Plusieurs syndicats de médecins opposés à la généralisation du tiers payant

Plusieurs syndicats de médecins ont rappelé le 17 février 2014 leur réserve, voire leur opposition, au projet du gouvernement de généraliser le tiers payant lors des consultations, notamment "en raison de sa complexité". Une concertation sur le sujet a été lancée le 18 février par le gouvernement. Pour détailler ses positions, le Dr Michel Chassang, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) était aujourd'hui l'invité du Magazine de la santé.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le
Entretien en vidéo avec Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération syndicale des médecins de France
Entretien en vidéo avec Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération syndicale des médecins de France

Le gouvernement souhaite que les Français "dans leur ensemble" n'aient plus à avancer d'argent lors d'une consultation médicale d'ici à 2017. Ce devrait déjà être le cas avant la fin de l'année pour les patients modestes, bénéficiant de l'aide pour une complémentaire santé (ACS), soit environ un million de personnes.

Marisol Touraine a lancé le 18 février 2014 son comité d'orientation pour le tiers payant généralisé, réunissant syndicats de médecins, Sécurité sociale et complémentaires santé. L'Inspection générale des affaires sociales (Igas), dans un récent rapport, avait jugé la réforme "techniquement possible" et "justifiée sur le fond".

Selon un communiqué du ministère de la Santé, les premières décisions devraient être annoncées "dès le printemps" pour permettre une mise en place effective rapide du tiers payant pour les bénéficiaires de l'assurance complémentaire santé (ACS).

Mais pour la CSMF, principal syndicat de médecins, le projet est "techniquement impraticable". La CSMF est favorable au "tiers payant social" pour les patients les plus modestes, mais refuse son extension à l'ensemble des Français,"une usine à gaz qui se fera aux dépens des médecins".

En mettant en place un système complexe, à payeurs multiples (assurance maladie et complémentaires), le gouvernement va "laisser les médecins libéraux se débrouiller avec plus de 400 régimes complémentaires ayant chacun leurs propres règles de fonctionnement", a déploré Michel Chassang, le président de la CSMF.

Quelle alternative ?

Une "alternative libérale" est possible, a rappelé la CSMF dans un communiqué, qui propose un système de coopération avec les banques, où les patients ne seraient débités du prix de la consultation qu'après avoir été remboursés par la Sécu.

De son côté, le syndicat des médecins généralistes MG France a assuré que ceux-ci "ne disposent ni du temps nécessaire à vérifier les droits, ni du personnel pour pointer les tiers payants". "Le coût de transaction" ne doit pas être répercuté sur le médecin, a insisté le syndicat dans un communiqué. Il réclame un dispositif simplifié et des paiements garantis, "en un seul flux".

La Fédération des médecins de France (FMF) a formulé dans un communiqué plusieurs conditions préalables à toute discussion, notamment l'identification d'un "guichet payeur unique" ou la mise en place de remboursements en huit jours avec pénalités en cas de non respect des délais.

Plusieurs obstacles techniques

La généralisation du tiers payant suppose il est vrai de répondre à des questions techniques : comment récupérer l'euro de franchise dû par le patient pour toute consultation s'il ne sort pas son porte-monnaie ? Quel mécanisme permettra au médecin d'être payé dans un délai raisonnable alors que des centaines de complémentaires opèrent sur le marché ?

En réponse aux interrogations des syndicats, le ministère de la Santé a souligné que "le système mis en place devra être simple et sécurisé, tant pour les médecins que pour les patients", "les risques de trésorerie ou de charge administrative supplémentaire doivent être totalement maîtrisés et écartés, en particulier pour les médecins".

"La protection de l'accès aux soins des patients les plus vulnérables doit être le fil rouge des décisions qui seront prises", précise encore le ministère.

 

VOIR AUSSI :

ERRATUM : Contrairement à ce qui a été évoqué dans l’émission (voir ci-dessus), le tiers-payant n'est pas appliqué en Alsace. Il est vrai que, depuis 1995, les caisses d'assurance maladie du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ont un fonctionnement qui leur est propre. Ces caisses imposent à leurs assurés une complémentaire santé financée par les salariés et les retraités. Moyennant une cotisation (qui s'ajoute à celle versée, comme ailleurs, au régime général) ce régime local permet de bénéficier d'un taux de remboursement de 90 % pour les honoraires médicaux (contre 70 % au régime général) ou encore d'une prise en charge du forfait journalier hospitalier (non pris en charge ailleurs).