Le Pr Daraï, gynécologue soupçonné de viol, "mis en retrait de ses responsabilités"

Après le lancement d’une enquête interne, le Pr Emile Daraï est placé "en retrait de ses responsabilités de chef de service et de responsable pédagogique". Une mesure insuffisante selon les lanceuses d'alerte.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Le Pr Daraï, gynécologue soupçonné de viol, "mis en retrait de ses responsabilités"
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Le Pr Emile Daraï, spécialiste de l'endométriose, chef de service de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction à l'hôpital Tenon à Paris, a été mis en "retrait de ses responsabilités de chef de service et de responsable pédagogique", ont annoncé le 8 octobre l'AP-HP et Sorbonne Université.

Les deux institutions avaient décidé le 20 septembre de lancer une enquête interne. Le médecin est également visé par une enquête judiciaire pour "viol par personne ayant autorité sur mineur de plus de 15 ans" depuis le 28 septembre. Il a été accusé par plusieurs ex-patientes de pratiquer des examens vaginaux et rectaux de manière brutale et sans demander le consentement.

"Pour que cette enquête [interne, ndlr] puisse se dérouler dans la plus grande sérénité, l'AP-HP et Sorbonne Université ont acté avec le Pr Émile Darai son retrait de ses responsabilités de chef de service et de responsable pédagogique", indiquent-elles dans un communiqué.

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"Ce ne sont pas ces fonctions-là qu’il faut lui enlever"

En apprenant la nouvelle, Marie-Rose Galès, à l’origine de signalements à l’Ordre des Médecins, a cru que le Pr Emile Daraï n’exercerait plus la médecine. Mais elle a vite déchanté. "S’il consulte et qu’il continue de pratiquer la gynécologie de la même façon, c’est problématique. Au moins s’il n’enseigne plus, il n’enseigne plus les mauvaises pratiques", concède-t-elle, amère.

Sophie est une ancienne patiente du Pr Daraï. Elle accuse ce dernier de pratiques d'examens violentes. Elle s'était confiée à AlloDocteurs.fr dans ce témoignage. "Si on veut protéger les victimes, ce ne sont pas ces fonctions-là qu’il faut lui enlever, s'exclame-t-elle. C’est très insuffisant. Ce n’est pas par des cours ni un statut de chef de service qu’il nuit. C’est par des violences, des mots, et il peut continuer à le faire. J'attends de plus grandes sanctions."

"Peu d’espoir quant à l’enquête interne"

"La situation du Pr Émile Daraï sera réexaminée au vu des conclusions de l'enquête interne. La date précise de rendu de l'enquête, prévue avant la fin octobre 2021, dépendra du nombre d'auditions à programmer, avec le cas échéant un rapport intermédiaire si la mission l'estime possible", explique le communiqué de l’AP-HP.

"L’AP-HP et l’Ordre des Médecins ne prennent pas la mesure de la situation, regrette Marie-Rose Galès. Je reste pessimiste quant à l’issue de l’enquête interne. Je ne comprends pas comment ils peuvent lire tous ces témoignages et ne pas se dire qu’il y a un problème. A ce niveau, c’est du déni."

"J’ai peu d’espoir quant aux conséquences de l’enquête interne", renchérit Sophie*. Mais l'enquête judiciaire menée parallèlement pourrait changer la donne. Le Pr Emile Daraï est visé par au moins deux plaintes, selon une source judiciaire de l'AFP. Selon Sophie*, une dizaine d’autres patientes réfléchissent à ajouter leurs propres plaintes au dossier.

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Une situation loin d’être isolée

Selon un rapport du Haut conseil à l'égalité de juin 2018, les actes violents subis par les femmes durant leur suivi gynécologique et obstétrical ne sont "pas des faits isolés" en France. Le document concluait qu'une "prise de conscience" des pouvoirs publics est nécessaire.

Face à ces accusations, le Pr Daraï "conteste fermement les accusations portées contre lui", indique son avocat Me Jakubowicz dans un communiqué. Le médecin "ignore tout des faits dont on l'accable", ajoute ce même communiqué.

*Le prénom a été modifié