E-bola, un film face à la tragédie

Faire de l’épidémie du virus Ebola une fiction grand public, c'est le pari lancé par le producteur italien Massimo Tortorella. « E-bola » propose une fiction réaliste, à la frontière entre science et cinéma, pour éviter que ce drame sanitaire ne bascule progressivement dans l’oubli. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Les acteurs Paolo Bernardini et Silvia Mazzotta sur le tournage du film "e-bola"
Les acteurs Paolo Bernardini et Silvia Mazzotta sur le tournage du film "e-bola"

Près d’un an jour pour jour après l’apparition du virus Ebola en Afrique de l’Ouest, commencait le tournage d’un film d’un nouveau genre. Loin des forêts guinéennes, E-bola a été tourné dans des studios professionnels, totalement en anglais. Si le film, réalisé par Christian Marazziti, se présente comme une fiction, il s’inspire pourtant d’un drame bien réel, celui de la pandémie d’Ebola. Le réalisateur met en scène six amis, tous chercheurs, venus des quatre coins de la planète. Ensemble, ils travaillent à l’élaboration d’un vaccin contre ce virus, lorsque l’un d’entre eux est contaminé par Ebola en Sierra Leone… Pendant 1h22, le spectateur assiste alors à la lutte du groupe pour sa survie, entremélée de leur engagement et de leur foi profonde en la recherche médicale.

Le film, tourné en un mois, a reçu l’aide de la communauté scientifique italienne. "Des experts ont contribué à l’écriture et à la modification du scénario avec le réalisateur, pour que la fiction soit au plus proche de la réalité scientifique", nous explique Massimo Tortorella, producteur et instigateur du projet, lors de l’avant première du film à Rome, dans l’enceinte du ministère de la Santé Italien. Le ministère, ainsi que l’université Sapienza de Rome, sont partenaire du projet. "Notre but est de former et d’informer sur le virus Ebola", souligne le producteur.

Isolement et tension

Si le film pêche par une trame narrative trop classique, il a tout de même le mérite de remplir pleinement son objectif de sensibilisation du spectateur. Alors qu’en Europe la tragédie Ebola peut paraître bien lointaine, elle prend toute sa puissance face à l’écran. La sensation d’isolement à laquelle sont confrontés les malades est palpable tout le long du film. Tout comme la douleur des corps face à la progression du virus.

E-bola met pleinement la lumière sur les problèmes qui ont contribué à l’expansion rapide de l’épidémie, comme la méconnaissance de la maladie. Dans les prémices de la crise, les cas d’Ebola étaient souvent confondus avec le paludisme ou la fièvre typhoïde, freinant ainsi la prise en charge. Confrontée aux images de véritables combinaisons ou de chambres de confinement, la réalité de la mise en scène est saissisante.

Une formation universelle pour les soignants

Derrière ce film grand public se cache un projet bien plus ambitieux : celui de former le personnel soignant à cette maladie. "Nous avons pensé qu’il fallait établir une formation internationale pour les médecins, car celle-ci a fait défaut pendant la crise d’Ebola. L’information était imparfaite et les protocles médicaux étaient différents selon les pays", précise Massimo Tortorella. Pour cela, le film s’accompagne de pastilles de formation à destination des médecins sur différents thèmes, comme les symptômes de la maladie. L’objectif est ainsi d’uniformiser les connaissance sur Ebola. A distance et pour tous. "C’est un projet totalement gratuit", souligne le producteur, qui dirige la société de conseil pour les médecins Consulcesi Group.

Savoir lutter contre Ebola, c’est aussi se préparer à de futures pandémies "comme le SRAS ou la grippe aviaire. Ebola n’est que la face émergée de l’iceberg", ajoute Massimo Tortorella. "Il faut apprendre des leçons d’Ebola", précise le ministre des Affaires étrangères italien, Mario Baldi, également présent à l’avant première du film. Selon lui, si le personnel avait été mieux formé à la maladie, l’alerte aurait été donnée plus vite. "Ce fut une menace existentielle pour les trois pays de l’Afrique de l’Ouest (Guinée, Siera Leone et Liberia ndlr). Sur place on craignait l’écroulement des populations", ajoute le ministre, précisant que plus de 11.000 personnes étaient déjà décédées dans la région.

E-bola rend aussi hommage à tous les soignants mobilisés, "qui se rendent disponibles au prix de leur vie", indique Massimo Tortorella. Fort d’un succès qu’il espère, le producteur prévoit d’étendre ses "fictions-formations" à d’autres thèmes de santé comme le cancer ou la vaccination. Il nous indique alors que le projet devrait être présenté dans le cadre de plusieurs festival mondiaux, sans pour autant nous préciser lesquels.

A voir : « e-bola », réalisé par Christian Marazziti, est disponible gratuitement en streaming, sous-titré en Français

L'initiative est accueillie avec enthousiasme et satisfaction par les pays d'Afrique touchés, et en particulier la Guinée. "Nous sommes nécessiteux de ces formations et sensibilisations" nous explique Abdoulaye Traoré, conseiller de l'ambassade guinéenne en Italie. "Avant de savoir qu'il s'agissait d'Ebola, les infirmières ne portaient même pas de gants. Il est important que toutes les régions isolées connaissent les mesures de prévention, pour que ce drame ne se répète plus" ajoute t-il.