Le corps, ses bonnes et ses mauvaises odeurs...

On raconte que les hommes préhistoriques utilisaient les odeurs pour distinguer leurs amis de leurs ennemis... Aujourd'hui, tout a changé. Les odeurs corporelles sont considérées comme incommodantes, et on fait tout pour s'en débarrasser : hygiène, déodorants, et même traitements médicaux.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Le corps, ses bonnes et ses mauvaises odeurs...

D'où proviennent les odeurs corporelles ?

Marina Carrère d'Encausse et Michel Cymes expliquent les odeurs corporelles.
Marina Carrère d'Encausse et Michel Cymes expliquent les odeurs corporelles.

Odeurs de transpiration, de pieds, odeurs tenaces sur les mains, mauvaise haleine... Nous dégageons tous des odeurs corporelles. Chacun a sa propre odeur et certaines personnes sont plus sensibles aux odeurs que d'autres. Certains sont même bromophobes, c'est-à-dire obsédés par l'odeur corporelle.

C'est par la peau que notre corps libère une odeur particulière à chaque individu. La peau est une enveloppe corporelle, qui est parsemée de petits pores. Les pores sont des ouvertures microscopiques reliées à des glandes et à des follicules pileux. Certaines glandes produisent du sébum, les glandes sébacées et d'autres produisent de la sueur.

On compte environ trois millions de glandes sudoripares sur l'ensemble du corps. Elles contribuent au système qui régule notre température interne. Elles participent à l'élimination de la chaleur produite par le corps. L'eau qu'elles évacuent permet de rafraîchir la peau et d'éliminer par la même occasion plusieurs molécules. Parmi elles, des composés volatils et odorants. On peut y déceler des molécules soufrées et acides ainsi que des molécules provenant de notre alimentation comme l'oignon, l'ail et le curry.

Mais la cause principale à l'odeur corporelle forte est la présence de bactéries. Ces bactéries vivent à la surface de la peau. Elles sont plus nombreuses au niveau des plis et des zones riches en poils comme les aisselles ou les organes génitaux. Elles se nourrissent des peaux mortes et des molécules sécrétées par la peau sébum, sueur et différentes molécules chimiques. En digérant, elles produisent des gaz responsables d'odeurs plus ou moins fortes selon les personnes. Il arrive aussi que des maladies génétiques soient responsables d'odeurs corporelles anormalement fortes.

Déodorants : comment sont-ils fabriqués ?

L'usine de fabrication de déodorants de Rosporden (Bretagne) produit chaque année 20 millions de déodorants.
L'usine de fabrication de déodorants de Rosporden (Bretagne) produit chaque année 20 millions de déodorants.

Les déodorants et les anti-transpirants ont une action différente sur la sueur. Les déodorants servent uniquement à masquer l'odeur. Ils ne perturbent pas l'émission de la sueur, mais ils contiennent des agents antiseptiques qui éliminent les bactéries à l'origine des odeurs corporelles ainsi que des parfums. Les anti-transpirants, eux, bloquent les pores pour empêcher la libération de sueur.

Le « fish odor syndrom » ou le syndrome de l'odeur du poisson pourri

Le fish odor syndrom ou le syndrome de l'odeur du poisson pourri ne touche que quelques dizaines de personnes en France.
Le fish odor syndrom ou le syndrome de l'odeur du poisson pourri ne touche que quelques dizaines de personnes en France.

La mauvaise odeur n'est pas toujours liée à un manque d'hygiène. Le "fish odor syndrom" ou le syndrome de l'odeur du poisson pourri est une maladie génétique qui touche moins de 1% de la population et qui se manifeste uniquement par une odeur très désagréable du corps. Cette pathologie est due à une mauvaise réaction chimique se déroulant à l'intérieur de l'organisme, à savoir l'oxydation de la triméthylamine. 

