Football américain : le cerveau en danger

Ce mercredi 9 mars 2016 sort en salles le film "Seul contre tous", dans lequel Will Smith joue le rôle d'un médecin qui fut le premier à découvrir l'encéphalopathie traumatique chronique, une affection cérébrale liée à la pratique du football américain chez les professionnels. Il mena un combat pour faire connaître les risques liés à ce sport et s'opposa à la Ligue nationale de football américain. Un sujet resté longtemps tabou aux Etats-Unis où le football américain est le sport le plus populaire. En France, ce sport n'est pas professionnel, mais séduit plus de 20.000 licenciés. Ce sport est-il dangereux ? Quels sont les risques ?

La rédaction d'Allo Docteurs
La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

Si le football américain est un sport tactique, c'est aussi un sport de collisions. Et l'un des risques majeurs liés aux chocs est la commotion cérébrale. Un coup à la tête ou même au thorax lors d'un plaquage, par exemple, provoque un ébranlement du cerveau d'avant en arrière dans la boîte crânienne, ce qui entraîne une altération des fonctions neurologiques : perte de connaissance immédiate (le fameux KO) mais le plus souvent des vertiges, des troubles visuels ou de la mémoire.

Sortir le joueur du terrain en cas de commotion cérébrale, c'est la règle d'or. Il faut ensuite surveiller le syndrome post-commotionnel. Maux de tête, fatigue, problèmes de concentration, troubles de l'humeur… des symptômes qui peuvent apparaître dans les semaines qui suivent.

À long terme, les conséquences des commotions cérébrales peuvent être très graves. Aux Etats-Unis, une récente étude menée sur des joueurs professionnels de football américain décédés a révélé que la plupart d'entre eux souffraient d'encéphalopathie chronique post-traumatique : "C'est une maladie dite dégénérative qui est un peu un mélange d'Alzheimer et de Parkinson, qui est en rapport avec une sécrétion de protéines pathologiques que l'on a tous en nous. Une protéine normalement synthétisée de manière soluble et lorsque l'on prend des coups, cette protéine qu'on appelle protéine tau va devenir insoluble, elle va être désagrégée, elle va détruire une cellule et elle va peut-être avoir la possibilité de contaminer les autres cellules et de désagréger toutes les autres protéines tau. Actuellement on ne sait pas s'il existe un seuil, si c'est à partir de tant de commotions que l'on va développer une encéphalopathie chronique post-traumatique", explique le Dr Jean-François Chermann, neurologue.

En France, l'enjeu n'est pas le même puisque le football américain n'est pas un sport professionnel. Mais on prend la question très au sérieux. En maîtrisant les bons gestes, on peut réduire les risques sans perdre l'intérêt du sport comme le souligne Nicholas Simoneau, entraîneur : "Il y a des commotions cérébrales. Mais nous entraînons les joueurs techniquement pour ne pas qu'ils mettent la tête et la majorité des coaches français et des anciens joueurs ont compris soit par expérience personnelle, soit par apprentissage des techniques qu'il ne fallait pas utiliser la tête. Si on associe la technique et l'intelligence des joueurs, on devrait être capable d'avoir un minimum de commotions".

Pour renforcer la sécurité des joueurs, la Fédération française de football américain a fait de la prévention l'une de ses priorités. Lors des matches, la présence d'un médecin est obligatoire mais lors des entraînements, c'est le coach qui est responsable de son équipe. C'est pourquoi un nouvel outil sera distribué prochainement à tous les entraîneurs : une carte de poche sur la commotion cérébrale.

Autre cheval de bataille : la santé des jeunes joueurs. Car les commotions cérébrales sont plus graves chez les moins de 20 ans. "Pour 2017, on va proposer que de 10 ans à 14 ans, on puisse pratiquer une forme de jeu sans contact. Les jeunes pourraient être équipés de manière plus soft, non pas avec des casques et des équipements très lourds, mais avec des choses très légères. Il faut avoir le goût du foot américain sans les plaquages et les collisions", prévient Olivier Moret, directeur technique national. Le plus difficile sera certainement de changer la mentalité des supporteurs, pour qui continuer le match après un KO fait partie du jeu et du spectacle.