L'éducation thérapeutique : quelle place dans l'asthme ?

L'éducation thérapeutique a gagné ses lettres de noblesse dans les maladies chroniques. L'asthme n'échappe pas à la règle et la qualité de vie des patients bénéficie grandement d'une meilleure compréhension de la maladie, de ses facteurs déclenchants et de ses traitements.

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
L'éducation thérapeutique : quelle place dans l'asthme ?

Connaître sa maladie

L'éducation thérapeutique a pour but de rendre le patient autonome dans la gestion de sa maladie, des crises et de son traitement. Elle doit être proposée à tous les malades par un professionnel de santé, médical ou paramédical. Médecin généraliste ou spécialiste, infirmière, pharmacien, kinésithérapeute et parfois psychologues sont les interlocuteurs privilégiés du patient.

Quatre objectifs ont été déterminés par la Haute Autorité de Santé (HAS) dans un document intitulé Education thérapeutique du patient asthmatique :

  • mieux comprendre la maladie dont on souffre ;
  • maîtriser son traitement ;
  • contrôler son environnement ;
  • pratiquer une activité physique.

Les patients doivent savoir surveiller leur asthme et reconnaître les symptômes indiquant qu'une crise d'asthme est proche. Ils apprennent ainsi à bien mesurer leur DEP, le débit expiratoire de pointe, également appelé peakflow et à adapter la conduite à tenir selon le résultat. Les valeurs normales varient en fonction de l'âge, de la taille, du sexe.

Ainsi en zone verte (affection stable, valeur mesurée entre 80 et 100% de la valeur habituellement observée), le traitement n'est pas modifié ; en zone orange (affection instable, valeur entre 50 et 80%) une modification est nécessaire, en tenant compte du plan de traitement établi avec le médecin : par exemple, la dose des inhalateurs peut être doublée et consulter un médecin est nécessaire si la crise ne passe pas en 30 minutes. En zone rouge (crise d'asthme, moins de 50%), les recommandations sont habituellement de prendre 2 à 4 bouffées avec l'inhalateur et de consulter immédiatement aux urgences.

Le Dr Kierzek conseille ainsi dans une de ses chroniques cette méthode de mesure :

  • placer l'indicateur à zéro ;
  • se mettre en position debout ;
  • respirer à fond ;
  • mettre l'embout dans la bouche et serrer les lèvres pour qu'il n'y ait aucune fuite ;
  • souffler le plus fort et le plus vite possible.

Il précise également qu'en urgence, et en cas d'asthme aigu grave, il ne faut pas forcer la personne à réaliser le peak flow car cela risque d'aggraver la situation.

L'opération est à recommencer deux fois et la valeur la plus élevée est consignée dans le carnet de suivi.  La mesure du DEP est un outil intéressant permettant de suivre l'évolution du débit expiratoire de pointe et le patient y notera également le contexte de survenue des crises et les facteurs qui les déclenchent.

Attention à l'asthme aigu grave

Lorsque les crises deviennent de plus en plus fréquentes, qu'elles réveillent le patient la nuit, que la gène respiratoire est de plus en plus intense et si le DEP est inférieur ou égal à 50%, la situation risque d'évoluer vers une crise d'asthme sévère, qui peut mettre la vie en jeu. Cette crise intense et inhabituelle définit l'asthme aigu grave. Le traitement habituel ne fait pas effet et l'augmentation des doses s'impose ; l'essoufflement est permanent, parler ou marcher est difficile. Un DEP inférieur à 30% de la valeur normale justifie une hospitalisation.

La première action à faire est d'appeler le 15 lorsque l'on a l'impression que la crise est inhabituelle, en cas d'agitation et de sueurs ou de difficultés à parler, lorsque la fréquence cardiaque dépasse 110 pulsations par minute, la fréquence respiratoire 30 cycles par minute. Les extrémités (lèvres, ongles,…) peuvent devenir bleues. Il faut alors suivre le plan déterminé avec son médecin concernant la quantité de traitement à prendre.

L'asthme en deux mots…

4,5 millions de Français souffriraient de cette maladie respiratoire chronique d'après l'association Asthme et Allergies.

Les bronches souffrent d'une inflammation et réagissent de façon exacerbée à certains facteurs, comme les pollens, les poils d'animaux, les acariens, la fumée de tabac,  la pollution,…

L'intensité des symptômes est très variable d'un patient à l'autre.

Bien maîtriser son traitement

Il existe deux types de traitement : le traitement des symptômes au moment des crises, et le traitement de fond, qui agit sur la maladie.

