Déserts médicaux : dans la Sarthe, de nouvelles équipes d'urgences

C'est un dispositif unique en France. Dans la Sarthe, où le SMUR met parfois 40 minutes à se rendre sur place, un infirmier et un aide-soignant interviennent en amont pour prodiguer les premiers soins. Reportage.

Camille Leclercq
Rédigé le , mis à jour le
Déserts médicaux : de nouvelles équipes d'urgences
Déserts médicaux : de nouvelles équipes d'urgence  —  Le Magazine de la Santé - France 5



Lors d’un arrêt cardiaque, chaque minute perdue représente 10% de chance de survie en moins pour la victime.

21h, une équipe d’urgence quitte l’hôpital de Château-du-Loir dans le sud-ouest de la Sarthe. Elle vient d’être appelée par la régulation du SAMU. Elle prend la direction de la Flèche, 40 kilomètres plus loin.  

"La dame a 86 ans, elle a inhalé des fumées, elle a des douleurs thoraciques, une gêne respiratoire et les pompiers sont sur les lieux", explique Aurélien Poupard, infirmier, équipe paramédicale d’urgence de Château-du-Loir.

Un binôme formé aux urgences vitales

La particularité du binôme, est qu'aucun d’eux n’est médecin. Joris est aide-soignant ambulancier. Aurélien, infirmier.   

"Je suis l’infirmier du SAMU… On va vérifier avec mon collègue que tout va bien pour vous"
, confie Aurélien Poupard.

L’équipe est rompue à ce type de prise en charge. Ils travaillent depuis plusieurs années dans des services d’urgence. Parti de plus loin, le médecin du SMUR est en chemin.

En attendant, le binôme interroge la victime, prend ses constantes et lui administre de l’oxygène.  

"Elle est très bien votre tension… Tension de jeune fille. On a évalué la situation, on a pris les paramètres vitaux de la dame qui sont tout à fait rassurants. Ce sont ces éléments là que je vais donner à mon collègue médecin du SAMU, que je vais appeler dans la minute", précise Aurélien Poupard.

Une prise en charge plus précoce

Le protocole est strict, leurs actes sont limités… Au bout du fil, un médecin régulateur supervise l’équipe à distance. À son arrivée, la médecin du SMUR prend le relais. 

"Ils sont arrivés avant nous, d'au moins 10 minutes, ce qui nous permet nous, d’arriver et d’être disponibles plus rapidement. Ça m’a pris peu de temps pour faire le tour de la victime puisqu’Aurélien avait déjà bien fait tout le travail", confie Griselda Razafimanantsoa, médecin urgentiste, SAMU 72.  

La victime est stabilisée, elle sera transportée à l’hôpital. L’équipe paramédicale d’urgence est de nouveau prête à partir en intervention. Ce dispositif, expérimenté depuis près d’un an par le SAMU de la Sarthe, est unique en France. 

Dans ce département où il manque 40 médecins urgentistes, toute la population a désormais accès aux soins d’urgence.

"Là vous avez la Sarthe, avec le Mans qui est au milieu du cercle et on a deux équipes SMUR ici, une équipe à Mamers, une équipe au Bailleul donc tout ce bassin de population était largement à plus de 30 minutes. Parfois, on faisait des interventions à 55 minutes de toute prise en charge spécialisée, d’où le projet de mettre en place une première antenne d’EPMU à Château-du-Loir", confie le Dr Joël Pannetier, chef de service adjoint au SAMU 72.

Un modèle expérimental amené à se développer

Cette équipe est positionnée à Château-du-Loir et arrive sur chaque intervention en moyenne 22 minutes avant le médecin du SMUR. Ce sont des minutes plus que précieuses en cas d’urgence vitale.   

“22 minutes, dans les arrêts cardio-respiratoires, c’est typiquement les perfuser, commencer l’adrénaline pour faire essayer d’avoir une vraie plus-value pour le patients. L’autre exemple est sur une hémorragie où pareil, ils peuvent commencer le remplissage vasculaire pour éviter que le patient se dégrade de manière importante", explique le Dr Lise Mabit, médecin régulateur au SAMU 72.   

À Château-du-Loir, l’équipe paramédicale d’urgence est intervenue près de 300 fois depuis mai 2021. Un deuxième dispositif vient tout juste d’être déployé à Saint-Calais, dans l’est du département.