Hôpital : des milliers de soignants crient leur colère dans la rue

Plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées en France le 16 juin pour réclamer davantage de moyens pour l'hôpital public et le système de santé. En fin de cortège, des échauffourées ont terni les manifestations.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Image d'illustration.
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"Finis les applaudissements, place aux rassemblements." Après trois mois de crise sanitaire due au coronavirus, médecins, aides-soignants et infirmiers ont battu le pavé par dizaines de milliers mardi 16 juin en France pour rappeler le gouvernement à ses promesses sur l'hôpital.

Les premières manifestations autorisées dans le pays depuis l'entrée en vigueur du confinement ont rassemblé selon la police 18.000 personnes à Paris, 7.500 personnes à Toulouse, 6.000 à Lyon, 5.500 à Nantes, au moins 4.000 à Bordeaux ou Strasbourg, 3.800 à Grenoble ou encore 3.500 à Marseille.

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Revalorisation des salaires et reconnaissance

Après plus d'un an de grève aux urgences, puis dans l'ensemble des services hospitaliers, les revendications n'ont pas changé après la crise du coronavirus qui a épuisé les services de santé : "On attend une revalorisation des salaires et la reconnaissance des qualifications. On attend l'ouverture de lits, l'embauche de personnels", a rappelé le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, présent au début du rassemblement parisien. "Et puis ne pas considérer que l'argent qu'on met à l'hôpital c'est une dette. Au contraire, c'est un investissement" a-t-il ajouté.

Autant de sujets posés sur la table du "Ségur de la santé", vaste concertation qui doit concrétiser d'ici début juillet le "plan massif d'investissement et de revalorisation" promis par Emmanuel Macron. Pour le secrétaire général de Force ouvrière Yves Veyrier, "il faut absolument que les réponses soient à la hauteur des attentes" et concernent "l'ensemble des personnels", y compris les non soignants.

Sur ce sujet, le ministre de la Santé Olivier Véran s'est voulu rassurant la veille de la journée de mobilisation : "On travaille, on avance", a-t-il déclaré, en indiquant que "plus de cent consultations au niveau national" avaient été effectuées depuis le début du "Ségur". Concernant les hausses de salaire promises, "le rendez-vous est fixé" avec les soignants, a-t-il rappelé. "D'ici à début juillet, ils auront toutes les réponses aux questions qu'ils posent et aux revendications qu'ils portent légitimement".

"On ne veut pas de médaille ou de petite prime à la sauvette"

Mais les premiers gages de la "reconnaissance" promise par l'exécutif sont pourtant loin d'avoir convaincu les intéressés : "On ne veut pas de médaille ou de petite prime à la sauvette, on veut un salaire à la hauteur de ce que nos métiers apportent à la société", affirme Clara Grémont, aide-soignante près de Montpellier.

"On attend beaucoup du Ségur de la santé, on attend d'être enfin entendus", témoigne Ludivine Crocq, infirmière aux urgences du CHU de Rennes et membre du collectif inter-hôpitaux. "Cela fait plus d'un an qu'on demande des moyens financiers, matériels, et des lits pour arrêter d'avoir des patients qui passent plus de 24 heures sur des brancards". Leur revendication ? Une hausse de "300 euros nets mensuels", répond la soignante qui touche 1.780 euros par mois "après 12 ans aux urgences".

"L'hôpital est sclérosé", estime de son côté Julie Bruneau, médecin à l'hôpital Necker, qui demande qu'on "redonne le pouvoir de décision aux médecins". Selon elle, "il n'y a pas forcément besoin d'injecter beaucoup d'argent dans le système (de santé). Il faut surtout le réorganiser pour éliminer les strates administratives".

Échauffourées et interpellations en fin de cortège

A Paris, des échauffourées ont éclaté en fin de parcours. Les forces de l'ordre ont répliqué à des jets de projectiles par des tirs de gaz lacrymogènes contre des manifestants violents, parmi lesquels des "antifas" et des blackblocs.

Une infirmière, soutenue par des collègues, s'en est prise, en larmes, à ces manifestants :  "Vous avez mis notre manif en l'air, vous êtes des cons !". "On nous a volé cette manifestation par la force", a déploré Patrick Pelloux, président de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf).
D'autres soignants ont critiqué la police, accusée d'avoir fait un usage disproportionné de la force. L'interpellation filmée d'une infirmière a notamment suscité la polémique sur les réseaux sociaux. Cette femme a été interpellée en marge de la manifestation des soignants à Paris pour "outrage et jet de projectiles sur les forces de l'ordre". À la fin de la manifestation, la préfecture de police de Paris a fait état de 32 interpellations liées aux échauffourées.