Violences sexuelles : une ligne téléphonique pour aider les victimes

La Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) a lancé le 21 septembre une plateforme téléphonique pour recueillir la parole des victimes et de leurs proches.

Delphine Renault
Rédigé le , mis à jour le

Sébastien a 41ans, il a une démarche tranquille et assurée qui ne laisse paraître aucune trace des violences qu’il a subies durant son enfance. Pourtant, comme plus de 6 millions de français, il a été victime d’inceste.  

"De 11ans et demi à 16 ans, j’ai été violé par un membre de ma famille, le mari de ma cousine qui avait autorité sur moi puisque mes parents avaient entièrement confiance en lui. Il fallait que je parte avec lui et que je rentre avec lui sur des répétitions de musique, soit des entrainements de rugby. Ce que ne savaient pas mes parents, c’est que 5 minutes avant de me ramener, il me violait et 5 minutes après il prenait le café avec mes parents", confie Sébastien Boueilh.

Inceste : séisme et division de la famille

Pendant 18 ans, Sébastien a vécu avec la honte et la culpabilité. Quand il décide de se livrer, sa parole est libératrice mais crée un véritable séisme dans sa famille.  

"Quand on parle dans la famille, on dérange, on est le caillou dans la chaussure comme je le dis souvent mais voilà c’est comme ça. C'est pour ça qu’aujourd’hui quand on aide une victime on aide aussi les victimes collatérales. Bien sur mes parents font encore parti du cercle familial, mon père et ma mère.
Je me suis éloigné de ma soeur et de tous mes cousins et cousines quasiment et mes oncles et tantes pareil parce qu'ils ont préféré fuir le sujet plutôt que de me soutenir"
, explique Sébastien. 

Malgré tout, parler a été bénéfique pour Sébastien. Pour cet ancien rugbyman, briser le tabou de l’inceste est devenu un combat qu’il mène aux cotés d'autres victimes. Il est engagé auprès de la commission sur l’inceste et rencontre Emmanuelle Piet qui gère la nouvelle plateforme téléphonique créée pour recueillir la parole des victimes. 

Une plateforme téléphonique

"On a beaucoup de personnes entre 50 et 70 ans qui parlent pour la première fois, qui ont vraiment envie d’expliquer tout ce qu’ils ont vécu, ressenti etc. On a aussi des personnes qui appellent après une grande amnésie traumatique avec tous les symptômes qui sont en l’état. Pour nous, ce qui est le plus compliqué ce sont les personnes qui essaient de protéger des petits enfants en ce moment", commente le Dr Emmanuelle Piet, présidente du collectif féministe contre le viol.

Les écoutantes sont formées aux violences sexuelles. Elles prennent le temps de recueillir les nombreux témoignages et n’hésitent pas à conseiller les victimes. 

"Ça va être une écoute active, on va vraiment échanger parfois rebondir, éventuellement réorienter s'il y a un besoin psychologique, s'il y a un besoin de juristes, d’autres associations... Cela va vraiment être de cette manière-là notre accompagnement, "on est de votre côté, on vous croit", explique Audrey.

A ce jour, plus de 4200 témoignages

Le recueil de ces témoignages va aussi permettre à la commission sur l’inceste et des violences sexuelles de proposer des solutions pour mieux protéger les enfants.  

"Cette commission est un bon point pour augmenter les niveaux de conscience. Il faudrait que quand un enfant dit qu’il est victime de viol, cela soit pris en compte et qu’on arrête de penser que les enfants mentent, que les mères manipulent les enfants, que ce sont des fantasmes. Tant que la société sera indifférente à ça, les politiques le seront", conclut le Dr Emmanuelle Piet.

Cette ligne téléphonique est ouverte pour 2 ans, depuis son ouverture, elle a déjà recueilli plus de 4200 témoignages.