"Hippocrate aux enfers", voir ou revoir le documentaire de Michel Cymes

"Hippocrate aux enfers", documentaire de Michel Cymes et Claire Feinstein, réalisé par Jean-Pierre Devillers, était diffusé ce mardi 30 janvier sur France 2. Michel Cymes répond à la critique de Télérama.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

VOIR OU REVOIR LE DOCUMENTAIRE SUR France.tv

De 1933 à 1945, dans les camps de concentration, des médecins ont commis les pires atrocités sur des déportés, au nom de la « recherche scientifique ». C’est cette facette de la barbarie nazie que Michel Cymes, en association avec Claire Feinstein, a décidé d’explorer.

"C’est une quête personnelle. Mes deux grands-pères sont morts à Auschwitz. Lors d’un voyage, je me suis retrouvé devant un ancien bloc où avaient eu lieu ces expérimentations. Je me suis dit qu’il fallait faire un documentaire pour apprendre au public cette partie de l’histoire très mal connue", explique le présentateur du Magazine de la Santé à Allodocteurs.fr.

Plus de 70% des médecins allemands de l'époque ont répondu à l'appel du régime nazi

Michel Cymes y retrace le parcours de plusieurs de ces "docteurs", mandatés par les officiels nazis pour valider leur idéologie de hiérarchisation des "races". Comme il l’indique dans le documentaire, plus de 70% des médecins allemands de l’époque ont répondu à l’appel du régime et ont adhéré au parti nazi. "Ce travail a une visée pédagogique. Je veux expliquer ce qui s’est passé, le dire et le redire. Comme le disait Henri Borlant, un déporté : « Il faut, il faudra sans cesse rappeler que cela fut »"

Dans Hippocrate aux enfers, Michel Cymes essaie de comprendre comment ces médecins, qui ont prêté le serment d’Hippocrate, ont pu commettre de telles atrocités. "J’ai pris conscience du pouvoir incroyable du médecin sur le patient. On pense qu’un médecin ne peut par définition pas faire de mal, puisqu’on l’a formé à faire le bien", affirme le médecin. "Ma grande fierté, c’est qu’on en parle", confie-t-il.

La réponse de Michel Cymes à la critique de Télérama

Quand Télérama trouve qu’on en parle trop…

Faut-il répondre à un article critique ou ne rien dire pour ne pas attirer sur lui l’attention qu’il n’a sans doute pas eue ?

Cette question, tous les écrivains, artistes, animateurs, se la posent un jour quand un papier éreinte leur travail ou leur personne. Les personnes les plus avisées vous recommandent alors de ne pas réagir. Cette fois, je ne vais pas écouter ces conseils. Je vais répondre à Emilie Gavoille et à Télérama.

Dans un papier sur Hippocrate aux Enfers publié le 24 janvier dernier, le documentaire consacré aux expériences médicales dans les camps de concentration, adapté de mon livre, et diffusé mardi 30 janvier sur France 2, Emilie Gavoille écrit « ces quatre-vingt minutes consacrées à évoquer pour la énième fois les parcours criminels des plus tristement célèbres séides en blouses blanches de Hitler… », avant d’affirmer que ce documentaire ne ferait avancer ni « la connaissance historique », ni «sa compréhension par le grand public ». Vous pouvez ne pas avoir aimé ce documentaire Madame, ni sa réalisation, ni sa musique pourtant interprétée par l’un des plus grands violonistes au monde. Vous pouvez penser qu’il ne vous apprend rien, le critiquer. Je n’ai rien à redire à cela... mais il y a des mots qui passent mal. Enième fois ? Ainsi on parlerait trop de ce qui s’est passé dans le bloc 10 à Auschwitz ? On parlerait trop de ces enfants martyrisés par Mengele ? On évoquerait trop souvent Clauberg et ses injections dans le corps des femmes pour les stériliser ? Mais au nom de quoi ? Qui êtes-vous pour juger ce que le grand public peut recevoir et devrait comprendre ou ne pas comprendre ? Le film a été projeté un soir de janvier à des hommes et des femmes de divers horizons, qui allaient participer aux Etats Généraux de la bioéthique. Des gens intelligents, qui ont plébiscité ce que vous qualifiez dédaigneusement de « pénible pantomime ». Mais qui êtes-vous, comment osez-vous avec le même dédain affubler de l’adjectif «valables» des historiens reconnus comme Yves Ternon ou Yohann Chapoutot, qui sont si fiers d’avoir participé à ce documentaire ? On a parfaitement compris que vous n’avez pas aimé le documentaire, mais la « mise en scène outrée de mon indignation » n’était pas nécessaire à la compréhension de votre papier. Elle prouve que vous n’avez pas compris, ou voulu comprendre, les raisons pour lesquelles j’ai tant voulu ce documentaire . Que savez-vous en outre de mon indignation ? Qui êtes-vous donc pour en juger ? A l’heure du négationnisme, de l’intolérance, de la prolifération des extrêmes en tous genres, des réseaux sociaux et des fake news, il devient fondamental de rappeler, ou d’apprendre - oui d’apprendre - aux jeunes générations ce qui s’est passé dans les camps… même si cela doit être pour la … « énième fois » ! Pardonnez la faiblesse de mes références littéraires (je ne suis que médecin !!), mais je vous invite à relire régulièrement cette phrase d’Henri Borlant, ancien déporté : «Il faut, il faudra sans cesse rappeler que cela fut.»

Michel CYMES