Pourquoi les médecins ne sont pas toujours contraints de respecter les directives anticipées

Le Conseil constitutionnel confirme que les médecins ne sont pas obligés de suivre les directives anticipées s'ils estiment qu'elles ne sont pas conformes à la situation médicale du patient. Explications.

Mathieu Pourvendier avec AFP
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La loi vise ainsi à "assurer la sauvegarde de la dignité des personnes en fin de vie", estime le Conseil constitutionnel, sans aller jusqu'à directement évoquer la notion d'acharnement thérapeutique
La loi vise ainsi à "assurer la sauvegarde de la dignité des personnes en fin de vie", estime le Conseil constitutionnel, sans aller jusqu'à directement évoquer la notion d'acharnement thérapeutique  —  shutterstock

Fin de vie, mort accompagnée et suicide assisté sont des sujets continuellement en débat en France. Jeudi 10 novembre, le Conseil constitutionnel a rendu une décision à ce sujet. Il estime qu'un médecin n'est pas forcément contraint de respecter les "directives anticipées" par lesquelles un patient exprime sa volonté ou non d'être maintenu en vie.

Passer outre en cas de directives "inappropriées"

La loi, qui prévoit que le médecin puisse passer outre ces directives si elles sont "inappropriées" à la situation du patient, est conforme à la "sauvegarde de la dignité de la personne" comme à sa "liberté personnelle", estime le Conseil dans sa décision.     

Cette décision intervient au moment où les débats sur la fin de vie reviennent dans le champ public. Le président Emmanuel Macron envisage en effet un changement de législation, mais en renvoie la responsabilité à une convention citoyenne qui doit se réunir à partir de décembre.

Ici, le Conseil constitutionnel avait été saisi par la famille d'un patient, plongé dans le coma depuis mai après un accident et dont les médecins jugent la situation désespérée.  

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Que contiennent les directives anticipées ?

L'équipe médicale souhaite arrêter les soins - nutrition et respiration artificielles -, mais cette décision va contre les intentions manifestées par le patient dans ses directives anticipées.      

Celles-ci, qui consistent en un document préalablement écrit et signé par le patient, sont censées témoigner de sa volonté au cas où il ne serait plus en mesure d'exprimer un choix. La personne doit évoquer ses craintes, ses angoisses, ses souhaits, si elle veut rester en vie et de quelle manière. De plus, elle confie sur papier quels traitements elle veut mettre en place et au contraire qu’elle aimerait contourner.   

La lettre doit être rédigée sur un papier indiquant les nom prénom, lieu et date de naissance. La personne doit être majeure. Ces directives, qui ne possèdent pas de date d'expiration, peuvent être écrites tout au long de la vie et modifiées ou supprimées à n’importe quel moment. Cette feuille peut être confiée à un médecin, à un soignant ou encore à un proche de confiance. 

Sauvegarder la "dignité des personnes en fin de vie"

Mais la loi prévoit que l'équipe médicale, après une procédure collégiale, puisse passer outre si les directives apparaissent "non conformes à la situation médicale" du patient. C'est sur la validité de cette loi que devait trancher le Conseil. Celui-ci a estimé que le législateur avait été dans son rôle en prévoyant une telle porte de sortie aux médecins, notamment car le patient ne peut être totalement en mesure d'apprécier sa situation de manière anticipée.  

La loi vise ainsi à "assurer la sauvegarde de la dignité des personnes en fin de vie", estime le Conseil constitutionnel, sans aller jusqu'à directement évoquer la notion d'acharnement thérapeutique.     

Il juge par ailleurs que la loi est suffisamment claire en évoquant le cas de directives "manifestement inappropriées" à la situation médicale du patient, alors que les défenseurs de la famille estimaient ces termes trop flous. Enfin, le Conseil estime que "ces dispositions ne sont ni imprécises ni ambiguës".

Directive anticipée mode d'emploi
Directive anticipée mode d'emploi  —  Le Mag de la Santé - France 5