La face cachée de la cortisone

La cortisone et ses dérivés, les corticoïdes, ont révolutionné la médecine dans les années 1930. Même s'ils sont devenus indispensables dans le traitement de certaines pathologies, leurs effets secondaires ne sont pas négligeables.

La rédaction d'Allo Docteurs
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La face cachée de la cortisone
Crédits Photo : © photo4passion.at / Shutterstock

La cortisone est un médicament qui a révolutionné la médecine. La cortisone et ses dérivés, les corticoïdes, sont devenus aujourd'hui indispensables dans la prise en charge de nombreuses pathologies. Qu'ils soient utilisés sur du court ou plus long terme, le but des corticoïdes est de stopper l'inflammation. La cortisone est effectivement ce qu'on appelle un anti-inflammatoire stéroïdien.

Qu'est-ce que la cortisone ?

La cortisone est proche d'une substance que notre organisme produit naturellement : le cortisol. Il est synthétisé par les glandes surrénales, situées au-dessus des reins. Ces glandes comportent deux parties : une zone médullaire au coeur de la glande, chargée de sécréter l'adrénaline, et une zone corticale périphérique chargée de produire à partir du cholestérol, le fameux cortisol ainsi que d'autres hormones. Cette production est régulée par le cerveau et plus précisément par l'hypophyse, qui stimule les surrénales en fonction des besoins du corps.

Quels sont les effets de la cortisone ?

Parmi ses nombreux effets, le cortisol permet de libérer de l'énergie à partir des réserves de l'organisme, il stimule la dégradation des protéines et des graisses dans la plupart des tissus et contribue à l'augmentation du taux de glucose sanguin. Ces effets combinés permettent au corps d'être mobilisé, le corps est en état de stress prêt à réagir.

L'étude de ce cortisol naturel a permis de donner naissance à toute une classe de médicaments dont la cortisone. Des médicaments utilisés en cas d'inflammation, d'allergie mais aussi pour leurs effets immunosuppresseurs. La cortisone agit sur les défenses immunitaires pour protéger par exemple, un organe greffé et diminuer ainsi les risques de rejet. Malheureusement, la cortisone a aussi des inconvénients, notamment lorsqu'elle est prescrite sur une longue période.

La découverte de la cortisone

Comment la cortisone a-t-elle été découverte ?  —  Le Magazine de la Santé

La découverte de médicaments peut souvent passer inaperçue. Ce n'est pas le cas de la cortisone.
En 1902, deux chercheurs anglais montrent que certaines glandes du corps humain fabriquent des substances qui excitent d'autres parties du corps. Parmi ces glandes : les glandes surrénales, situées au-dessus de chaque rein.

Puis, en 1941, un chercheur Américain extrait enfin la cortisone de glandes surrénales bovines. Car la rumeur court que les pilotes allemands l'utilisent pour voler à haute altitude sans oxygène... Après-guerre, la cortisone commence à être utilisée contre les polyarthrites rhumatoïdes.

Mais les effets secondaires sont nombreux et assez sévères. Aujourd'hui, la cortisone elle-même est de moins en moins utilisée, sauf en tant qu'immunosuppresseur. À la place, des corticoïdes de synthèse sont largement utilisés.

La cortisone, une arme redoutable contre la douleur

Depuis les années 1930, la cortisone et ses dérivés, les corticoïdes, améliorent le quotidien des malades souffrant de rhumatismes, de maladies auto-immunes ou de douleurs dues au cancer. Uniquement délivrée sur prescription médicale, elle combat les inflammations.

Lorsqu'une douleur est très aiguë et invalidante, une infiltration de cortisone peut s'avérer nécessaire. Ce geste pratiqué en ville chez le rhumatologue apporte souvent un réel soulagement au patient.

D'une efficacité redoutable, la cortisone n'est toutefois pas anodine et doit être utilisée avec prudence comme l'explique le Dr Patrick Le Goux, rhumatologue : "La cortisone a un puissant effet anti-inflammatoire. Elle agit sur la phase inflammatoire mais elle n'agit pas sur la phase de réparation ou de cicatrisation des tendons ou du cartilage articulaire. Ces tissus ne se régénèrent pas spontanément très bien. Donc injecter trop de cortisone localement peut induire un défaut de réparation voire dans certains cas, inverser le processus et favoriser la dégradation de ces tissus".

L'action anti-inflammatoire de la cortisone se diffuse pendant une quinzaine de jours. Le patient doit être surveillé de près par son spécialiste qui veille à la prise en charge globale de ses rhumatismes.

Les effets secondaires de la cortisone

Un traitement sur de longues périodes nécessite des check-ups réguliers
Les effets secondaires de la cortisone  —  Magazine de la santé


La cortisone est indispensable dans le traitement de certaines maladies, comme la polyarthrite rhumatoïde, la sclérose en plaques ou certaines maladies de peau. Prise de poids, fragilisation de la peau, fonte musculaire ou ostéoporose sont les effets secondaires que connaissent beaucoup de patients sous cortisone à haute dose. D'autres effets, neuropsychiatriques, sont moins connus bien que fréquents.

Les effets secondaires neuropsychiatriques comme l'euphorie ne sont pas si rares. Ils touchent un patient sur deux dans ces traitements. Une prise en charge psychologique est donc souvent proposée en complément. "Si sous l'effet d'un traitement, on n'est pas complètement soi, cela a un effet angoissant. De ce fait, être accompagné durant toutes ces étapes est important", explique Maryline Adelaïde, psychologue. Les problèmes neuropsychiatriques peuvent être améliorés par une réduction progressive des doses de cortisone.

