Allergies alimentaires : le danger dans l'assiette

Les allergies alimentaires ont doublé en quelques années. Près de 4% des adultes et 8% des enfants sont condamnés à surveiller leur assiette. L'arachide, l'oeuf, le blé ou encore le lait sont les aliments les plus souvent incriminés. Quel est le suivi de ces allergies ?

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Allergies alimentaires : le danger dans l'assiette

Qu'est-ce que les allergies alimentaires ?

Marina Carrère d'Encausse et Michel Cymes expliquent le mécanisme des allergies alimentaires
Marina Carrère d'Encausse et Michel Cymes expliquent le mécanisme des allergies alimentaires

Lait de vache, arachide, blé ou encore oeuf… De plus en plus de Français doivent les éviter car ils sont allergiques à ces aliments. En France, près de 4% des adultes et 8% des enfants doivent surveiller leurs assiettes à cause de ces allergies alimentaires.

Une allergie alimentaire est une réaction disproportionnée de notre corps à un allergène normalement inoffensif. Cela peut être un aliment ou un additif alimentaire. L'allergie peut apparaître soit progressivement avec l'âge, soit dès la naissance.

Quand l'allergie alimentaire est progressive, cela commence généralement par une phase de sensibilisation. L'organisme entre en contact une première fois avec l'allergène. Par exemple, une cacahuète. Le système de défense mémorise alors qu'il y est sensible. À cet instant précis, il n'y a aucun symptôme, mais tout est prêt pour déclencher la réaction allergique. Dès que la personne ingère de nouveau l'allergène, le système de défense s'emballe. Des cellules (mastocytes) reçoivent le signal et libèrent de l'histamine. Une substance inflammatoire qui provoque les divers symptômes de l'allergie alimentaire.

Quand l'allergie est présente dès la naissance, il n'y a pas de phase de sensibilisation. La réaction peut être violente dès le départ. Des travaux ont montré que les globules blancs du système de défense de certains enfants sont suractivés pour une raison inconnue. Ils produisent trop de molécules pro-inflammatoires responsables des signes de l'allergie. Les lèvres, la langue, les paupières mais aussi le pharynx et le larynx peuvent alors se mettre à gonfler jusqu'à bloquer les voies respiratoires. C'est l'œdème de Quincke. Il s'agit d'une urgence médicale.

Visite chez l'allergologue

Le dépistage de l'allergie alimentaire
Le dépistage de l'allergie alimentaire

Devant des signes évoquant une allergie, la visite chez l'allergologue est indispensable pour trouver les aliments qui en sont responsables et mettre en place des mesures préventives et un traitement adapté.

Ces visites doivent être répétées tous les ans pour vérifier le diagnostic.

Des tests de provocation orale

Les tests de provocation orale permettent de diminuer les réactions allergiques.
Les tests de provocation orale permettent de diminuer les réactions allergiques.

Service d'allergologie de l'hôpital des enfants de Toulouse. Ici, les médecins ont mis en place un protocole unique pour lutter contre les allergies alimentaires. Maeli a 17 ans, depuis toute petite, elle souffre d'allergies multiples : aux fruits, aux pollens et aux cacahuètes. Dans ce service, on lui ré-apprend à mieux tolérer ces aliments pour diminuer les réactions allergiques.

En donnant de très petites quantités d'aliments, sans jamais brusquer l'organisme, on a observé que le corps fabriquait des anticorps anti-allergie. Ces tests de provocation orale permettraient à l'organisme d'acquérir une certaine tolérance.

Toutes les 20 minutes, les doses sont augmentées, les infirmières restent très vigilantes. La moindre réaction doit être repérée à temps afin d'interrompre si nécessaire le protocole.

Des patchs pour désensibiliser les patients allergiques

Les patchs de désensibilisation doivent être changés tous les jours.
Les patchs de désensibilisation doivent être changés tous les jours.

Des patchs pour arrêter de fumer, d'autres pour soulager les articulations... bientôt les patchs pourront aussi agir contre les allergies alimentaires. Depuis 2010, des patchs de désensibilisation à l'arachide sont testés sur des enfants allergiques.

Le patch est constitué d'une fine couche d'allergènes. Une fois en contact avec la peau, la poudre se dissout et pénètre dans l'organisme. Les allergènes sont capturés par les cellules immunologiques qui migrent ensuite jusqu'aux ganglions lymphatiques. Le processus de désensibilisation peut alors commencer.

