Des gilets jaunes blessés créent le collectif "Les mutilés pour l’exemple"

Des gilets jaunes blessés lors des manifestations créent le collectif "Les mutilés pour l’exemple". Ils réclament que la justice et la vérité soient faites sur ces blessures et militent pour l’interdiction des armes sublétales.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Ces dosages sanguins recherchaient des traces d'intoxication au cyanure due aux lacrymogènes
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Amputés, éborgnés, défigurés… les manifestants gravement blessés par les forces de l’ordre constituent un collectif qui vise à combattre "l’ultra-violence de la répression". La plupart des membres de ce collectif ont été blessés durant le mouvement des "gilets jaunes" et appellent à une grande manifestation nationale à Paris le 26 mai prochain.

"On a décidé de constituer un collectif, 'Les mutilés pour l'exemple', en référence aux fusillés pour l'exemple", a déclaré lors d'une conférence de presse le 28 avril à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) Robin Pagès, handicapé depuis sa grave blessure au pied en 2017 à Bure (Meuse). "On réclame la vérité, la justice et l'interdiction des armes dites sublétales", a-t-il souligné.

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"C’est l’horreur au quotidien"

Lors de cette conférence, 19 personnes, toutes blessées par des tirs de lanceur de balles de défense (LBD) ou de grenades, ont présenté ce collectif dont le principal combat est de faire interdire "l'utilisation de ces armes de guerre". Et plusieurs d'entre elles ont témoigné : "Vous avez 19 personnes devant vous et vous n'avez que 26 yeux qui vous regardent. Faites le compte, il y a un petit problème", a ainsi asséné Jérôme Rodrigues, "gilet jaune" éborgné lors d'une manifestation fin janvier à Paris.


Chacune des personnes présentes a raconté cette "vie qui a basculé" ou l'impossibilité "de pouvoir se regarder dans une glace". Sébastien Maillet, qui a eu la main arrachée le 9 février à Paris lors de l’acte 13 des "gilets jaunes" et qui a décidé de porter plainte contre X pour "fichage illicite" a notamment témoigné : "La nuit, c'est des insomnies, des cauchemars. C'est l'horreur au quotidien pour essayer de se démerder comme on peut avec une main. Pour l'instant, c'est l'enfer total".


De même, Patrice Philippe, ex-chauffeur routier de 50 ans blessé à l'oeil par un tir de LBD le 8 décembre 2018, confie : "la monophtalmie complique toute votre vie. Les choses vous demandent beaucoup de temps et il y a un impact psychologique sur votre entourage et vos proches".

83 enquêtes pour des tirs problématiques

D'après le collectif, depuis le début du mouvement des "gilets jaunes", 22 personnes ont perdu un oeil et cinq ont été amputées d'une main, "sans compter les autres mutilations" (perte d'odorat, testicule amputé). "De nombreuses personnes ici présentes ont des plaques en titane et des vis dans le visage", a ajouté Robin Pagès. 

Selon lui, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner "ment" quand il parle de "seulement dix personnes touchées à la tête par des tirs de LBD". Début mars, l'Intérieur comptabilisait 13.095 tirs de LBD depuis le premier acte de ce mouvement inédit et 83 enquêtes pour des tirs potentiellement problématiques. Plusieurs associations militent également pour l'interdiction de cette arme lors des manifestations.

En parallèle, le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) a saisi la Direction Générale de la Santé (DGS) et la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) pour comprendre le recours au fichage des patients gilets jaunes blessés dans les hôpitaux.