Dystonies : des contractions involontaires

Des muscles qui se contractent sans pouvoir les contrôler, c'est ce que vivent les personnes souffrant de dystonies. La position et les douleurs qu'entraînent ces contractions sont souvent très invalidantes et nécessitent parfois plusieurs interventions chirurgicales.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Dystonies : des contractions involontaires

Qu'est-ce que la dystonie ?

Marina Carrère d'Encausse et Michel Cymes expliquent les dystonies
Marina Carrère d'Encausse et Michel Cymes expliquent les dystonies

Un torticolis permanent, une main incontrôlable... 70.000 personnes en France sont touchées par une dystonie. Un trouble du tonus musculaire qui se traduit par des mouvements involontaires et anormaux.

La dystonie peut être très douloureuse car elle demande une lutte de chaque instant pour contrôler son corps. Cette maladie entraîne un véritable handicap moteur et social avec parfois l'impression d'être stigmatisé.

On ne connaît pas les origines de la dystonie mais on sait qu'il existe des formes génétiques et donc héréditaires. Ces formes sont les plus rares et des programmes de recherche sont en cours pour identifier les gènes impliqués dans ces formes de dystonie.

Chez un patient atteint de dystonie, les mécanismes de contrôle du mouvement sont déréglés. Et ce dérèglement peut intervenir à différents niveaux. Pour effectuer un mouvement, plusieurs de nos structures cérébrales communiquent. Tout d'abord, le cortex donne l'ordre d'effectuer un mouvement. Il communique avec les ganglions de la base (noyaux gris centraux), des structures au coeur de notre cerveau qui régulent l'ordre dans lequel les muscles se contractent et quels muscles doivent être activés. En cas de dystonie, le dérèglement peut se produire à ce niveau.

Le cortex communique aussi avec le cervelet, une sorte de super régulateur situé à l'arrière du crâne qui code la précision du mouvement. Le codage peut être de mauvaise qualité et provoquer une dystonie. Enfin, le cervelet est aussi relié aux ganglions de la base. La dystonie peut aussi provenir d'un problème de communication entre ces deux structures.

Les recherches les plus récentes semblent montrer que les problèmes de communication entre ces différentes structures cérébrales viendraient d'un problème de synapses et de neurotransmetteurs, des petites molécules qui permettent aux neurones de communiquer et des récepteurs où elles vont se fixer.

Syndrome dystonique : les muscles n'en font qu'à leur tête

Quand les muscles n'en font qu'à leur tête...

Patrick, antiquaire, a dû subir une intervention chirurgicale pour traiter son syndrome dystonique. Il a eu recours au traitement par stimulation cérébrale.

Après cette intervention, les batteries implantées dans l'abdomen du patient doivent être remplacées tous les quatre ou neuf ans, ce qui augmente le coût total de l'intervention. Alors pour trouver des fonds, les malades se mobilisent depuis plusieurs années.

Une dystonie locale : le torticolis spasmodique

La dystonie locale la plus fréquente est le torticolis spasmodique, qui toucherait entre 3.000 et 5.000 Français, majoritairement des femmes. Celui-ci entraîne une torsion permanente du cou.

Comme les origines de la dystonie sont encore l'objet de recherches, il n'existe pas de traitement des causes de la maladie. En revanche, on peut en traiter les symptômes pour essayer de faire diminuer les mouvements anormaux et ainsi améliorer la vie des patients. Le traitement de base consiste en des injections de toxine botulique.

La toxine botulique paralyse les muscles responsables du torticolis. Elle ne traite que les symptômes de la dystonie, elle ne permet pas de guérir. De plus, son action ne dure que quelques mois. Il faut donc répéter l'opération plusieurs fois par an.

Dystonies et chirurgies

Attention, images d'intervention chirurgicale : le chirurgien sectionne le nerf qui commande la contraction du muscle.
Attention, images d'intervention chirurgicale : le chirurgien sectionne le nerf qui commande la contraction du muscle.

Reste que chez 5% des patients, la toxine botulique devient inefficace, car le corps développe des défenses immunitaires contre elle. 20% des patients peuvent alors opter pour une solution chirurgicale.

Une autre chirurgie peut aussi parfois être envisagée : la stimulation cérébrale profonde, aussi utilisée pour traiter la maladie de Parkinson. Dans ce dernier cas, des électrodes sont implantées dans les noyaux gris. Elles vont envoyer des impulsions électriques qui vont contrôler les contractions musculaires et soulager les patients.

Dystonies : le traitement par stimulation cérébrale

Attention images de chirurgie ! Avec la stimulation cérébrale, les résultats sont spectaculaires.
Attention images de chirurgie ! Avec la stimulation cérébrale, les résultats sont spectaculaires.

Il n'existe pas de traitements médicamenteux en cas de dystonie, en revanche on peut opérer.

Une des interventions chirurgicales consiste à implanter des électrodes dans le cerveau des malades. L'objectif de cette stimulation cérébrale est de délivrer un courant électrique destiné à fatiguer les neurones déréglés, les empêchant ainsi de transporter les mauvais influx nerveux. L'opération est divisée en plusieurs étapes.

La liste d'attente pour bénéficier de cette intervention est longue. Chaque mois entre 4 et 10 patients sont opérés à l'hôpital de Montpellier. Mais aujourd'hui, le maintien de cette activité de pointe est en péril à cause d'un manque de moyen et de personnel. L'opération coûte 80.000 euros. Pourtant les résultats sont spectaculaires.

Dystonies : la stimulation magnétique transcrânienne

Pour certains patients touchés par une forme grave de dystonie et qui ne peuvent pas bénéficier de toxine botulique car trop de muscles sont impliqués, un traitement par stimulation cérébrale profonde peut être proposé.

Lors d'une opération chirurgicale délicate, deux électrodes sont implantées au coeur du cerveau du patient. Pour la dystonie, elles sont le plus souvent placées dans la zone du pallidum, une structure cérébrale en forme d'amande qui code l'information de la motricité et son organisation (l'ordre et la séquence d'activation des muscles). En stimulant cette zone avec les électrodes, les médecins essaient de faire disparaître les mouvements involontaires.

La stimulation cérébrale profonde est une méthode très invasive et elle ne peut pas être proposée à tous les patients. Alors pour essayer de trouver de nouveaux traitements, plus efficaces et moins invasifs, mais aussi pour mieux comprendre le fonctionnement de la dystonie, des chercheurs de l'Institut du Cerveau et de la Moelle épinière à Paris étudient une nouvelle forme de stimulation : la stimulation magnétique transcrânienne.

"L'idée de cette recherche est de modifier la plasticité du cortex moteur, donc de modifier la manière dont le mouvement va être codé en espérant qu'il sera mieux codé après la stimulation du cervelet par des petites impulsions magnétiques", explique le Pr Marie Vidailhet, neurologue. Pour le moment, les effets de ce traitement ne durent que quelques heures. Mais dans quelques années, les chercheurs espèrent que grâce à cette méthode, ils pourront corriger durablement le mauvais codage des informations et ainsi mettre au point un nouveau traitement.

Pour beaucoup de patients, le traitement par toxine botulique est indispensable au maintien d'une vie quotidienne à peu près normale. Pourtant, le remboursement de ce traitement est mis en danger suite à la publication d'un décret par le ministère de la Santé il y a quelques mois. Certains patients commencent à recevoir des factures pour ces traitements et certains établissements privés risquent d'arrêter de les pratiquer.