Mediator : le tribunal correctionnel attend Servier et l’ANSM

Après six années de bataille judiciaire, la perspective d'un grand procès se rapproche dans le scandale sanitaire du Mediator.  

La rédaction d'Allo Docteurs
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Les juges d'instruction ont renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris les laboratoires Servier et l'Agence du médicament dans le volet principal de l’affaire, a-t-on appris ce 5 septembre de source judiciaire, confirmant une information de France Inter. Conformément aux réquisitions du parquet de Paris, les juges d'instruction ont ordonné le 30 août le renvoi en correctionnelle du groupe pharmaceutique Servier pour "tromperie aggravée, escroquerie, blessures et homicides involontaires et trafic d'influence", a indiqué la source judiciaire contactée par l’Agence France Presse.

L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) est également renvoyée devant le tribunal pour "blessures et homicides involontaires". Au total, le parquet avait demandé un procès pour onze personnes morales et quatorze personnes physiques dans son réquisitoire du 24 mai.

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600 pages de réquisitoire

"Dans cette affaire du Mediator, même si Servier indemnise les victimes, les personnes malades et les proches de personnes décédées sont dans l'attente d'un procès pénal de manière à identifier les responsabilités, que ce soit du côté des laboratoires, des agences étatiques comme l'Agence du médicament (ANSM) ou des différents experts qui composaient les commissions de contrôle du médicament", a réagi Charles Joseph-Oudin, l'un des avocats de parties civiles. 

Les laboratoires Servier ont dénoncé dans un communiqué une instruction "tronquée". "L’action de l’Agence du médicament, de ses hauts fonctionnaires et de sa tutelle ministérielle a été occultée, alors que le Mediator était sous enquête nationale de pharmacovigilance de 1995 jusqu’en 2009", ont déclaré les laboratoires.

Prescrit pendant plus de 30 ans à cinq millions de personnes en France, le Mediator, un antidiabétique largement détourné comme coupe-faim, a été retiré du marché en novembre 2009. Dans son réquisitoire de près de 600 pages, le parquet estimait que les laboratoires avaient mis en place une "stratégie" pour dissimuler son caractère anorexigène et n'avaient pas signalé les risques d'hypertension artérielle pulmonaire, une pathologie rare incurable, et ceux de graves lésions des valves cardiaques (valvulopathies) qui lui étaient imputables.

Le parquet, en se basant sur la dernière expertise judiciaire, avait chiffré entre 1.520 et 2.100 le nombre de décès à long terme causés par le Mediator.

avec AFP