Le traitement de la crise d'asthme

En cas de crise, les bronches se ferment, c'est le "bronchospasme". La respiration devient difficile et sifflante, une angoisse, une difficulté à parler, une toux sèche ou une agitation peuvent survenir. Le traitement de la crise doit permettre à l'air de passer plus facilement et fait appel à des broncho-dilatateurs d'action rapide. Ils agissent sur les bronches en les dilatant et doivent être pris dans les premiers symptômes. Autre type de médicament à prendre en comprimés le plus souvent : les corticoïdes qui agissent sur l'inflammation des bronches. Ils ont une place de choix dans le traitement de fond mais peuvent être utiles en cas de crise grave.

Mais ces inhalateurs ne sont efficaces qu'à une condition, s'en servir correctement (voir la vidéo du Dr Kierzek).

Dans sa chronique le Dr Kierzek rappelle la façon de se servir de l'aérosol : "Chaque inhalateur a un mode d'emploi particulier mais globalement il faut bien secouer l'aérosol et le tenir verticalement. Après avoir vidé doucement les poumons, inspirer lentement et très profondément par la bouche en déclenchant l'aérosol au cours de la première seconde d'inspiration. Il faut ensuite retenir sa respiration pendant 5 à 10 secondes, puis expirer lentement. Si la crise ne cède pas rapidement, il faut appeler le Samu-Centre 15 en urgence."

La bonne utilisation des inhalateurs se perd parfois avec le temps : une séance de rappel est donc conseillée de temps en temps pour vérifier que les gestes sont toujours bien acquis. Les effets indésirables des béta-mimétiques sont rares, à type de tremblements, d'excitation, de crampes musculaires ou de palpitations cardiaques.

Il y a peu d'effets secondaires avec les corticoïdes oraux et cela permet de bien contrôler la maladie pour 90% des patients

Le traitement de fond

Il vise à contrôler l'asthme et donc à réduire la fréquence des crises, ainsi qu'à conserver des poumons fonctionnant de façon optimale. Il est largement prescrit aux patients souffrant d'un asthme léger, modéré et sévère : seul l'asthme qui se manifeste de façon ponctuelle, ne nécessite pas de traitement au long cours. L'enjeu est de trouver la dose minimale efficace, qui entraîne le moins d'effets secondaires possible.

Pour être efficaces, les médicaments doivent être pris quotidiennement, ce qui est contraignant mais indispensable pour bien contrôler l'asthme. Il peut s'agir de corticoïdes en inhalateurs et parfois en comprimés, de théophylline, d'anti-leucotriènes ou de cromones. En cas d'asthme sévère et résistant au traitement classique, l'omalizumab (un traitement par injection). Des bronchodilatateurs d'action plus lente que ceux utilisés lors de la crise, peuvent être pris quotidiennement pour réduire les symptômes qui surviennent la nuit.

Petite astuce : les distraits peuvent utiliser la fonction "rappel" de leur téléphone ou une application rappelant tous les jours de prendre son traitement.

Contrôler son environnement

Un certain nombre de facteurs peuvent déclencher les crises d'asthme : fumée de tabac, pollens, acariens, poussières, pollution atmosphérique,… Les virus, le stress ou encore le sport sont aussi responsables de crise chez certains patients. Connaître ces facteurs et les repérer à son domicile, sur son lieu de travail, dans tout endroit où l'on se rend, constituent des étapes nécessaires pour prévenir la crise.

Le tabac est bien connu pour faire mauvais ménage avec l'asthme et peut provoquer une crise, mais il n'est pas facile de se libérer d'une addiction, même lorsque l'on sait qu'elle est nocive pour sa santé ! Consulter un tabacologue ou son médecin généraliste offre un soutien souvent indispensable pour un sevrage réussi. En cas de tabagisme passif, certaines mesures permettent de limiter l'exposition (les fumeurs doivent idéalement sortir pour fumer).

L'asthme est le plus souvent d'origine allergique et peut être déclenché par certains allergènes, comme les poils d'animaux, les acariens, les poussières, les moisissures. Ils sont à traquer dans toute la maison et à éliminer. Si un animal est présent et responsable d'un asthme allergique, il vivra idéalement à l'extérieur. A défaut, il sera interdit de séjour dans la chambre et lavé régulièrement. Un brossage régulier se fera à l'extérieur. Bon à savoir : un conseiller médical en environnement intérieur prodigue des conseils personnalisés pour réduire la quantité d'allergènes, après s'être rendu au domicile.

