Sportifs, n'abusez pas des anti-inflammatoires !

Avaler un anti-inflammatoire juste avant de faire du sport dans l’espoir d’atténuer la douleur n’est pas si rare chez les sportifs, mais est-ce vraiment une bonne idée ? Les réponses du Dr Jean-Marc Sène, médecin du sport. 

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le

L’automédication se définit comme un acte volontaire de consommation d’un médicament et/ ou d’un complément alimentaire, sans l’avis préalable d’un médecin.

Selon une étude du service de Santé Publique de l’Université de Liège. Près de 30 à 40% des sportifs amateurs fréquentant les clubs de fitness ou joggeurs, prennent des médicaments et/ou des compléments alimentaires sans l’avis d’un médecin.  

En effet, les anti-inflammatoires sont trop largement utilisés dans le milieu du sport. Dans certaines disciplines près de la moitié des athlètes en prennent régulièrement. Cela ne touche pas seulement les sportifs de haut niveau. Dans la population générale, les anti-inflammatoires comme l’ibuprofène, le kétoprofène et autre aspirine, sont également très largement utilisés en automédication. Parfois plusieurs substances sont consommées de façon concomitante.  

Ainsi la consommation est 2 à 4 fois plus importante dans la population sportive toutes catégories confondues que dans la population générale.  

Quels symptômes poussent à utiliser ces médicaments ?

Une étude du service de Santé Publique de l’Université de Liège a rencontré 338 sportifs dans 11 centres de fitness en région liégeoise. Ces sportifs déclarent consommer des médicaments pour lutter contre le mal de tête (42,7 %), l’écoulement nasal (33,3 %), pour contrôler la douleur (27,6 %) ou encore pour lutter contre le mal de gorge (18,7 %).  

Les compléments alimentaires sont davantage consommés pour améliorer l’état de santé (41,8 %), lutter contre la fatigue (37,4%), augmenter la masse musculaire (24,4 %), améliorer les performances (19,5 %) ou encore pour éviter un problème de santé (23 %). 

Des moyens de régulation peu efficaces  

Les motivations des sportifs varient : les effets anti-douleur, voire d’amélioration de performance sont recherchés le plus souvent. 
Ces médicaments sont utilisés sans réel contrôle du fait de la possibilité de les obtenir sans ordonnance et également parce qu'ils ne figurent pas sur la liste des produits interdits édictée chaque année par l’Agence Mondiale Antidopage (AMA).  

Quels sont les problèmes en cas de prise abusive ?  

Souvent, les indications médicales strictes justifiant la prise d’anti-inflammatoires sont rares et il y a des risques.

  • Mauvais usage du médicament.
  • Interactions médicamenteuses.
  • Provenance des produits.

  • Retard du diagnostic et de la prise en charge de la pathologie sous-jacente. Par exemple dans le cadre de tendinites, les patients peuvent prendre ces anti-douleurs pour courir alors qu'ils seraient incapables de le faire sans. Donc ils peuvent aggraver éventuellement les symptômes et surtout la pathologie sous-jacente.  

Ne pas oublier qu’en cas de blessure les secrets du retour à la performance sont :

  • Un diagnostic précis.
  • Un traitement et une rééducation adaptés.
  • Le respect des délais de cicatrisation et de reprise sportive.

Pour chaque médicament il existe des effets secondaires 


Les pratiquants, ne sont, le plus souvent pas, conscients de leurs effets secondaires qui ne sont pourtant pas négligeables ! 
Sur le plan digestif, la toxicité gastrique et intestinale des anti-inflammatoires apparaît particulièrement lors d’une prise chronique, sous forme d’ulcères ou de saignements digestifs.
Même de petites doses d’anti-inflammatoires (Ex 2 x 400 mg d’ibuprofen), peuvent majorer de façon significative les lésions intestinales secondaires. 

Enfin, à doses élevées, et en cas de prise sur de longues périodes, les anti-inflammatoires sont impliqués dans la survenue d’accidents cardio-vasculaires graves : accidents coronariens aigus, infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux

Des interférences entre le médicament et la pratique sportive 

Il a également été décrit dans les sports de contact, un risque accru d’hématome lors de la prise de ces médicaments. Le mécanisme d’action principal de ces substances est une inhibition de la réponse inflammatoire. Comme cette dernière participe au processus de cicatrisation après une blessure, la guérison s’en trouve par ce fait altéré.

Mais l’atteinte rénale ne doit pas non plus être négligée. En effet, il existe une déshydratation induite par l’exercice, notamment en atmosphère chaude ou bien lorsque l’effort est de longue durée. Cette déshydratation s’accompagne d’une atteinte rénale que les anti-inflammatoires peuvent aggraver fortement, au point même d’être à l’origine d’hospitalisation.  

Les anti-inflammatoires c'est pas obligatoire !

Quelques points sont à retenir par chaque sportif et son entourage à qui il appartient de lutter contre ces abus :  

  • Ce n’est pas parce qu’un médicament est en vente libre ou qu’il n’apparaît pas sur la liste des produits interdits par l’Agence Mondiale Antidopage qu’il n’est pas dangereux pour la santé. 

  • Si vous devez utiliser des anti-inflammatoires pour poursuivre un entraînement adapté, ne prenez le traitement que pendant une période courte de quelques jours. Au-delà consultez de préférence un médecin du sport. 
Si vous suivez ces conseils et évitez l’excès d’automédication, vous devriez pouvoir profiter de votre sport favori sans trop de désagrément..... retenons que les anti-inflammatoires c’est pas obligatoire !