Mediator : le procès reprend devant le tribunal correctionnel de Nanterre

Après un an d'interruption pour des raisons de procédure, le premier procès en pénal du Mediator reprend mardi 21 mai 2013, devant le tribunal correctionnel de Nanterre.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

Cela fait un an que les quelque 600 parties civiles attendaient la reprise du procès pour "tromperie aggravée" dans l'affaire du Mediator. L'accusation reproche aux fondateurs des laboratoires Servier, Jacques Servier, ainsi que quatre cadres du groupe d'avoir délibérément trompé sur la composition du Mediator, cet antidiabétique largement prescrit comme coupe-faim entre 1976 et 2009.

"Les victimes attendent deux choses de ce procès", indique l'avocat Charles Joseph-Oudin, qui représente une centaine de parties civiles :

  1. "comprendre comment ce produit toxique a pu être prescrit pendant des années sans que les patients soient informés de sa dangerosité, alors même que le Mediator avait déjà été retiré du marché en Suisse (1997), en Espagne et en Italie (2005)".       
                                                                        
  2. "que les laboratoires Servier admettent une fois pour toute leur responsabilité dans ce scandale sanitaire, pour que les parties civiles puissent enfin être reconnues comme victimes".

Le 14 mai 2012, à l'ouverture du procès, la défense avait déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), contestant la tenue même d'un procès à Nanterre alors que les laboratoires Servier sont déjà mis en examen pour des faits similaires à Paris. Un recours rejeté par la Cour de cassation.

Trois procédures distinctes

Il existe en effet trois procédures distinctes au pénal. La première a été ouverte au parquet de Paris pour "tromperie, escroquerie, prise d'illégale d'intérêt" ou encore "trafic d'influence". Les investigations sont en cours et pourraient s'achever courant de l'été 2013. A cela s'ajoute une information judiciaire pour "homicides et blessures involontaires" contre les laboratoires Servier et l'Agence du médicament (ANSM). L'enquête risque d'être beaucoup plus longue. 

Les victimes présumées, elles, ont choisi une autre procédure pour tenter d'aboutir à un jugement plus rapidement : la citation directe pour "tromperie aggravée", qui permet de juger une affaire sans passer par l'instruction judiciaire. Mais dans ce cas, ce sont aux parties civiles de fournir les preuves de leurs affirmations devant le tribunal.

Pour Charles Joseph-Oudin, les preuves existent : "Le Mediator métabolise la norfenfluramine, une molécule qui provoque des hypertensions artérielles pulmonaires et multiplie par trois les risques de valvulopathies. On connaissait la toxicité de la norfenfluramine dès 1997 lors du retrait du marché de l'Isoméride, cousin du Mediator".  

Des questions de forme

Les parties civiles redoutent que le procès soit encore retardé par la défense pour des questions de forme comme lors de l'ouverture du procès. "À ce jour, les laboratoires Servier n'ont aucune défense crédible. Ils se trouvent dans une situation de fond assez embarrassante", affirme Charles Joseph-Oudin. "Ils continuent à contester des points de procédure pour que le procès n'ait pas lieu".

À côté du fondateur des laboratoires, Jacques Servier, Alain Le Ridant, directeur général délégué et pharmacien en chef du groupe ainsi que trois responsables successifs de Biopharma (l'une des filiales des laboratoires qui distribuait le Mediator) comparaissent devant le tribunal correctionnel de Nanterre. Ils risquent au maximum quatre ans de prison et 75 000 euros d'amende.

D'après différentes études, le Mediator a déjà provoqué plusieurs centaines de décès en France, même si leur nombre exact reste difficile à évaluer. Selon un rapport d'experts judiciaires rendu public en avril dernier, ce médicament, commercialisé entre 1976 et 2009, pourrait avoir causé en France entre 1.300 et 1.800 morts par valvulopathie. 

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