Harcèlement à l’école : « un impact très fort, notamment sur la santé mentale »

Selon plusieurs enquêtes, le harcèlement scolaire toucherait 10% des élèves. Et parmi eux, plus de la moitié seraient victimes de cyberviolence.

La rédaction d'Allo Docteurs
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C’est la hantise de nombreux parents : découvrir que son enfant est harcelé à l’école. Il faut alors en discuter avec lui et prendre contact avec la direction de l’école. Dans certains cas, l’intervention de la protection de l’enfance est nécessaire. Les explications du Dr Agnès Gindt-Ducroc, directrice de l’Observatoire national de la protection de l’enfance.

  • Comment peut-on définir le harcèlement ?

Dr A. Gindt-Ducroc : "Le harcèlement n’est pas à confondre avec toute forme de violence. C’est bien sûr de la violence. Mais, les deux points qui font harcèlement, c’est d’une part des phénomènes de domination, des dominants qui font subir des choses à d’autres enfants vulnérables, et le deuxième point extrêmement essentiel, c’est la répétition des phénomènes. Ces phénomènes de domination et de répétition mettent les personnes qui subissent dans des situations d’insécurité permanente. Cela a un impact très fort, notamment sur leur santé mentale."

  • A-t-on des chiffres précis sur le harcèlement scolaire ?

Dr A. Gindt-Ducroc : "On estime que c’est environ 10% des enfants qui peuvent être victimes de harcèlement, donc c’est un phénomène fréquent. Du côté du harcèlement verbal et symbolique, on va jusqu’à des 15% des enfants qui peuvent être victimes, dont 8% avec des formes qui peuvent être sévères. Et puis, du côté du harcèlement physique, avec des violences physiques, on est autour de 10%, avec 5% qui peuvent être des formes sévères."

  • Comment l’école doit-elle réagir face à un cas de harcèlement ?

Dr A. Gindt-Ducroc : "L’école n’est pas seule. C’est un phénomène qui concerne d’autres secteurs. Le premier, c’est la famille. C’est absolument essentiel de travailler avec les familles. Et puis, selon ce que subissent les enfants, il y a le secteur du soin. Ils peuvent avoir besoin de prise en charge. Et puis, par ailleurs, ce sont des phénomènes complexes. On sait que des enfants victimes peuvent devenir auteurs. Et puis des auteurs peuvent devenir victimes. On sait qu’il y a des liens forts avec des enfants qui subissent eux-mêmes des violences, notamment des maltraitances intrafamiliales. Il faut analyser ces phénomènes pour voir s’il n’y a pas derrière d’autres phénomènes à prendre en charge. Et là, il faut mobiliser les secteurs de la protection de l’enfance, c’est à dire les conseils départementaux et vraiment travailler dans le cadre des procédures de la protection de l’enfance."

  • Dans quel cas la protection de l’enfance peut-elle être impliquée ? Est-ce toujours quand il y a aussi des violences intrafamiliales ?

Dr A. Gindt-Ducroc : "Il faut vraiment travailler avec les parents. Il faut les entendre parce qu’ils ont souvent des choses à dire et ils ne sont pas toujours très bien entendus. Ensuite, il faut aller mesurer avec les parents quelle est leur capacité à protéger leur enfant. Ils ne sont pas toujours des auteurs de violence. Des études montrent que les enfants victimes de harcèlement ont souvent des parents qui ont aussi été victimes de harcèlement. Il y a vraiment des phénomènes intergénérationnels qui se reproduisent. Donc on peut avoir des parents qui se trouvent en difficulté pour protéger leur enfant. Et en effet, il faut proposer des relais en terme de protection de leur enfant.  Il faut les aider, les accompagner et s’il y a besoin, il faut mettre en place des mesures administratives pour protéger les enfants alors que les parents ne sont pas eux-mêmes violents."

  • Que doit faire un parent dont l’enfant est harcelé ?

Dr A. Gindt-Ducroc : "La première institution qui doit être impliquée c’est bien sûr l’école. Les premières réponses sont des réponses éducatives. Après, il peut arriver que des parents soient totalement désemparés, qu’ils ne soient pas très bien entendus, qu’ils ne sachent pas comment faire… Il y a lors deux numéros vert : celui dédié au harcèlement à l’école le 3020 et le 119 qui est un numéro de protection de l’enfance. Les parents peuvent demander des conseils et ils seront systématiquement guidés."