Hormone de croissance : un nouveau procès au civil

Trois décennies après les faits, les proches des victimes de l'hormone de croissance pourront demander des dommages et intérêts aux deux dernières personnes poursuivies dans ce dossier, à la suite d'une décision de la Cour de cassation ce 7 janvier 2014.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Hormone de croissance : un nouveau procès au civil

En mai 2011, la cour d'appel avait relaxé le professeur Fernand Dray (91 ans), qui dirigeait le laboratoire Uria, rattaché à l'Institut Pasteur et chargé d'élaborer la poudre d'hypophyse (la glande qui produit l'hormone de croissance), et Elisabeth Mugnier (64 ans) qui assurait, elle, la collecte des organes sur des cadavres.

Le 7 janvier 2014, la Cour de cassation a cassé ce jugement (1), et renvoyé devant la cour d'appel de Paris les deux justiciables.

Après 22 années de procédure, les 21 parties civiles encore impliquées vont devoir patienter encore plusieurs mois avant de pouvoir définitivement tourner la page.

La procédure comptait initialement 118 parties civiles, mais beaucoup ont renoncé à poursuivre leur combat devant la plus haute juridiction française.

A noter que la cassation ne concerne que les intérêts civils, et non le volet pénal de l’affaire (qui a, lui, définitivement été jugé).

Une grande détermination

"Cela ne nous rendra pas nos enfants, mais c'est une victoire", a déclaré à la presse Michèle Jolivet, mère d'Emmanuel, traité en 1985 à l'hormone de croissance et décédé en 2000 à l'âge de 29 ans. Elle a rendu hommage à la "ténacité" de son conseil, Me Fau, et estimé qu'il s'agissait également d'une victoire pour la juge Marie-Odile Bertella-Geffroy, en charge de l'instruction longue de plus de treize années.

"On repartira pour [ce] procès en appel avec une grande détermination", a assuré Mme Jolivet. Son époux, Alain, a souhaité que ce nouveau procès se tienne dans un délai raisonnable, soulignant l'âge avancé de M. Dray (91 ans).

Il a également rappelé que deux prévenus étaient décédés avant le procès en appel, notamment le professeur Jean-Claude Job, personnage central de l'affaire et ancien président de l'association France Hypophyse.

Contacté par l'AFP, l'avocat de M. Dray, maître Henri Leclerc, n'était pas immédiatement disponible pour commenter la décision.

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(1) Pour casser l'arrêt de la cour d'appel, la Cour de cassation a considéré que l'extraction et la purification de l'hormone de croissance d'origine humaine "entraient dans la préparation" d'un produit pouvant être administré à l'homme. Dès lors, ces opérations "relevaient […] du monopole pharmaceutique" et n'auraient donc dû être pratiquées que par un établissement pharmaceutique, ce que n'était pas le laboratoire Uria. A l'audience devant la chambre criminelle de la Cour de cassation, le 28 novembre, la défense s'était appuyée sur l'article 511 du code de la santé publique et avait fait valoir que seul un produit administrable en l'état pouvait être considéré comme un médicament. Ce n'était pas le cas de la poudre élaborée par le laboratoire Uria. Le conditionnement sous forme d'ampoules au contenu injectable était réalisé, à partir de cette poudre, par la Pharmacie centrale des hôpitaux.

 

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Entre 1983 et 1985, 1.698 enfants en insuffisance hormonale ont été traités par injection à partir de prélèvements sur des cadavres humains. Plusieurs de ces cadavres étaient infectés par la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ), qui a été transmise à plusieurs dizaines d'enfants, dont 120 sont morts au terme de longues souffrances.