Hydroxychloroquine : Le Pr Raoult peut-il continuer à prescrire ?

Même si un décret interdit désormais la prescription d’hydroxychloroquine contre le Covid-19, les médecins peuvent toujours faire appel à leur "liberté de prescription" s’ils estiment que ce traitement reste adapté à leurs patients.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Image d'illustration.  —  Crédits Photo : © Shutterstock / George Socka

"Que ce soit en ville ou à l’hôpital, cette molécule ne doit pas être prescrite pour les malades du Covid-19." C’est ce qu’ordonne depuis le 27 mai le décret publié au Journal Officiel portant sur le recours à l’hydroxychloroquine contre le coronavirus.
Mais cette nouvelle règle peut-elle dans les faits interdire totalement l’administration de ce médicament à un malade du Covid ? Ce n’est pas si simple.

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"Liberté de prescription"

Par exemple, l’IHU-Méditerranée-Infection, dirigé par le professeur Raoult qui continue de défendre l’hydroxychloroquine, a déclaré à la suite de la publication du décret : "nous continuerons à traiter nos patients avec les traitements que nous estimons les plus adaptés en l’état actuel de la science et des connaissances." Y compris, donc, avec de l’hydroxychloroquine. L’IHU sera-t-il pour autant hors-la-loi ? Pas forcément, car à ce décret s’oppose directement le concept de "liberté de prescription" du médecin, inscrit dans le serment d’Hippocrate.

Selon ce concept, "même si un médicament n’est pas autorisé à être sur le marché, un médecin a le droit de le prescrire" rappelle au Magazine de la Santé le professeur Jean-François Bergmann, professeur de thérapeutique à l’université Paris Diderot.

Information, consentement et justification

Une liberté qui dépend tout de même de certaines conditions. Le médecin qui invoque sa liberté de prescription devra informer le malade, recueillir son consentement, inscrire la prescription dans le dossier médical du patient et justifier son choix en s’appuyant sur des données scientifiques. Et c’est ce dernier point qui peut poser problème dans le cas de l’hydroxychloroquine, puisque les dernières études montrent une inefficacité de ce médicament contre le SARS-CoV-2, voire une nocivité, et que les avis officiels sont défavorables à son utilisation contre le Covid-19.

Un médecin qui déciderait aujourd’hui de prescrire de l’hydroxychloroquine à un malade du Covid-19 pourrait donc difficilement se défendre face à un juge en cas de problème. Et, en cas de complication voire de décès du malade, seul le prescripteur pourra être mis en cause si la victime ou ses proches se retournent pénalement contre le médecin.

Un traitement à la charge du patient

Enfin, dans le cas où un médecin décide de faire appel à sa liberté de prescription et que le patient accepte de recevoir de l’hydroxychloroquine, ce traitement sera à la charge du malade. En effet, puisque l’hydroxychloroquine ne dispose plus d’autorisation de prescription dérogatoire pour le Covid-19, elle n’est plus reconnue et donc plus remboursée par la Sécurité sociale pour cette maladie.

En revanche, l’hydroxychloroquine peut toujours être prescrite et remboursée dans le cadre de son Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), notamment comme traitement de certaines maladies inflammatoires telles que le lupus ou la polyarthrite rhumatoïde.