Comment le sommeil favorise-t-il l'apprentissage ?

Bien dormir est important pour la mémorisation. Ce constat, bien connu depuis longtemps, vient d'être mis en évidence par une équipe de chercheurs qui apporte les clés pour comprendre comment le sommeil améliore l'apprentissage.

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le
Comment le sommeil favorise-t-il l'apprentissage ?
Photographie d'épines dendritiques d'un neurone. Lorsqu'elles touchent les neurones voisins, elles forment avec eux des connexions.
Photographie d'épines dendritiques d'un neurone. Lorsqu'elles touchent les neurones voisins, elles forment avec eux des connexions.

On conseille souvent de relire un texte avant de s'endormir pour mieux le mémoriser. Mais par quel mécanisme le sommeil améliore-t-il la mémoire ? Une équipe de chercheurs chinois et américains vient de lever le voile sur ce phénomène. Leurs travaux sont publiés le 6 juin 2014 dans la revue Science.

Pour leur étude, les chercheurs ont commencé par apprendre une nouvelle acrobatie à leurs souris de laboratoire : courir sur une baguette en rotation et en accélération. Grâce à une modification génétique, les chercheurs étaient capables d'observer en direct, au travers de leurs microscopes, l'évolution de la forme des neurones du cortex moteur des souris.

Ils ont alors observé une augmentation du nombre d'épines dendritiques se formant sur les neurones. Les épines dendritiques sont des protubérances sur les bras des neurones, qui se connectent aux neurones voisins et facilitent le passage d'informations entre eux. En d'autres termes, avec l'apprentissage de la nouvelle tâche, le nombre de connexions entre les neurones a augmenté.

Le sommeil impliqué dans l'apprentissage

Les chercheurs ont ensuite voulu vérifier si le sommeil jouait un rôle sur cette formation d'épines dendritiques. Ils ont donc séparé les souris en deux groupes. L'un a pu bénéficier d'un bon repos de 7 heures de sommeil, tandis que l'autre a été maintenu éveillé par de gentilles secousses.

Résultat : le nombre d'épines dendritiques, et donc de connexions neuronales, était plus faible pour le groupe privé de sommeil.

Dans une autre expérience, les chercheurs ont testé si un sommeil plus tardif, permis après les 7 heures où les souris avaient été maintenues éveillées, pouvait compenser le manque de sommeil. La réponse est non : le nombre de connexions est resté plus faible que pour les souris ayant dormi dans les 7 heures suivant l'apprentissage.

Ces dernières se sont d'ailleurs montrées plus performantes que les autres lorsque les chercheurs les ont conduites à refaire leur numéro d'équilibriste sur les baguettes en rotation.

Ces résultats suggèrent donc que le sommeil contribue bien à la formation et au maintien de nouvelles connexions entre les neurones ainsi qu'à la consolidation de la mémorisation et de l'apprentissage des exercices. Mais la question principale reste en suspend : par quel mécanisme le sommeil agit-il sur la formation de ces connexions ?

Les neurones répètent leur leçon

Pour le comprendre, il faut revenir au sommeil en lui même. Il se décompose en deux grandes périodes : le sommeil paradoxal, caractérisé par des mouvements rapides des yeux, et le sommeil profond. Pendant ce dernier, le plus réparateur, le cerveau est traversé par des ondes lentes. Mais, contrairement à ce qu'il y paraît, ce sommeil n'est pas de tout repos pour les neurones ! Ils se réactivent et rejouent alors ce qu'ils ont appris la journée.  

Or, lorsque les chercheurs ont perturbé ce sommeil profond après l'apprentissage, le nombre de connexions neuronales des cerveaux de souris a diminué. Voilà qui montrerait donc que le sommeil profond, pendant lequel les neurones répètent ce qu'ils ont appris, améliore la mémorisation. Finalement, ils ne font ni plus ni moins que de répéter les connaissances comme pour les graver. Comme on le fait petit avec une leçon de grammaire ou les tables de multiplication.

Source : Sleep promotes branch-specific formation of dendritic spines after learning. Science 6 June 2014. Doi : 10.1126/science.1249098

VOIR AUSSI :