Cancer de l’ovaire : les bactéries vaginales en cause ?

Une raison supplémentaire d'éviter les toilettes intimes. Selon une nouvelle étude parue dans The Lancet, les femmes dont le microbiote vaginal contient trop peu de bactéries lactobacilles présenteraient un risque accru de cancer de l’ovaire.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Cellule épithéliale du vagin et bactéries lactobacilles.
Cellule épithéliale du vagin et bactéries lactobacilles.  —  Crédits Photo : CDC / Dr. Mike Miller / Janice Carr

Et si les bactéries vaginales influaient sur le risque de cancer de l’ovaire ? C’est la question que se sont posés des chercheurs spécialisés en cancérologie et en gynécologie au University College London (Royaume-Uni) et à l’université de Milan-Bicocca (Italie). Dans une étude qu’ils publient le 9 juillet 2019 dans la revue The Lancet Oncology, ils mettent en évidence une corrélation entre la composition du microbiote cervico-vaginal et le risque de développer un cancer de l’ovaire. Plus précisément, les chercheurs pointent du doigt la quantité de lactobacilles, les bactéries les plus fréquentes dans le microbiote vaginal et déclinées sous différentes espèces (Lactobacillus crispatus, Lactobacillus gasseri ou encore Lactobacillus jensenii).

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Moins de 50% de lactobacilles chez les femmes à risque

Pour réaliser cette étude, les chercheurs se sont appuyés sur deux groupes de 580 femmes âgées de 18 à 87 ans recrutées entre janvier 2016 et juillet 2018. Le premier groupe comprenait 176 femmes atteintes d’un cancer de l’ovaire et 184 femmes en bonne santé. Le second groupe réunissait quant à lui 109 femmes porteuses de la mutation du gène BRCA1 - qui les expose à un risque accru de cancer de l’ovaire ou du sein - et 111 femmes non porteuses de cette mutation. Pour chacune de ces femmes, les scientifiques ont réalisé des prélèvements par frottis au niveau du col de l’utérus. Ils ont ensuite analysé les bactéries présentes dans ces prélèvements et composant donc le microbiote vaginal de chaque femme.

Résultat : les lactobacilles étaient en faible quantité (moins de 50% du microbiote) chez les femmes de moins de 50 ans souffrant d’un cancer de l’ovaire comme chez celles génétiquement à risque car possédant une mutation du gène BRCA1. Chez les femmes en bonne santé gynécologique, les lactobacilles représentaient plus de 50% du microbiote.

Barrière protectrice

La causalité n’est pas clairement établie mais la composition du microbiote et le risque de développer un cancer de l’ovaire pourraient être liés, selon les chercheurs qui rappellent que de plus en plus d’études montrent que les bactéries vivant dans nos organismes jouent un rôle sur la survenue de cancers.

Concrètement, dans le cas du cancer de l’ovaire, les lactobacilles pourraient constituer une barrière protectrice contre les infections ou les inflammations en empêchant les bactéries pathogènes ou délétères de "remonter" du vagin vers les ovaires, via le col de l’utérus, l’utérus et, enfin, les trompes de Fallope. Et tout est question d’équilibre : les lactobacilles ne pourraient jouer leur rôle de barrière contre ces autres bactéries seulement si elles sont présentes en quantité suffisante.

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Des nouveaux moyens de prévention ?

Un autre argument en faveur de l’existence d’un lien entre microbiote et cancer est soufflé à la BBC par le professeur Martin Widschwendter, co-auteur de l’étude : "il a été montré que les femmes qui utilisent des produits d’hygiène intime de façon excessive ont aussi des quantités plus faibles de ces bactéries et qu’elles possèdent un risque accru de cancer des ovaires". Une pratique d’hygiène qui est donc à éviter, par principe de précaution dans ce cas, mais aussi pour prendre soin de son microbiote et limiter ainsi le risque d’infections, d’irritations ou de mycoses.

Si des travaux supplémentaires sont nécessaires pour valider - ou non - cette étude, les chercheurs envisagent déjà des applications concrètes pour mieux prévenir les cancers de l’ovaire : l’usage d’un frottis pour repérer les femmes à risque ou encore le recours à des suppositoires vaginaux contenant des lactobacilles vivants pour coloniser un vagin au microbiote déséquilibré.