Des terrasses sans musique, une solution anti covid ?

Les terrasses rouvriront en France à partir du 19 mai. Mais le risque de contamination au covid n’y est pas nul, même s’il est bien plus faible qu’en intérieur. Alors comment limiter les transmissions en extérieur ?

La rédaction d'Allo Docteurs
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Image d'illustration.  —  Crédits Photo : © Shutterstock / Elena Pominova

Boire à nouveau des verres en terrasses, c’est l’activité que pourront retrouver les Français à partir du 19 mai. En Grèce, c'est déjà le cas depuis le 3 mai, mais avec une mesure originale : la musique y est interdite.

Cette idée peut faire sourire à première vue, mais elle se justifie scientifiquement. La musique oblige en effet les gens à parler plus fort, ce qui augmente l'émission de postillons et d'aérosols, principaux canaux de transmission du coronavirus.
Car même s'il est infiniment plus faible qu'en intérieur, le risque de contamination au covid-19 à l'extérieur, en terrasse n’est pas nul.

Transmission par aérosol

"Le message essentiel reste de marteler qu'elles sont beaucoup moins à risque que les espaces intérieurs mal ventilés", reconnaît auprès de l'AFP l'épidémiologiste Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale à l'université de Genève.

Et pour cause : près d'un an et demi après le début de la pandémie, les spécialistes s'accordent à dire que le covid se transmet en grande partie via les aérosols. Des nuages de gouttelettes "produits par la respiration, la parole, les cris et le chant de personnes infectées" et qui contiennent donc le coronavirus SARS-CoV-2, rappelle le Pr Flahault.

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Risque 18 à 20 fois moindre à l’extérieur

"Dans un espace mal ventilé, ce nuage peut planer plusieurs minutes, voire plusieurs heures avant de se dissiper. Mais en terrasse, il se dissipe rapidement dans l'atmosphère", affirme le Pr Flahault, en faisant l'analogie avec la fumée de cigarette. On estime donc que le risque est "18 à 20 fois moindre" à l'extérieur qu'à l'intérieur, poursuit-il.

"Il n’y a, a priori, pas de risque de transmission massive" en extérieur, contrairement aux milieux clos, expliquait déjà à Allodocteurs.fr Pascal Crépey, enseignant-chercheur en épidémiologie et biostatistiques à l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP) de Rennes.

Distance physique

Mais attention : le risque n’est pas nul pour autant car les personnes "restent à proximité, sans porter de masque parce qu’elles mangent ou boivent ensemble" prévenait encore Pascal Crépey.

Dans ces conditions, les aérosols peuvent rester un danger si on est proche d'une personne infectée : de près, on peut toujours les inhaler avant qu'ils soient dispersés dans l'air.

"Cône de dispersion"

Première règle à suivre, donc : la distance physique entre chaque personne. Une étude en pré-publication, mise en ligne le 30 avril par des chercheurs français du Laboratoire de Physique de l’Ecole Normale Supérieure (LPENS) de Paris, pointe d’ailleurs "un risque de transmission par aérosols à courte portée" à l'extérieur.

La zone à risque prend alors la forme d’un "cône de dispersion des aérosols", dont la pointe est la bouche de la personne infectée. Ce risque dépend selon eux de l'orientation du vent et diminue au fur et à mesure qu'on s'éloigne de la personne infectée.

Attention aussi aux postillons

Le Pr Flahault, lui, mentionne un autre "risque théorique", celui de la "voie de contamination directe", ou "voie balistique". Autrement dit : les postillons qui émanent d’une personne quand elle parle, tousse ou éternue "directement sur les yeux, narines ou bouche de la personne située en face d'elle, à faible distance, sans masque ni lunettes", développe-t-il, en la jugeant cependant "plus anecdotique que fréquente".

C’est aussi pour cette raison qu’il est préférable, pour Pascal Crépey, de s’installer "côte-à-côte plutôt que face à face", de ne pas partager de plat… Et encore moins le bol de cacahuètes dans lequel chacun avait l’habitude de piocher à l’heure de l’apéritif.

Des ventilateurs sur les tables ?

Pour limiter tous ces risques, les réouvertures des terrasses se font sous conditions, avec par exemple un maximum de six personnes par table. Autres solutions, soufflées par les chercheurs du LPENS : de grands ventilateurs orientés vers le haut pour chasser les aérosols, ou des petits dispositifs sur chaque table qui aspireraient puis filtreraient l'air expiré.