Ordonnances : on vous dit tout sur leur mode d'emploi

Comment bien lire une ordonnance ? Combien de temps est-elle valable ? Est-ce que le pharmacien peut vous dépanner si vous n’avez pas d’ordonnance ? Les réponses de notre journaliste Maroussia Renard.

Maroussia Renard
Rédigé le , mis à jour le

Chaque jour, 4 millions de Français passent la porte d’une pharmacie, pour la plupart avec une prescription. Mais une ordonnance, c’est presque une langue à part. Au début aucun problème, il y a le nom du médecin, son numéro d’identification, la date, le nom et le prénom du patient, son poids, notamment si c'est un enfant et la signature du médecin, sinon l’ordonnance n’est pas valable.


Cela se complique avec le nom des médicaments. En théorie, les médecins sont obligés de prescrire en DCI, c’est-à-dire avec le nom de la substance active en 1er et ensuite éventuellement le nom commercial. Par ex, le médecin est censé écrire Amoxicilline (antibio) et ensuite Clamoxil.

Tous les médecins ne se sont pas encore convertis à cette règle pourtant, c’est très utile, surtout pour le pharmacien. Si le médicament prescrit n’est pas disponible, il pourra trouver un médicament identique sans perdre de temps à chercher ce qui correspond au nom de marque.

Dernier élément, le prescripteur doit préciser à chaque ligne  la dose, le moment des prises et la durée du traitement. Ex  : 1 sachet dans un verre d’eau le matin pendant 10 jours. 

Des abréviations que les patients ne comprennent pas forcément

Petit glossaire  :

  • AR = à renouveler.
  • QSP = quantité suffisante pour X jours ou mois.
  • NR = non remboursable.
  • NS = non substituable, le plus connu. Cela signifie que le médecin ne souhaite pas que le médicament soit remplacé par le générique.
    Depuis janvier, il y a de nouvelles règles, le médecin ne peut plus se contenter d’écrire NS. Il doit justifier son choix et il n’existe que 3 raisons valables. 
  • Ce qui se traduit par 3 nouvelles abréviations :
  • MET = médicament à marge thérapeutique étroite (antiépileptiques, hormone thyroïdienne). 
  • EFG = médicament prescrit à un enfant de moins de 6 ans . Si aucun générique n’a la même forme que le princeps (ex  : sirop).
  • CIF = contre-indication formelle. Par ex, allergie à un excipient présent dans tous les génériques.

Manifestement, ces nouvelles règles ne sont pas encore très suivies par les médecins. 

Près de la moitié des ordonnances sont encore faites à la main 

Le déchiffrage peut être plus compliqué… Les pharmaciens sont un peu les Champollions des temps modernes. C’est un poncif de dire que les médecins ont une écriture imparfaite.

1er exemple. Quel est le médicament entouré en rouge  ? 

  • Réponse  : Biocalyptol, sirop antitussif (le pharmacien a hésité avec Birodogyl/Bricanyl).

2ème exemple :

  • Réponse : Levothyrox (le pharmacien a cru à du Spasfon Lyoc/Seroplex). Ça ne fait pas rire les pharmaciens, ils perdent beaucoup de temps à déchiffrer ces hiéroglyphes et à téléphoner aux médecins… Si le médecin exerce à l’hôpital, c’est très compliqué. Cela peut aboutir à des confusions graves , il y a régulièrement des cas rapportés par la presse médicale . Par ex, un patient à qui on a donné un neuroleptique injectable à la place d’un anti-inflammatoire, il a eu de graves séquelles, 9 mois d’ITT (Incapacité temporaire totale) ! 

Combien de temps une ordonnance est-elle valable  ? 

Pour une ordonnance classique, la règle générale est que vous avez 3 mois maximum pour aller chercher les médicaments à la pharmacie.


Pour un traitement chronique renouvelable (diabète…) l’ordonnance est valable 1 an mais à condition que la 1ère délivrance soit faite dans les 3 premiers mois. En sachant que le pharmacien n’a pas le droit de vous délivrer vos médicaments pour 3 mois d’un coup, il faut y retourner chaque mois.

Il existe deux exceptions, s’il existe un conditionnement trimestriel ou en cas de départ à l’étranger de plus d'un mois. Le médecin doit le préciser sur l’ordonnance et il faut demander l’accord de la Sécu. 

Si l'ordonnance est expirée, le pharmacien peut-il dépanner  ? 

Il n’a pas le droit, sauf dans deux cas. Si vous avez un traitement chronique et que vous n’avez pas eu le temps de revoir le médecin, le pharmacien a le droit de vous dépanner pour éviter une interruption qui pourrait nuire à votre état de santé (ex  : anticoagulant). Mais il ne peut vous avancer qu’une seule boîte par ligne de médicament et le plus petit conditionnement.

C’est interdit pour les psychotropes (antidépresseurs, somnifères…). Autre exception, la pilule. Si votre ordonnance est expirée mais qu’elle date de moins d’un an, le pharmacien peut vous la délivrer mais attention, ça ne marche qu’une seule fois  ! 

Vous n'avez aucune ordonnance  ? 

Ça nous est tous arrivé de supplier le pharmacien de nous donner un médicament sans avoir d’ordonnance, un dimanche par exemple. Certains acceptent mais ils sont en quelque sorte hors-la-loi. Cela va changer.

Un article de la Loi santé applicable au 1er janvier prévoit que les pharmaciens puissent délivrer certains médicaments pour dépanner le patient en cas d’urgence. Ce sera uniquement pour quelques pathologies bégnines bien définies  : conjonctivite, cystite… et ce sera très encadré .

Les pharmaciens devront être formés, ils auront l’obligation de vous faire un interrogatoire précis. Bref cette mesure va s’accompagner de textes réglementaires et autres protocoles officiels, or ça n’est pas prêt. Il va falloir encore patienter un peu. Mais c’est plutôt une bonne nouvelle de se dire que des patients avec une conjonctivite ne seront plus obligés d’aller encombrer les urgences juste pour une ordonnance de collyre…