Syndrome de l'intestin irritable : et si la gravité était en cause ?

Le syndrome de l'intestin irritable est une affection qui touche 10% de la population. Selon une récente étude, la gravité pourrait être impliquée dans cette pathologie. On vous explique.

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
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Si les systèmes nerveux, gastro-intestinal et cardiovasculaire ne parviennent pas à gérer la gravité, cela provoque des symptômes du syndrome de l'intestin irritable.
Si les systèmes nerveux, gastro-intestinal et cardiovasculaire ne parviennent pas à gérer la gravité, cela provoque des symptômes du syndrome de l'intestin irritable.  —  Shutterstock

Il y a plus de 3,5 millions d'années, l'humanité prenait un tournant décisif grâce à la bipédie. La station verticale, en libérant les mains, contribue au développement des êtres humains.    

Mais d'après une étude récente publiée dans The American Journal of Gastroenterology, elle serait aussi susceptible de contribuer au syndrome de l'intestin irritable. Encore mieux, l'hypothèse de la gravité permettrait de relier les différentes théories existantes. 

Une seule cause ou plusieurs explications ?

Depuis quelques années, des chercheurs ont émis différentes hypothèses pour expliquer le syndrome de l'intestin irritable. Pour certains, ce serait un trouble des interactions entre le cerveau et les intestins ou de la motricité des intestins. Pour d'autres, le syndrome est lié à l'état du microbiote, à une hypersensibilité intestinale, à un niveau anormal de sérotonine, ou encore à une dysrégulation du système nerveux autonome.   

"Il y a tellement d'explications que je me demande si elles ne pourraient pas être simultanément vraies, estime Brennan Spiegel, auteur principal de l'étude. Quand je pense à chacune des théories, je réalise à quel point elles pourraient toutes revenir à la gravité, un facteur unifiant. Aucun doute que cela semble assez étrange au départ mais au fur et à mesure que j'ai développé l'idée auprès de collègues, cela a commencé à prendre sens !"

Douleurs, crampes, maux de dos...

D'après les auteurs, les intestins, le cerveau et les systèmes nerveux et cardiovasculaire sont constamment tirés vers le bas du fait de la gravité. L'évolution a permis de sélectionner des systèmes de support dans le corps humain, qui ont maximisé les chances de survie dans un monde régi par la gravité.

Mais si les systèmes nerveux, gastro-intestinal et cardiovasculaire ne parviennent pas à la gérer, cela provoque des douleurs, des crampes, une transpiration, une tachycardie ou encore des maux de dos. Or ce sont tous des symptômes provoqués par le syndrome de l'intestin irritable. Ils pourraient également participer à la pullulation bactérienne, autre phénomène lié au syndrome.

D'où la théorie à première vue farfelue des chercheurs : l'intestin irritable résulterait d'une inadéquation des structures de soutien, mises en place pour lutter contre la gravité.

La gravité, au croisement des différentes théories ?

La gravité pourrait pousser les organes à se déplacer vers le bas du fait d'un système de soutien plus "extensible". Elle peut aussi comprimer la moelle épinière et diminuer la souplesse. Et si les structures de support échouent à assumer leur tâche, s'ensuivent les symptômes de l'intestin irritable et des troubles musculo-squelettiques.   

Pour le chercheur, plusieurs raisons vont dans le sens de sa théorie. Le système nerveux aurait lui aussi évolué en fonction de la gravité, raison pour laquelle les intestins sont riches en neurones et que des "papillons dans le ventre" sont ressentis en cas d'anxiété.   

Une variabilité individuelle entre également en jeu : les personnes sont plus ou moins résistantes à la gravité. Certaines adorant les montagnes russes tandis que d'autres seront terrifiées. Serait aussi en cause une régulation anormale de la sérotonine, une hormone produite à 95% dans certaines cellules de l'intestin. Elle assure la sensation de bien-être mais intervient surtout dans les processus impliqués dans l'humeur, la douleur et l'alternance veille/sommeil.

D'autres travaux sont évidemment requis pour vérifier l'hypothèse des chercheurs.      

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