Quand les cosmétiques sont testés... sur de la peau humaine recyclée

Recycler de la peau humaine : c'est le pari de la société Genoskin. La peau issue d'opérations de chirurgie esthétique est transformée en échantillons et utilisée pour des tests cosmétiques. Reportage.

Adélie Floch
Rédigé le
De la peau humaine pour des tests cosmétologiques  —  Le Magazine de la Santé - France 5

Plusieurs fois par semaine, dans les blocs opératoires, ce biologiste vient chercher sa matière première : de la peau humaine. "Je suis venu récupérer des fragments de peau, ce sont des déchets opératoires de plastie abdominale. Cette peau est normalement détruite et nous la récupérons pour la transformer en modèle", explique Benoît Lavabre, manager biobanque et qualité Genoskin.

Une seconde vie pour la peau

La peau tout juste sortie du bloc est placée dans une glacière. Elle provient d'un patient anciennement obèse qui se l’ai faite retirer après sa perte de poids et a décidé d’en faire don. 30 minutes plus tard, la voici dans le laboratoire de cette entreprise toulousaine, prête à être recyclée. 

"Elle est plutôt jolie, on n’a pas beaucoup de vergetures, on a quelques plis liés au sac mais ça va s’estomper en attendant un tout petit peu. Vous voyez on a de belles zones bien exploitables, parfaitement saines", commente Benoit Lavabre .

La peau humaine est un matériau peu commun sur lequel ce laboratoire a misé. Ici, des échantillons de peau qui serviront à des tests cosmétiques ou toxicologiques sont préparés. Avant cela, le produit passe par plusieurs étapes.

"Comme si la peau était encore sur vous"

"On cherche à conserver l’épiderme et le derme, donc on retire le gras et ce qu’on voit apparaître en blanc, c’est le derme", explique Anne Dalapa Amana, technicienne production Genoskin.

La peau est ensuite découpée pour former des échantillons de quelques centimètres.  Pour le reste, l’entreprise veut garder le secret. Ils ont mis au point une matrice, une solution gélifiée qui permet de maintenir la peau en vie jusqu’à sept jours.

"Voilà le produit terminé. On est les seuls au monde à avoir cette matrice. Contrairement à un modèle de peau reconstruit 3D, on a vraiment toute la complexité de la peau, des follicules pileux, on a encore des glandes sébacées, des cellules immunitaires, de l’épiderme, du derme … comme si elle était encore sur vous", confie  Anne Dalapa Amana.

Une alternative à l'expérimentation animale

Mais à quoi sert ce modèle de peau humaine ? Il est aujourd'hui utilisé dans de plus en plus de laboratoires, dont des entreprises de cosmétique.  Ce jour-là, les échantillons servent à tester l’efficacité d’une crème anti-âge.

"Il y a très longtemps, on travaillait sur des animaux mais maintenant en cosmétique, c’est interdit. Et ce modèle de peau est plus pertinent que les modèles de peau reconstruite, car il nous permet de mieux voir l’effet du produit", explique Sarah Grosjean, chef de projet en biologie à l'entreprise de cosmétique Syntivia.  

Ces modèles de peau sont vendus sur internet pour les professionnels. Il faut compter 99 euros les quelques centimètres de peau saine.