Si les pollens sont en cause, des mesures pratiques limitent les dégâts : aérer son domicile tôt et tard le soir ; secouer ses vêtements à l'extérieur, avant de rentrer chez soi ; ne pas faire sécher son linge dehors durant la saison des pollens ; se laver les cheveux avant de se coucher,…

Autre facteur influençant l'asthme, la pollution : adapter ses activités et ses loisirs lors des pics de pollution, ou s'il fait très chaud est donc primordial pour les patients asthmatiques.

Quelques mesures générales sont également conseillé pour se protéger des gaz de combustion, qui peuvent exacerber l'asthme : dans la cuisine, les plaques électriques sont préférables à la cuisinière à gaz ; durant la cuisson, aérer la cuisine ou utiliser la hotte est recommandé. Dans toutes les pièces du domicile, après des travaux ou une séance de bricolage, aérer permet d'évacuer les composés organiques volatils contenus dans les colles, peintures et vernis.

Pratiquer une activité physique

Si les médecins ont longtemps déconseillé le sport aux asthmatiques car il provoque un spasme au niveau des bronches, ils le recommandent désormais tant que l'on tient compte de sa tolérance. Un traitement préventif (inhalateur avant l'effort) et/ou une adaptation de l'activité autorisent une pratique sereine de l'activité physique.

La sédentarité n'est pas bonne pour un asthmatique car moins il fait de sport, plus il "hyperventile" (respire trop vite) quand il fait un effort, plus les bronches deviennent réactives et enflammées. Cette hyperréactivité des bronches et l'inflammation sont les deux caractéristiques de l'asthme : donc en évitant l'exercice, l'asthmatique rentre dans un cercle vicieux et la crise d'asthme apparaît de plus en plus tôt au cours de l'exercice. Au contraire, l'activité  physique régulière permet de repousser le seuil d'apparition des symptômes, améliore la qualité de vie et le contrôle de la maladie par les médicaments.

Quel sport choisir ?

Seule la plongée sous-marine avec bouteille est formellement contre-indiquée, les autres sports sont possibles en adaptant toutefois son choix à l'intensité de sa maladie. Le pneumologue peut aider à faire son choix.

La natation est recommandée, tout comme l'aquagym, les arts martiaux, le vélo, la marche à pied. En revanche, certains sports  favorisent l'asthme : la course à pied et le cyclisme lorsqu'ils sont pratiqués sur de longues distances, le football, le basket, le rugby,… Tout comme les sports qui se pratiquent dans une atmosphère froide et sèche : le hockey, le patinage, le ski de fond.  Quant à l'équitation, elle peut favoriser le développement d'une allergie (au cheval, à la paille,…).

Bien faire du sport avec un asthme

Un traitement préventif peut être prescrit en cas d'asthme d'effort (voir encadré).

Il est conseillé aux sportifs asthmatiques de soigner leur échauffement, d'avoir toujours le traitement de la crise sur eux, dans la poche idéalement ou dans son sac, et de s'hydrater régulièrement au cours de l'effort puisque la déshydratation favorise la crise. Diminuer progressivement son activité avant l'arrêt complet permet aux bronches de se réadapter à la respiration de repos.

Bien évidemment, le sportif adaptera son activité à sa forme du jour : la fatigue passagère ou une infection nécessitent de diminuer l'intensité du sport.

En hiver, lors des pics de pollution ou de pollen, il peut être avisé de choisir un sport qui se pratique à l'intérieur. Une atmosphère froide et sèche est souvent moins bien tolérée qu'une ambiance chaude et humide, en particulier si la qualité de l'air est mauvaise et si l'air contient des polluants comme le nitrogène, le dioxyde, le sulfure de dioxyde. Une température élevée ou froide, un pic de pollution ou de pollens, une infection respiratoire récente (rhume, grippe) nécessite d'adapter ses efforts : soit en les limitant, soit en les reportant à un jour.

Sources : HAS, Vidal, Medscape, Ameli.fr...

 Qu'est-ce que l'asthme d'effort…

La crise d'asthme survient durant l'effort ou dans les 10 minutes qui suivent son arrêt. Un air froid et sec la favorise, tout comme un effort prolongé.

La crise peut être typique, avec une respiration typique et un essoufflement, une toux ou atypique, se manifestant par une respiration inconfortable. Il faut alors arrêter l'exercice, sous peine de voir la crise s'exacerber, et prendre le médicament qui a été prescrit par le médecin.

Attention, l'asthme d'effort ne contre-indique pas l'activité physique mais nécessite un traitement préventif. pneumologue peut conseiller d'utiliser en prévention 1 ou 2 bouffées une dizaine de minutes avant la pratique sportive.