La triméthylamine est un composé malodorant généré par la dégradation de certains aliments comme les poissons, les oeufs…


Il est encore difficile d'évaluer précisément l'étendue de ce syndrome. Les recherches génétiques ont bien identifié la mutation du gène, mais il existe des variantes importantes sur la manière d'exprimer la maladie. En France, il n'existe qu'un seul laboratoire pour établir le diagnostic de cette maladie.

Pour savoir s'il s'agit bien du fish odor syndrom, il faut établir le diagnostic. Première étape : l'analyse d'urine. Objectif : rechercher la présence d'une substance, la triméthylamine. Lorsque nous mangeons, les aliments sont digérés dans l'estomac puis l'intestin. Lors de cette transformation, les aliments libèrent notamment la triméthylamine. Cette substance malodorante est normalement transformée au niveau du foie par une enzyme pour qu'elle perde son odeur. C'est le déficit de cette enzyme qui est responsable du fish odor syndrom. La triméthylamine est alors éliminée par les sécrétions comme la sueur, la salive et l'urine.

"Lorsque nous avons mis en évidence des taux trop importants de triméthylamine dans les urines du patient, encore faut-il en déterminer l'origine. L'origine la plus fréquente étant l'origine génétique. On demande donc au patient des tubes de sang et on en fait l'extraction d'ADN à l'aide d'une machine", explique le Pr Franck Broly, chef du service de toxicologie et génopathies au CHU de Lille. C'est la deuxième étape du diagnostic. Objectif : rechercher la mutation d'un gène.

Dans plus de 90% des cas, cette mutation du gène est responsable du fish odor syndrom. Mais dans certains cas, la maladie est liée à la prise de médicaments ou à un changement hormonal. Une fois le diagnostic posé, un régime alimentaire est proposé au patient. Il s'agit d'éliminer certains aliments comme le poisson, les fruits de mer, les oeufs, le lait, le chou ou encore les abats.

Le Pr Franck Broly présente les autres solutions en cas de fish odor syndrom : "On peut proposer de se laver avec un savon acide pour éliminer la triméthylamine qui serait sur la peau. Certains proposent des chewing-gums à la chlorophylle avec du cuivre qui permettent de séquestrer la triméthylamine au niveau intestinal. On peut proposer de temps en temps une antibiothérapie qui va permettre de dégrader les bactéries intestinales et donc d'empêcher ces bactéries de produire la triméthylamine".

Le diagnostic permet aussi aux patients de sortir de l'isolement, après souvent des années d'errance médicale. Sur les 200 analyses que le laboratoire réalise chaque année, 10% environ révèlent un fish odor syndrom.

Quelques conseils pratiques

La séduction passe par les odeurs, et non par les parfums. Voici donc quelques conseils pour "ne pas sentir" :

- Les déodorants permettent uniquement de masquer l'odeur. L'antisudorifique qui contient généralement du chlorure d'aluminium ou de zirconium (substances pouvant causer de l'irritation chez certaines personnes), réduit les sécrétions des glandes exocrines.

- Les poudres absorbantes pour les pieds sont utiles en cas de transpiration.

- Pour les champignons, pensez aux médicaments antifongiques sous forme de crèmes, de poudres ou en aérosol

- Avec les savons antibactériens, il est conseillé de ne pas se laver compulsivement trois ou quatre fois par jour. Cela peut entraîner des problèmes d'irritation.

- L'application de parfum directement sur la peau est déconseillée car cela pourrait être irritant ou provoquer des allergies de contact.

- Se raser. Les poils sont favorables au développement des bactéries, les hommes comme les femmes ont donc intérêt à se raser les aisselles.

- Changer souvent de chaussettes pour ralentir le développement des bactéries. Le port de chaussettes en coton est préférable car elles absorbent mieux l'humidité. Le changement de chaussures (une à deux fois par jour) peut également être envisagé.

- Ne pas sombrer dans la "bromophobie", c'est-à-dire à l'obsession de l'odeur corporelle. Certaines personnes sont persuadées, à tort, qu'elles répandent des odeurs désagréables.

En savoir plus : vos questions, nos réponses sur les odeurs corporelles

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