Suis-je éjaculateur précoce ?

Il existe sûrement des questions que vous n'avez jamais osé poser, par pudeur, crainte, voire même honte... Aujourd'hui, il est question d'une nouvelle question embarassante sur l’éjaculation précoce, pour savoir à partir de quelle durée de coït on peut considérer qu'on est éjaculateur précoce ?

Mélanie Morin
Rédigé le , mis à jour le

Lorsqu'on fait une recherche sur Internet avec le mot éjaculation, on tombe sur "problème prostate""contrôle arnaque""psa""féminine""précoce"…l’éjaculation précoce génère plus de 12 millions de résultats. Désormais, on parle plutôt "d’éjaculation prématurée"

Un sondage IFOP mené le mois dernier sur près de 2 000 hommes révélait que 71% d’entre eux estimaient avoir éjaculé trop vite au cours d’un coït ces 12 derniers mois. C’est basé sur le ressenti des hommes interrogés donc c’est un sondage assez subjectif et en plus si ce n’est arrivé que lors d’un seul coït ce n’est pas très parlant. Les sociétés savantes estiment que l’éjaculation prématurée concerne entre 20 et 30% des hommes.

Comment l’éjaculation  se produit-elle ? 

L'éjaculation survient lorsque l’excitation sexuelle atteint son point culminant lors du rapport. L’homme ressent alors l’imminence de l’éjaculation et passé un certain seuil, il est compliqué de faire marche arrière, le réflexe est enclenché. Dans les testicules on trouve de petits tuyaux, les canaux déférents, dont vont partir les spermatozoïdes. Ces spermatozoïdes cheminent dans ces canaux jusqu’à rejoindre la prostate où ils se mêlent au liquide séminal. Ce mélange est ensuite expulsé vers la base de l’urètre. Les muscles du périnée, situés entre le pénis et l’anus, se contractent et le sperme est enfin expulsé via un petit orifice appelé méat. C’est important de préciser que l’éjaculation n’est pas toujours synonyme d’orgasme, elle est avant tout un réflexe physiologique parfois difficile à contrôler.

Critères de l'éjaculation  précoce/prématurée ?

On parle "d’éjaculation prématurée primaire" quand elle a toujours eu lieu. On la distingue de "l’éjaculation prématurée acquise" qui elle, survient après que l’homme ait connu une éjaculation normale. Parfois c’est dû à un problème médical ou une difficulté psychologique. Il existe des données précises sur ces deux problématiques, selon la société de médecine sexuelle, l’éjaculation prématurée primaire survient dans un délai  de moins d’une minute chez 80% des hommes concernés alors que l’éjaculation prématurée acquise, survient dans un délai un peu plus long, à moins de trois minutes.

Attention, ces données ne font pas tout, les urologues-andrologues le répètent, ce qui compte c’est le ressenti du couple, la façon très personnelle dont ils vivent leur sexualité. Si les partenaires ne se plaignent pas de la concision des rapports, alors il n'est pas nécessaire de se tracasser. Par contre, si l’éjaculation prématurée provoque un stress, notamment chez l’homme qui va ruminer, anticiper les rapports de façon négative voire les éviter, dans ce cas, bien sûr il est important de consulter un andrologue-urologue ou médecin sexologue.  

Quelle prise en charge ? 

Il faut absolument consulter un médecin traitant qui orientera peut-être vers un andrologue-urologue s’il estime qu’il faut examiner  certains paramètres physiques. Les spécialistes sollicités, rappellent que différents facteurs peuvent favoriser l’éjaculation prématurée : une inflammation de la prostate, une infection sexuellement transmissible, une hyperthyroïdie, le sevrage de certains médicaments. En parallèle, il faut tenir compte d’éventuels facteurs psychologiques, de l’anxiété qui s’est installée au fil des années. S’il n’y a pas de cause formellement établie, les praticiens préconisent en premier lieu des techniques de relaxation pour faire baisser le niveau de pression, il peut s’agir de sophrologie ou d’hypnose.

