Un EHPAD lance un appel sur Facebook pour trouver du personnel

En pénurie sévère de personnel, un EHPAD de Haute-Savoie a publié un message d'alerte sur sa page Facebook pour recruter en urgence. Si les bonnes volontés ont accouru, le problème de fond demeure.

Héloïse Rambert
Rédigé le , mis à jour le
Environ 12.500 personnes étaient employées en contrats aidés dans des Ehpad en 2016.
Environ 12.500 personnes étaient employées en contrats aidés dans des Ehpad en 2016.  —  Fotolia : ME

"DEMANDE D’AIDE. Nous avons mobilisé tous les moyens connus de recrutement, mais sans succès sur cette fin de mois. Nous avons donc besoin d’aide pour pouvoir continuer à fonctionner dans les prochains jours #EHPAD EN DÉTRESSE". L’appel au secours est apparu le 21 août dernier sur la page Facebook de l’EHPAD Sillingy Le Bosquet de la Mandallaz (Haute-Savoie).

"Rien à perdre"

En cause, un manque de personnel aigu qui a obligé le directeur de l’établissement à chercher une solution en catastrophe pour les 15 jours à venir. "Le nombre de personnels est toujours un problème. Mais à cette période de l’année, c’est encore plus compliqué. J’avais un étage complet avec zéro soignant. Aujourd’hui, si je n'avais rien fait, il me manquerait la moitié de mon effectif de soignant", admet Eric Lacoudre, directeur de l'EHPAD et représentant pour la Haute-Savoie de l’Association des directeurs aux services des personnes âgées.

Pour remplir son planning de fin d’été, Eric Lacoudre explique avoir tout essayé. Notamment les moyens les plus conventionnels, comme les agences d’intérim. Peine perdue. "On a décidé de publier sur Facebook. On n’avait rien à perdre. »

Le système D au quotidien

Depuis des années maintenant, l’EHPAD de Sillingy manque de bras. Comme partout en France, en raison du peu de moyens financiers alloués au grand âge et de la crise de vocation qui touche le secteur. Mais l’établissement, comme les autres de la Haute-Savoie, subit en plus les effets de sa proximité avec la Suisse, pays qui attire les soignants en raison de ses conditions de travail et salariales ultra-attractives.

Le directeur doit continuellement batailler pour faire tourner les services malgré tout. "Quand on est en mode dégradé, on fait appel aux familles ou à d’autres métier pour aider, explique-t-il. L’homme d’entretien, l’animatrice peut aider à servir le petit déjeuner, à débarrasser la table. Pour que le personnel soignant puisse se dédier exclusivement au soin."

Quelques lits déjà fermés

Il y a 5 mois, l’ EHPAD de Sillingy a dû arrêter d’accueillir de nouveaux résidents, malgré la très longue liste d’attente pour y entrer. Et a même fermé 5 lits sur 84. "On a de plus en plus de mal à s’occuper des résidents qui sont déjà là, continue Eric Lacoudre. On ne peut pas en accepter d’autres sans être sûrs de pouvoir gérer les semaines et mois à venir."

Un élan de solidarité et un "sursis" de quelques mois

Quelques jours après le message de détresse et plus de 4000 partages sur Facebook plus tard, les réponses ont afflué.  "Un très grand merci pour vos appel, vos propositions d’aide, votre mobilisation. Nous traitons vos mails, vos candidatures...Nous avons été débordés d'appels et de mails... ", postait l’établissement aujourd’hui, lundi 26 août.

La majorité des personnes qui ont répondu présent pour un "coup de main" sont des professionnels expérimentés, dont certains travaillent en Suisse. Mais le directeur ne se fait pas d’illusion : si le danger immédiat est encore une fois passé, il ne s’agit là que de court-termisme. La situation a un air de déjà vu. "Déjà il y a 3 mois, quand nous avons fermé l’établissement aux nouveaux résidents, nous avons fait le buzz. Nous avons reçu 50 candidatures, mais nous n’avons pu en retenir qu’une dizaine", se souvient Eric Lacoudre. Aujourd'hui, retour au même point. "C’était un feu de paille."

Un fonctionnement qui reste dégradé

Une partie des personnes venues "boucher les trous" du planning en urgence est aussi jeune et sans expérience. Et les nouvelles recrues ne connaissent pas les résidents, dont 2/3 souffrent d’une maladie d’Alzheimer ou assimilée, et qui ont tous leurs particularités. "La qualité des soins n’est pas la même. Il ne faut pas se voiler la face, c’est évident que les résidents en pâtissent, soupire Eric Lacoudre. Nous faisons ce que nous pouvons. La majorité des familles comprend et vient nous aider. Mais certaines ne comprennent pas et estiment que nos personnes âgées méritent plus de sérieux et d’attention. Et elles ont peut-être raison."