Un champignon pour soigner la mucoviscidose ?

Après l'autorisation du Kaftrio fin 2022, une molécule issue d’un champignon comestible, très courant dans l’hémisphère Nord, pourrait bien soigner les patients qui n'ont pas encore de solution thérapeutique.

Anaïs Plateau
Rédigé le , mis à jour le
Un champignon pour soigner la mucoviscidose
Un champignon pour soigner la mucoviscidose  —  Le Mag de la Santé - France 5

Si Nils, 18 ans, utilise ce drôle de sifflet plusieurs fois par semaine, ce n’est pas pour jouer, mais bien pour sa santé. "Ça sert à faire des expectorations en fait, c'est pour dégager ce que j'ai dans les bronches et ça m'aide au quotidien à mieux respirer", explique-t-il.

Depuis sa naissance, il vit avec la mucoviscidose, une maladie génétique qui affecte ses bronches et son système digestif."La plupart de ces cachets concernent les poumons et mon espoir est qu'il n'y ait qu'un seul cachet pour les poumons", confie Nils.

Un banal champignon au secours des malades

Pour espérer un jour y parvenir, des chercheurs travaillent intensément. Comme à l’Inserm, à Lille. Le point commun entre de la sauge, de la cire d’abeille et ce champignon... C’est qu'ils ont été testés parmi les 20 000 extraits qu’a étudié le chercheur Fabrice Lejeune. Un seul a réagi, le champignon Lepista flaccida.

"On a été extrêmement surpris parce qu'on a vu une amplitude de réponses qui était très importante... C'est un champignon comestible qu'on retrouve en Europe, en Afrique du Nord et en Amérique du Nord. Si ce champignon est comestible, il n'est pas souvent collecté parce qu'il n'a pas de goût", explique Fabrice Lejeune.

Ce n’est pas sous cette forme avec son joli chapeau que ce champignon intéresse le chercheur. C’est son principe actif en poudre qui agirait sur un type de mutation que porte 10 % des patients atteints de mucoviscidose. Aucun traitement ne permet pour l’instant de la combattre. Il s’agit d’une mutation non-sens.

Corriger et réparer les mutations

"Une mutation non-sens est un peu comme un point qui arriverait trop tôt dans une phrase. La phrase n'a plus de sens et c'est un peu ce qui se passe au niveau de la synthèse de la protéine qui est responsable de la pathologie dans la mucoviscidose", précise Fabrice Lejeune. 

Pour vérifier l’effet du champignon, Fabrice Lejeune a testé son principe actif sur des organoïdes, des cellules qui miment le rôle des intestins humains, et ça fonctionne. Le chercheur en a aussi donné à des souris atteintes de la fameuse mutation.

Sur cette coupe d’un poumon, les zones foncées autour des bronches, montrent une correction de la mutation."En traitant ces souris avec le principe actif du champignon, on obtenait beaucoup moins de souris qui mouraient, ce qui indiquait donc qu'on avait corrigé la mutation non-sens", confie Fabrice Lejeune.

Des essais cliniques d'ici 5 ans

Il reste encore des étapes, mais les chercheurs envisagent de débuter les essais cliniques avec des patients d’ici 5 ans."On espère pouvoir effacer toutes les conséquences liées à cette mutation non-sens. Des bronches beaucoup moins encombrées, un gain de poids puisqu'il faut savoir que les patients atteints de mucoviscidose ont un poids inférieur à la normale", précise Fabrice Lejeune.

Mais attention, à l’automne prochain, lors de vos balades en forêt, n’imaginez pas qu’en mangeant une omelette aux champignons, vous auriez des effets. Il faudrait en ingérer des quantités énormes qui pourraient s’avérer toxiques.