Au moment du rapport il convient aussi de ralentir le rythme, d’effectuer des mouvements plus lents, de faire une pause dès que la température monte. Dans cet esprit, les célèbres William Masters, gynécologue et Virginie Johnson, psychologue, pionniers américains de la sexologie dans les années soixante, ont développé la technique du "stop and go" consistant à stimuler le pénis jusqu’à ressentir les prémices de l’excitation maximale et de stopper à ce moment-là.

L’objectif est de prendre conscience de ces signes annonciateurs pour mieux les contrôler.
L'article de notre sexothérapeute Charlotte Tourmente sur allodocteurs.fr "Ejaculation prématurée : conseils pour elle et lui ?" évoque notamment le "squeeze", qui consiste à "presser" la pointe du pénis au moment où vous sentez que l’excitation atteint son point de non-retour pendant 30 secondes, ça calme le jeu, avant de reprendre le coït.

Le choix de la position sexuelle peut aussi jouer. Par exemple lorsque la femme est assise sur l’homme en position d’Andromaque, c’est elle qui donne le rythme et certains hommes y sont moins sensibles.

La sexothérapeute rappelle également qu’il est préférable d’avoir des rapports plutôt que de les éviter parce que l’éjaculation survient à priori moins rapidement quand on a déjà éjaculé auparavant.
En dehors des rapports, vous pouvez aussi vous entraîner à contracter et relâcher le périnée pour renforcer le plancher pelvien et ainsi travailler sur votre capacité à contrôler l’éjaculation. 

Médicament spécifique pour l’éjaculation  prématurée 

Il y a quelques années sur le marché français, on a observé l’arrivée d’un médicament, la dapoxétine, c’est le nom de la molécule (illustre ?) qu'on trouve en pharmacie depuis 2013. Il s’agit d’un inhibiteur de la recapture de la sérotonine mais qui n’est pas considéré comme un antidépresseur car son mode d’action est rapide. Le médicament est à prendre une heure avant le rapport sexuel et il agit pendant plusieurs heures.

Les études d’évaluation d’efficacité ont montré qu’il multipliait par trois ou quatre le délai menant à l’éjaculation. Ce traitement est incompatible avec la prise d’autres antidépresseurs et contre-indiqué chez les personnes présentant des maladies du foie, du coeur, des troubles bipolaires et épileptiques. Il est délivré sur prescription médicale et n’est pas remboursé par la Sécurité sociale. Sa prise nécessite de bien évaluer le bénéfice-risque pour le patient et d’évaluer ses effets au bout d’un mois d’utilisation. La dapoxétine ne guérit pas l’éjaculation précoce mais permet de la retarder, le temps pour le patient de reprendre confiance et de mettre en place des astuces pour vivre une sexualité plus épanouie. Une étude a montré sur un groupe de patients que la combinaison "médicament/thérapie cognitive et comportementale" donnait les meilleurs résultats donc il ne faut surtout pas négliger l’accompagnement psychologique.

Ne pas appliquer n’importe quoi sur son pénis

Sur le web des vidéos ont circulé pour évoquer une pratique surprenante : l’application de dentifrice sur le pénis pour retarder l’éjaculation.  Peut-être qu’on imagine que le menthol contenu dans certains dentifrices peut donner un petit coup de frais qui fera tenir plus longtemps… Les médecins estiment qu’au mieux ça ne fera rien du tout, au pire ça peut être irritant pour les muqueuses sensibles.
Sachez qu’il existe des gels anesthésiants spécialement conçus à cet effet, qui pourront vous être conseillés par le médecin, c’est plus prudent, ou des préservatifs spécifiques pour atténuer un peu les sensations.

 

N'hésitez pas à envoyer vos questions gênantes par mail : melanie@allodocteurs.fr