Dénoncer le harcèlement scolaire
Ce jeudi 3 novembre a lieu en France la seconde Journée nationale "Non au harcèlement" dans les établissements scolaires. Dans l'indifférence de l'équipe éducative et cachant tout à sa famille, Mathilde Monnet a subi insultes, brimades et humiliations quotidiennes au collège. Elle raconte son calvaire dans un livre intitulé "14 ans, harcelée" (Ed. Mazarine-Fayard).
- Comment le harcèlement a-t-il commencé ?
Mathilde Monnet : "Le harcèlement a commencé par une insulte à cause de mes dents. Au début il n'y avait qu'une personne qui m'insultait, puis il y a eu trois personnes et enfin toute la classe."
- Quelle a été votre réaction ?
Mathilde Monnet : "Au début j'étais sidérée. Je ne comprenais pas pourquoi on m'insultait. Rapidement, on m'a frappée, garçons et filles, des gifles puis des coups de poing, des coups de pied... Parfois, on m'enfonçait des compas dans la colonne vertébrale."
- Pourquoi n'avez-vous pas dit la vérité à vos parents ?
Mathilde Monnet : "Quand j'avais des bleus, je disais à mes parents qu'en montant à cheval, je m'étais cognée contre un arbre. Je ne voulais pas leur dire la vérité car j'avais honte, je me sentais coupable. Pour moi, c'était de ma faute. Je me sentais coupable de ne pas réussir à me défendre et ensuite, je me suis sentie coupable de m'être défendue car on me disait que je provoquais."
- Vos camarades vous ont-ils poussée au suicide ?
Mathilde Monnet : "J'ai eu envie de me suicider car je n'en pouvais plus d'être insultée, frappée et la seule solution que j'avais trouvée, c'était de me tuer. Mais les vacances arrivaient et pendant deux mois, je n'allais plus subir d'insultes ni de coups. J'avais tellement pris l'habitude de vivre avec des coups et des insultes que pour moi, les vacances étaient devenues un rêve. Je ne pouvais pas me tuer avant qu'elles n'arrivent.
"Les autres enfants me disaient de me pendre, de me jeter dans le vide. Il y avait énormément d'insultes et de paroles blessantes."
- Qu'est-ce qui vous a encouragée un jour à parler de ce harcèlement à vos proches ?
Mathilde Monnet : "Un jour, j'ai vu un enfant qui se faisait agresser dans la rue. Et c'est comme si je m'étais vue en train d'être frappée. J'ai alors eu comme un choc, un déclic. Quand j'ai vu cet enfant, je me suis dit que je n'étais pas coupable. Je me suis rendue compte que ce n'était pas à moi d'avoir honte mais à mes agresseurs. Et personne ne méritait d'être frappé quoi qu'il ait fait."
- Comment ont réagi vos parents ?
Mathilde Monnet : "Mes parents m'ont dit que ce n'était pas de ma faute. On est allé porter plainte immédiatement. La police m'a écoutée et m'a bien aidée à survivre. Ils m'ont déculpabilisée. Au collège, j'ai eu du soutien des professeurs. Mais cela n'a pas été le cas de l'infirmière et de l'assistante sociale."
- Comment vous sentez-vous aujourd'hui ?
Mathilde Monnet : "J'ai suivi une thérapie EMDR qui m'a aidée à me reconstruire. Aujourd'hui, même si je côtoie encore certains de mes anciens camarades au lycée, le harcèlement s'est arrêté."
"J'ai envie de faire passer un message aux victimes : quoi qu'on ait pu faire, personne ne mérite d'être frappé, il n'y a aucune justification à ces actes et il ne faut pas culpabiliser."
Livre :
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14 ans, harcelée
Mathilde Monnet
Ed. Fayard/Mazarine, octobre 2016