Intestin irritable : le régime FODMAP, une solution ?
Pour un meilleur confort intestinal, il est parfois proposé aux personnes qui souffrent d'un syndrome de l'intestin irritable d'adopter un régime FODMAP. Mais de quoi s'agit-il et comment le mettre en place ?


Ballonnements, douleurs intestinales et troubles du transit... Le syndrome de l'intestin irritable, ou colopathie fonctionnelle, altère le confort quotidien de 10 à 20% de la population.
Une récente étude publiée en juin 2024 validerait à nouveau l'efficacité du régime alimentaire, développé depuis 2005. Ce régime dit FODMAP consiste à adopter une alimentation pauvre en FODMAP, des sucres de petite taille facilement fermentescibles c’est-à-dire qui peuvent entrer en fermentation, dans l’intestin et jouer un rôle dans les douleurs et les ballonnements. Selon cette étude, les patients traités par régime FODMAP ont vu la sévérité de leurs symptômes diminués de 70%, contre 58% pour les patients traités par médicament.
Est-ce la fin des soucis intestinaux ? Les explications avec le Dr Catherine Serfaty-Lacrosnière.
Régime FODMAP : qu'est-ce que c'est ?

Qu'est-ce que le régime FODMAP ?
Dr Catherine Serfaty-Lacrosnière : "Il ne s'agit pas d'un guide touristique gastronomique. Le terme FODMAP décrit l'ensemble des sucres, oligosaccharides, disaccharides, monosaccharides et polyols qui sont fermentescibles par la flore intestinale. Chimiquement, ce sont des sucres à chaîne courte qui sont peu absorbés par l'intestin. Ils entraînent les symptômes de l'intestin irritable par deux phénomènes. D'une part, ils exercent ce qu'on appelle un effet osmotique, c'est-à-dire qu'ils attirent de l'eau dans la lumière intestinale. Cette augmentation hydrique augmente le volume des selles. D'autre part, ils sont rapidement fermentés par les bactéries de la flore intestinale et produisent ainsi des gaz intestinaux.
"En choisissant de réduire ces sucres qui fermentent, on assiste véritablement à une amélioration de la situation intestinale chez les personnes qui souffrent de colopathie. C'est en tout cas ce qu'indiquent plusieurs études, dont une étude parue en 2013 dans l'American Journal of Gastroenteroly et que l'on doit à une équipe australienne, sous la direction de Peter Gibson de l'université Monash, qui a repris les études existant sur le sujet. ((Am J Gastroenterol 2013; 108:707–717; Short-Chain Carbohydrates and Functional Gastrointestinal Disorders. Susan J Shepherd, Miranda C E LomerPeter R Gibson.)
Depuis de nombreuses années, on propose aux patients colopathes de supprimer le lactose. Est-ce le cas du régime Fodmap ?
Dr Catherine Serfaty-Lacrosnière : "Le régime Fodmap est en quelque sorte une généralisation du régime sans lactose. Le lactose est le sucre du lait, un sucre à chaîne courte, fermentescible. Il n'était d'ailleurs pas le seul sucre dont on supposait une éventuelle intolérance au niveau digestif. Le fructose et le sorbitol étaient également suspectés d'intolérance.
"Le régime Fodmap propose d'élargir à tous les sucres à chaîne courte responsables de fermentation ; des sucres que l'on trouve principalement dans certains fruits et légumes, des légumineuses, des produits laitiers et des édulcorants. Il s'agit d'une diète pauvre en sucres fermentescibles, mais pas d'une éviction totale."
En quoi consiste le régime Fodmap au quotidien ?
Dr Catherine Serfaty-Lacrosnière : "Il est difficile de gérer ce régime seul. Les auteurs de l'étude conseillent de faire appel à un nutritionniste ou un diététicien car la liste des recommandations est longue. Pour simplifier, classons les aliments en grandes catégories. Pour limiter les signes intestinaux, il est recommandé de diminuer la consommation de :
- Lactose, contenu dans les produits laitiers, à part les fromages à pâte dure qui n'en contiennent pas. Donc il faut éviter le lait de vache, de chèvre, de brebis, les laitages et les fromages à pâte molle.
- Fructose en excès, un monosaccharide contenu dans les pommes, poires, pastèques, melons, miel... quand on les consomme en excès mais également caché dans les produits du commerce. Regardez les étiquettes nutritionnelles qui parle de sirop de glucose-fructose...
- Galacto-oligosaccharides contenues dans les légumineuses telles que les pois chiches, les lentilles ou les haricots rouges...
- Fructanes : des choux, fenouil, poireau, artichaut souvent déjà connus des colopathes pour leur mauvaise tolérance, oignon, échalote, les céréales blé et seigle surtout consommées en grande quantité et des fruits comme le melon d'eau ou le kaki. Un mot important, il ne s'agit pas d'une intolérance au gluten mais aux fructanes, les sucres, du blé.
- Polyols, sorbitol, maltitol, mannitol, xylitol…. Ces sucres non digestibles se trouvent dans les pommes, les poires, beaucoup de fruits d'été, nectarine, pêche, abricot, dans les champignons, le chou-fleur, le poivron vert mais également sous forme d'édulcorants, présents aussi dans les chewing-gums dits sans sucres.
Comment doit-on procéder ?