Cortisone : l'intérêt de l'éducation thérapeutique

À l'hôpital La Pitié-Salpêtrière à Paris, il existe un atelier thérapeutique pour aider les malades qui prennent de la cortisone à mieux gérer leur traitement. Les patients qui y participent souffrent de pathologies neuromusculaires, de maladies auto-immunes rares qui nécessitent des doses de corticoïdes importantes.

Les effets des corticoïdes sont souvent mal connus même par les malades qui doivent en prendre à forte dose. Les ateliers thérapeutiques sont donc essentiels pour les malades sous corticoïdes. Ces ateliers ont été mis en place en 2011 dans le service de médecine interne de l'hôpital.

"On gagne du temps, de l'énergie pour les personnes en faisant en plus de l'exercice physique qui diminue les effets secondaires des corticoïdes mais qui accélère aussi la réparation des muscles", explique le Dr Anne Simon, médecin interniste.

Outre les exercices physiques, les patients reçoivent également des conseils nutrition. Ils sont essentiels pour mieux comprendre comment s'alimenter quand on prend des corticoïdes. "Les corticoïdes augmentent l'appétit, constate Nathalie Werner, diététicienne, et le risque c'est donc de manger plus sachant que l'on va se dépenser sûrement un peu moins du fait de la pathologie et la prise de poids va être le cheval de bataille". Et pour ne pas prendre de poids, il faut manger équilibré, autrement dit avoir quotidiennement des apports suffisants et variés. Pour cela, il faut connaître la nature des aliments.

Chasser les idées toutes faites sur la nourriture et apprendre à composer des repas équilibrés, c'est ce qu'apprennent les patients au cours de ces ateliers. Prise de poids, stress mais aussi troubles du sommeil, les patients peuvent participer à ces ateliers une fois par mois pour apprendre à mieux gérer les effets secondaires de leur traitement.

Cortisone : contrôler la densité osseuse

L'ostéodensitométrie permet de contrôler la densité osseuse
L'ostéodensitométrie permet de contrôler la densité osseuse  —  Magazine de la Santé

Rhumatologie, cancérologie, maladie auto-immune... La cortisone et ses dérivés, les corticoïdes, ont révolutionné la prise en charge de nombreuses pathologies et ce depuis les années 30. Délivrés sur prescription, le but des traitements à base de corticoïdes est de stopper les inflammations.

D'une efficacité redoutable sur les douleurs, les corticoïdes peuvent entraîner, quand ils sont pris au long cours, des effets secondaires non négligeables. L'un des effets secondaires des traitements à base de corticoïdes est une fragilisation des os et le risque de développer une ostéoporose. Les patients qui utilisent les corticoïdes au long cours doivent donc être régulièrement suivis pour surveiller la bonne santé de leur squelette.

"Les corticoïdes sont très bénéfiques pour la maladie inflammatoire. Mais ils ont des conséquences sur le métabolisme de l'os, en particulier ils sont toxiques pour certaines cellules qui construisent l'os. Et en même temps, les corticoïdes diminuent l'absorption digestive du calcium avec une augmentation de la destruction osseuse. La résultante, c'est une perte osseuse", explique le Dr Catherine Cormier, rhumatologue.

Les consultations de suivi permettent de faire le point sur l'évolution de la maladie et sur le risque de développer une ostéoporose. Chutes, fractures, activité physique et surtout alimentation… l'interrogatoire est précis. Le manque de calcium additionné à la prise de corticoïdes peut entraîner une dégradation de la qualité des os du patient. Pour le savoir, il doit passer une ostéodensitométrie. Cet examen indolore permet d'évaluer la densité des os grâce à des rayons X. Les mesures sont prises au niveau des hanches et de la colonne vertébrale.

"Si l'ostéodensitométrie montre une ostéoporose et que les patients vont prendre des corticoïdes pendant plus de trois mois, on va donner des traitements qui vont contrecarrer l'effet négatif sur l'os des corticoïdes", précise le Dr Cormier.

Cortisone : prévenir la prise de poids

Atelier nutrition à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris
Atelier nutrition à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris  —  Le Magazine de la Santé

La prise prolongée de corticoïdes peut entraîner une prise de poids. Alors, dès la mise en place du traitement, certains hôpitaux proposent des ateliers nutrition pour aider les patients à adopter les bons réflexes.

Les corticoïdes entraînent souvent une augmentation de l'appétit. Alors pour éviter de prendre du poids, les diététiciennes rappellent aux patients les règles d'une alimentation équilibrée et variée.

Une alimentation variée doit notamment contenir des fruits, des légumes pour les vitamines, du poisson, de la viande ou des œufs pour les protéines, des produits laitiers pour le calcium, des féculents pour les glucides et des graisses pour les lipides. Mais les patients sous corticoïdes doivent particulièrement faire attention au sucre et notamment au sucre caché, et doivent aussi surveiller leurs apports en graisses.

Pour les patients, le non respect de l'équilibre alimentaire peut avoir de lourdes conséquences comme le confirme Marie-Paule Dousseaux, diététicienne : "Lorsqu'on est sous corticoïdes, si on ne respecte pas cet équilibre de dépense, on va souvent induire un diabète, on va faire augmenter le taux de mauvais cholestérol".

En moyenne, 10% des patients traités par corticoïdes prennent plus de cinq kilos et 10% développent un diabète à cause du traitement.

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