. 

Mettre fin aux stigmates


Mais le plus grand chantier reste celui des mentalités, que ce soit dans la société civile ou bien à l’hôpital. Car même dans les structures de soin, la santé mentale est encore bien souvent considérée comme “la cinquième roue du carosse”. 

Le défi est donc à la fois dans la réforme, mais aussi dans le regard porté sur la santé mentale. Dans les deux cas, des changements profonds sont nécessaires.