Dr Catherine Serfaty-Lacrosnière : "Les auteurs de la diète pauvre en Fodmaps proposent de limiter fortement la consommation de ces aliments pendant six à huit semaines. Puis, ils réintroduisent un groupe d'aliments par semaine, les légumineuses par exemple en les consommant au moins deux fois dans la semaine. S'ils sont bien tolérés et qu'aucun symptôme digestif ne réapparait, on essaie un autre groupe d'aliments la semaine suivante. En revanche, si les aliments entraînent de nouveau des signes intestinaux, il faut attendre un retour à la normale pour tester à nouveau ce même groupe mais en diminuant la quantité ingérée de moitié."
Comment gérer la phase d’éviction et que choisir pour garder une alimentation variée ?
Dr Catherine Serfaty-Lacrosnière : "L'alimentation ne doit pas être restrictive. Il reste de nombreux choix d'aliments. Il ne faut limiter que les sucres qui fermentent et ce, pour une période transitoire. Il reste toutes les protéines animales, viandes, poissons, fruits de mer, oeufs et fromages à pâte dure. On trouve les glucides dans les pommes de terre, le riz, le quinoa ou les pâtes sans gluten.
"Il y a des fruits et des légumes, pour ne citer que les carottes, les courgettes, les haricots verts ou encore les bananes, le pamplemousse, les clémentines et autres fruits rouges. Les acides gras sont présents dans les amandes et les huiles végétales. Enfin, on sucrera si nécessaire avec un peu de sirop d'érable. Et on peut utiliser les édulcorants à condition qu'ils ne se terminent pas par -ol."
Quels sont les résultats attendus ?
Dr Catherine Serfaty-Lacrosnière : "On parle d'environ 75% d'amélioration de la symptomatologie digestive. Cela veut également dire que pour 25% des colopathes, la diète pauvre en fodmaps risque d'être insuffisante car il existe d'autres étiologies. Manger trop rapidement en avalant de l'air ou les périodes de stress favorisent aussi le syndrome de l'intestin irritable."
Régime Fodmaps : les aliments à favoriser
Les légumes
Blettes, carottes, courgettes, céleri, haricots verts, laitue, panais, patates douces, tomates, concombres, coeurs de palmier, endives, épinards, potiron, navets, courges, aubergines, poivrons, gingembre
Les féculents et céréales
Les pommes de terre (ni frites, ni sautées), le riz, le quinoa, l'avoine, le sarrasin, les pâtes sans gluten, les produits à l'épeautre (ex : farine), le millet, le sorgho, le tapioca, l'amarante, la polenta
Les protéines
Viandes (boeuf, porc, poulet), poissons, crustacés, oeufs, tofu (en petite quantité).
Les fruits
Bananes, pamplemousse, kiwi, raisin, citron, citron vert, mandarines et clémentines, oranges, fruits de la passion, ananas, rhubarbe, melon, framboise, fraise, myrtilles, canneberges, noix de coco, anis étoilé
Herbes, épices et aromates
Toutes les herbes aromatiques (basilic, coriandre, ciboulette, citronnelle, menthe, persil, thym, origan, marjolaine, romarin...), gingembre, anis étoilé, olives, moutarde.
Les sucres et édulcorants
Les édulcorants artificiels ne se terminant pas par –ol, glucose, sirop d'érable, sucre intégral (mélasse), sucre blanc, sucre roux, cassonade, stuvia. Ces sucres doivent néanmoins être utilisés en petites quantités.
Les oléagineux et les huiles
Graines de courge, amandes (pas plus de 10), huile d'olive, noix, pignons de pin, cacahuètes, chia, noix de pecan, noisettes, sésame, noix
Les produits laitiers
Produits laitiers sans lactose (laits végétaux : amande, riz.. et yaourts sans lactose, soja par exemple), fromages pauvres en lactose (pâte dure affinée, brie, camembert, cheddar, feta, mozzarella, parmesan), beurre végétal, boissons de riz, glaces à l'eau et sorbets.
Boissons et alcool
Café, thé, jus de fruits maison, bière, vin, whisky, vodka, gin.
Régime Fodmaps : les aliments à limiter
Les légumes, les fruits
Champignon, chou-fleur, brocoli, betterave, fenouil, oignon, ail, échalote, poireau, artichaut, asperge, pois mangetout, maïs, chicorée, pissenlit, pomme, poire, pastèque, nectarine, pêche, abricot, kaki, cerise, mûre, groseille, mangue, prune.
Les céréales
Blé en excès, sous toutes ses formes, seigle, semoule, orge.
Les légumineuses
Pois chiches, lentilles, haricots rouges, fèves, flageolets....
Produits laitiers
Lait de vache, lait concentré, poudre de lait, ricotta, yaourt, fromages blancs, petits suisses, faisselles, crèmes desserts, glaces, fromages à pâte molle non affinée, beurre.
Sucres et édulcorants
Fructose en excès, sirop de glucose-fructose, sirop de mais, miel, mannitol, sorbitol, maltitol, xylitol.
Divers
Chewing-gums et sucreries aux polyols, pistaches, plats préparés avec sauce, bouillons.
Boissons et alcool
Jus de fruits du commerce, sodas, cidre, rhum, vin cuit.
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· Ameli.fr
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· Vidal
· Société Nationale Française de Colo-Proctologie (SNFCP)