Une désensibilisation par le patch est moins toxique qu'une désensibilisation par voie orale. Et sur la peau, le patch ne peut pas déclencher de réactions violentes ou de choc. La pose du patch se fait donc en toute sécurité.

Des repas pas comme les autres

Comment faire respecter à l'école le régime des enfants allergiques ?
Comment faire respecter à l'école le régime des enfants allergiques ?

Pour éviter aux parents d'enfants allergiques ou intolérants au gluten d'avoir à assumer eux-mêmes les repas à la maison, une solution existe : le PAI, le projet d'accueil individualisé. Il permet d'inclure l'allergie dans le cadre des maladies chroniques et d'autoriser la prise de médicaments dans l'enceinte de l'école.

Autre intérêt du PAI : inciter les responsables des mairies et des restaurants scolaires à accepter les "paniers repas" apportés par les parents.

Aider les enfants à mieux vivre avec leur allergie alimentaire

Pour aider les enfants à mieux gérer leur allergie alimentaire, il existe des ateliers thérapeutiques.

Des marionnettes allergiques… Un jeu qui permet de reproduire des situations que les enfants connaissent bien. "C'est une façon de mettre en place des jeux de rôle, des saynètes avec les enfants. C'est pour eux une façon de s'identifier. On prend des situations de la vie de tous les jours, des choses qu'ils ont déjà rencontrées dans leur parcours d'enfant", explique Eve Piorowicz, psychologue.

Reconnaître une crise d'allergie, savoir quel médicament prendre ou encore savoir dire non et expliquer pourquoi… avec les marionnettes, les enfants apprennent à réagir dans diverses situations. L'objectif des ateliers est de devenir plus autonome par rapport à son allergie dans toutes les situations.

"Dans les familles, c'est le parent qui est responsable de l'allergie, de ce qu'on mange… Avec ces ateliers, on transfère des compétences à l'enfant pour le rendre autonome. Du coup, finalement, on met le parent et l'enfant un peu sur le même niveau. Cela permet de rouvrir le dialogue car l'enfant est content de montrer qu'il sait, qu'il sait lire les étiquettes, qu'il sait faire sa piqûre, qu'il sait appeler le Samu…", précise le Dr Chantal Karila, pneumo-pédiatre allergologue.

Au même moment que leurs enfants, les parents apprennent aussi les bons gestes. Pour eux pas de marionnettes, mais des questions, des conseils pour mieux gérer leurs inquiétudes. Ces ateliers permettent aux parents et aux enfants de se sentir moins isolés et de prendre confiance dans leur gestion de l'allergie.

Un patch pour traiter les allergies aux cacahuètes

Les personnes allergiques à l'arachide doivent éviter toute trace d'arachide (Reportage du 31 mai 2016)
Les personnes allergiques à l'arachide doivent éviter toute trace d'arachide (Reportage du 31 mai 2016)

Un enfant sur cent souffre d'une allergie à la cacahuète, c'est-à-dire à l'arachide. Un traitement est actuellement à l'essai. Il s'agit d'un patch imbibé de protéine d'arachide ayant pour objectif de désensibiliser.

Les personnes allergiques à l'arachide doivent éviter toute trace d'arachide. Mais la solution pour traiter cette allergie se trouve peut-être dans un laboratoire qui met au point un patch cutané de désensibilisation à l'arachide.

Une fois le patch positionné sur la peau, la protéine d'arachide se dissout dans les gouttes de transpiration de la peau et pénètre dans la couche supérieure de l'épiderme. Les allergènes sont ensuite capturés par les cellules immunologiques qui migrent ensuite jusqu'aux ganglions lymphatiques. C'est dans ces ganglions que se déroule la rééducation du système immunitaire. C'est ce qu'on appelle le processus de désensibilisation.

"80% des enfants qui ont été traités avec le patch, ont multiplié par dix au moins, parfois beaucoup plus, la quantité d'allergène qu'ils pouvaient manger. Par exemple, pour un enfant qui mangeait un cinquième de cacahuète arrive à deux cacahuètes et ce n'est plus du tout la même histoire. Le danger est bien moindre", explique le Dr Pierre-Henri Benhamou, président directeur général de DBV Technologies.

Actuellement testé sur des enfants, l'essai clinique est aujourd'hui dans sa dernière phase. D'ici 2018, il devrait être mis sur le marché. À l'avenir, le laboratoire souhaite développer d'autres patchs pour traiter l'allergie au lait et à l'œuf.